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Article original Validité cross-culturelle de la théorie cognitive de la dépression : une comparaison franco/nord- américaine R. Ameli 1 , J. Swendsen 2 *, P. Compagnone 2 , C. Grillon 1 1 National Institutes of Mental Health (NIMH), USA ; 2 université Victor-Segalen, Bordeaux 2, 3ter, place de la Victoire, 33076 Bordeaux, France (Reçu le 10 décembre 2000 ; accepté le 22 mai 2001) Résumé – Le but de cette étude longitudinale était d’étudier la validité transculturelle de la théorie cognitive de la dépression entre les États-Unis et la France. En utilisant la méthode d’échantillonnage des expériences et des mesures psychologiques sur l’anxiété et la dépression, un groupe d’étudiants français et un groupe d’étudiants nord-américains ont été caractérisés à partir de variables essentielles dans la théorie cognitive de la dépression. Des signaux électroniques signalaient aux participants, cinq fois par jour pendant une semaine, qu’ils devaient répondre à des questions concernant leur humeur dépressive ainsi que les événements négatifs quotidiens et leurs attributions. En contrôlant statistiquement, dans les analyses, les effets liés au sexe et aux niveaux cliniques de l’anxiété et la dépression, les résultats montrent des différences notables entre le groupe français et le groupe nord-américain pour ce qui est de la sévérité moyenne des événements négatifs quotidiens, des humeurs dépressives et des attributions causales. Cependant, les relations entre ces variables (à la base de l’hypothèse fondamentale de la théorie cognitive) ne dépendent pas de l’origine des groupes. C’est ainsi que si ces résultats indiquent que l’expérience, évaluée par des variables spécifiques, est affectée par des facteurs culturels, ils suggèrent aussi que les principes des théories cognitives sur la dépression sont généralisables d’une culture à l’autre. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS attribution / cognitif / cross-culturel / dépression / validité Summary – Cross-cultural validity of the cognitive theory of depression: a french american comparison. This prospective study provided a direct comparison of French and American samples on variables central to cognitive theory of depression. Using the Experience Sampling Method and identical measures across sites, subjects were signaled five times daily for one week to provide reports of negative events, attributions, and depressed moods. Controlling for effects associated with gender and trait anxiety and depression, significant differences emerged between French and American samples concerning the average severity of daily negative events, depressed moods, and causal attributions. However, the relationships between these variables (the fundamental hypothesis of cognitive theory) was largely unaffected by sample source. The results underscore the importance of cultural factors for the experience of specific variables, but provide support for the generalizability of the theory’s tenets across French and American populations. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS attribution / cognitive / cross-cultural / depression / validity *Correspondance et tirés à part : département de psychologie, université Victor-Segalen, Bordeaux 2, 3ter, place de la Victoire, 33076 Bordeaux, France. Adresse e-mail : [email protected] (J. Swendsen). Ann Méd Psychol 2002 ; 160 : 362-8 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003448702001804/FLA

Validité cross-culturelle de la théorie cognitive de la dépression : une comparaison franco/nord-américaine

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Article original

Validité cross-culturelle de la théorie cognitivede la dépression : une comparaison franco/nord-américaine

R. Ameli1, J. Swendsen2*, P. Compagnone2, C. Grillon1

1 National Institutes of Mental Health (NIMH), USA ; 2 université Victor-Segalen, Bordeaux 2, 3ter, place de laVictoire, 33076 Bordeaux, France

(Reçu le 10 décembre 2000 ; accepté le 22 mai 2001)

Résumé – Le but de cette étude longitudinale était d’étudier la validité transculturelle de la théorie cognitive de ladépression entre les États-Unis et la France. En utilisant la méthode d’échantillonnage des expériences et des mesurespsychologiques sur l’anxiété et la dépression, un groupe d’étudiants français et un groupe d’étudiants nord-américainsont été caractérisés à partir de variables essentielles dans la théorie cognitive de la dépression. Des signauxélectroniques signalaient aux participants, cinq fois par jour pendant une semaine, qu’ils devaient répondre à desquestions concernant leur humeur dépressive ainsi que les événements négatifs quotidiens et leurs attributions. Encontrôlant statistiquement, dans les analyses, les effets liés au sexe et aux niveaux cliniques de l’anxiété et ladépression, les résultats montrent des différences notables entre le groupe français et le groupe nord-américain pour cequi est de la sévérité moyenne des événements négatifs quotidiens, des humeurs dépressives et des attributionscausales. Cependant, les relations entre ces variables (à la base de l’hypothèse fondamentale de la théorie cognitive) nedépendent pas de l’origine des groupes. C’est ainsi que si ces résultats indiquent que l’expérience, évaluée par desvariables spécifiques, est affectée par des facteurs culturels, ils suggèrent aussi que les principes des théoriescognitives sur la dépression sont généralisables d’une culture à l’autre. © 2002 Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

attribution / cognitif / cross-culturel / dépression / validité

Summary – Cross-cultural validity of the cognitive theory of depression: a french american comparison. Thisprospective study provided a direct comparison of French and American samples on variables central to cognitivetheory of depression. Using the Experience Sampling Method and identical measures across sites, subjects weresignaled five times daily for one week to provide reports of negative events, attributions, and depressed moods.Controlling for effects associated with gender and trait anxiety and depression, significant differences emerged betweenFrench and American samples concerning the average severity of daily negative events, depressed moods, and causalattributions. However, the relationships between these variables (the fundamental hypothesis of cognitive theory) waslargely unaffected by sample source. The results underscore the importance of cultural factors for the experience ofspecific variables, but provide support for the generalizability of the theory’s tenets across French and Americanpopulations. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

attribution / cognitive / cross-cultural / depression / validity

*Correspondance et tirés à part : département de psychologie, université Victor-Segalen, Bordeaux 2, 3ter, place de la Victoire, 33076 Bordeaux, France.Adresse e-mail : [email protected] (J. Swendsen).

Ann Méd Psychol 2002 ; 160 : 362-8© 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés

S0003448702001804/FLA

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De nombreux travaux au cours des vingt dernièresannées ont démontré l’importance des processus cogni-tifs dans l’étiologie de la dépression. Parmi les modèlescognitifs les plus influents, on compte la perspectiverationnelle-émotive [18], la théorie cognitive de Beck[6, 7] et une série de modèles attributionnels dérivés desexpériences de Seligman relatives à « l’impuissanceapprise » [1, 2, 4]. Bien qu’il existe des différencesimportantes entre ces théories, leur point commun estde proposer que l’influence des événements négatifs surla dépression dépende largement de la façon dont l’évé-nement est perçu par l’individu. L’idée principale estqu’après chaque incident négatif, l’individu commencepar évaluer son degré de contrôle de l’événement.Lorsque les événements passés ou en cours sont consi-dérés comme incontrôlables, il y a de fortes chancesqu’il en soit de même des événements semblables àvenir, d’où le développement du sentiment d’impuis-sance chez l’individu. Ainsi, les cognitions spécifiques(les attributions, les perceptions et les évaluations)déterminent-elles la négativité subjective de l’événe-ment et la façon dont l’individu réagira émotionnelle-ment.

Bien que des études portant sur des patients dépressifsaient étayé les principes de base de la perspective cogni-tive [22, 29, 33], la majorité de la recherche soutenantcette perspective repose sur des données collectées parmides groupes d’étudiants normaux [3, 21, 25-27, 34].Un objectif commun à ces investigations était l’examendes fluctuations d’humeur relativement normales suiteà des incidents négatifs mineurs. Cette approche apermis de tester les théories cliniques à l’aide d’unepopulation « analogue ». La validité d’une telledémarche est désormais bien établie [38] et suggère quecette forme de dépression varie sur un continuum (enfonction de la sévérité des événements négatifs et descognitions spécifiques). Néanmoins, s’il semble validede généraliser les résultats obtenus chez des groupesd’étudiants sains à des patients psychiatriques, l’on peutse poser la question de la générabilité des résultats d’uneculture à l’autre. Ce problème concerne plus particuliè-rement les théories cognitives de la dépression puisquela majorité de la recherche a été conduite sur des sujetsanglo-saxons.

Il a été suggéré que l’expression de la psychopatho-logie est fortement influencée par les facteurs liés àl’appartenance à une ethnie ou une société particulières[5, 20, 24, 30, 31]. De plus, il est établi que les cogni-tions spécifiques relatives à la perception de la contrô-labilité, les attributions causales et les explicationssociales dépendent en partie de la culture des individus[23, 28, 32, 37]. Bien qu’il y ait de nombreuses raisonsde valoriser l’influence de la culture sur les variables

essentielles définies par la théorie cognitive, peu detravaux ont étudié cette question. En particulier, iln’existe pas de données concernant les différences entreles populations française et nord-américaine. S’il nefaut pas mésestimer les liens communs de la cultureoccidentale entre les sociétés française et nord-américaine, il est important aussi de ne pas négliger lesdifférences qui caractérisent ces deux sociétés, commel’illustre une étude récente sur une théorie cognitive[36]. La détermination de la nature et de l’intensité desdifférences culturelles sur les variables centrales de nom-breuses théories cognitives, élaborée dans la littératureaméricaine, est fondamentale afin de permettre uneutilisation clinique cohérente de l’approche cognitivisteen France.

L’objectif de cette étude est de comparer, entre ungroupe d’étudiants français et un groupe d’étudiantsnord-américains, les caractéristiques (stabilité, globa-lité, internalité) concernant l’évaluation de la négativitéd’un événement et de l’humeur dépressive consécutiveainsi que la nature des attributions causales décrites parla théorie du désespoir relative à la dépression [1]. S’ilest vrai que cette théorie ne représente qu’un seulmodèle cognitif, elle est suffisamment proche des autresthéories relatives à ce domaine pour pouvoir nous aiderà mettre en évidence des différences inter-culturellespotentielles. L’examen des théories cognitives avec dessujets sains doit tenir compte du fait que l’humeur et lesévénements négatifs quotidiens varient considérable-ment au cours de très courtes périodes. Il faut doncutiliser une méthodologie permettant de décrire leschangements rapides des relations entre les incidentsmineurs, les cognitions spécifiques et les fluctuations del’humeur. Une telle analyse peut être conduite à l’aidede la Méthode d’Échantillonnage des Expériences(Experience Sampling Method ou ESM). Dans l’ESM,des appareils électroniques (beepers ou montres à mul-tiples sonneries) sont utilisés pour donner à différentsmoments, pris au hasard dans la journée, un signal auxsujets afin qu’ils remplissent une fiche rendant comptede leurs humeurs, leurs cognitions et des événements seproduisant. Cette méthode permet l’examen d’unéchantillon représentatif d’états mentaux dans des situa-tions de la vie quotidienne, tout en n’imposant aucunelimite temporelle ou contextuelle [15-17]. Afin de déter-miner la validité de la théorie cognitive sur le dépressiond’un groupe culturel à un autre, nous avons dans unpremier temps procédé à une comparaison des deuxgroupes par rapport aux variables évaluant l’expérienceindividuelle des événements négatifs, le niveau del’humeur dépressive et les attribution causales (collec-tées par ESM). Dans un deuxième temps, nous avonsexaminé les relations entre ces différentes variables à

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l’intérieur de chaque groupe afin de déterminer leurmécanisme respectif des changements de l’humeur.

MÉTHODE

Sujets

Quarante-trois étudiants américains (21 de sexe mas-culin, 22 de sexe féminin) de l’université de Californie,à Los Angeles, et quatre-vingt-dix étudiants français (26de sexe masculin, 64 de sexe féminin) de l’université deGrenoble ont participé à cette étude. L’échantillonaméricain était composé de 45 % d’Asiatiques, 30 %d’Indo-Européens, 14 % de Latinos-Américains et10 % d’origines ethniques diverses, avec un âge moyende 19 ans (écart-type = 1,1). L’échantillon français étaitcomposé de 90 % de sujets d’origine française et de10 % d’origines ethniques diverses, avec un âge moyende 20,7 ans (écart-type = 3,7).

Procédure

Les investigations aux États-Unis et en France parta-gent les mêmes caractéristiques et ont suivi une procé-dure identique décrite précédemment [34, 35]. Lamajorité des participants ont été recrutés dans le cadredes cours universitaires pour une étude dont l’objectifannoncé était l’observation des expériences quoti-diennes. Les étudiants intéressés ont été convoqués à unentretien au cours duquel ils ont répondu aux question-naires décrits ci-après, relatif aux problèmes de l’anxiétéet de la dépression, avant de suivre une session destinéeà les familiariser avec l’ESM. Au cours de cette dernière,les sujets volontaires ont été équipés d’un beeper oud’une montre à sonneries multiples, ainsi que d’unnombre de fiches d’échantillonnage des expériencessuffisant pour une semaine. Il leur a été demandé, àchaque signal sonore, de noter le niveau de leur étatdépressif, les événements de la journée, ainsi que lesattributions consécutives à ces derniers. Pour s’assurerde la bonne compréhension des procédures de l’examenet des explications relatives à l’humeur et aux échellesd’attribution, tous les participants ont rempli une fiche-test d’échantillonnage des expériences, laquelle fut ulté-rieurement vérifiée par le responsable de l’étude.

Pendant sept jours, le signal sonore était activé cinqfois par jour, soit une fois par créneau horaire : entrehuit et 11 heures ; 11 et 14 heures ; 14 et 17 heures ; 17et 20 heures ; et enfin, entre 20 et 23 heures. Il étaitdonc demandé à chaque sujet de remplir 35 question-naires sur l’ensemble du protocole. En milieu desemaine, les participants ont reçu un coup de téléphoneafin de les encourager et de s’assurer du bon fonction-nement de l’expérience. À la fin de la partie consacrée à

l’échantillonnage des expériences, les fiches ont étécollectées avec les instruments émetteurs de signaux etles participants ont alors été clairement informés quantà l’objectif précis de l’étude.

Mesures

Inventaire de la dépression de BeckLes niveaux de dépression clinique du groupe de parti-cipants américains ont été mesurés par le Beck Depres-sion Inventory ou BDI [9]. Le BDI est un inventaireauto-évaluatif de 21 items, d’une forte cohérenceinterne (le coefficient alpha moyen des patients autresque psychiatriques est de 0,81), d’une bonne fiabilitétest-retest, et ayant d’importantes corrélations (supé-rieures à 0,60) avec d’autres instruments de mesure dela dépression [10]. Pour le groupe de participants fran-çais, une version française abrégée de l’inventaire de ladépression de Beck a été utilisée. Il s’agit d’un inven-taire auto-évaluatif de 13 items à forte cohérence interneet manifestant de fortes corrélations avec d’autres ins-truments de mesure de la dépression en langue française[13]. D’autre part, le BDI abrégé en français possèdeune structure factorielle similaire à la version d’origine.

Inventaire de l’anxiété de BeckLes niveaux d’anxiété clinique ont été déterminés àl’aide du Beck Anxiety Inventory ou BAI [8]. Le BAI, enanglais, est un inventaire auto-évaluatif de 21 items, àforte cohérence interne (alpha = 0,92), d’une grandefiabilité test-retest, et d’une corrélation moyenne(r = 0,51) avec les autres instruments de mesure del’anxiété. Quant au BAI en français, il possède unecohérence interne de 0,86 et les mêmes caractéristiquesque la version anglaise pour ce qui est des corrélationsavec les autres instruments de mesure de l’anxiété [19].

États dépressifsAlors que le questionnaire BDI a été utilisé initialementpour déterminer des problèmes cliniques de dépression,les humeurs dépressives quotidiennes ont été détermi-nées, sur la fiche d’échantillonnage des expériences, àl’aide de la sous-échelle de la dépression (12 items) de laMultiple Affect Adjective Check List-Revised ouMAACL-R. L’échelle MAACL-R relative à la dépres-sion possède une forte cohérence interne (alpha = 0,82)dans les groupes d’étudiants. La MAACL-R française agardé les qualités psychométriques de la version anglaisepour ce qui est de la forte cohérence interne et descorrélations importantes avec d’autres instruments demesure de la dépression [11, 14].

Événements négatifs quotidiensL’occurrence des événements négatifs quotidiens a étécomptabilisée grâce aux réponses à des questions semi-ouvertes permettant aux sujets de rendre compte d’évé-

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nements quotidiens classés en différents domaines(« Depuis le signal précédent, veuillez indiquer, parrapport aux domaines suivants, l’événement qui vous aaffecté le plus »). Les domaines figurant sur la fiched’échantillonnage des expériences sont ceux utilisés dansl’Inventory of Small Life events ou ISL [39] (famille,travail, loisirs, ménage/foyer, situation financière, santé,relations sociales, problèmes juridiques, études, religionet soucis de transports). Une fois l’événement ayant eule plus grand impact déterminé, l’instruction dans lafiche d’échantillonnage des expériences demandait ausujet de donner un score relatif à sa négativité sur uneéchelle Likert de sept points. Cette méthode d’examendes événements a été conçue pour fournir un compterendu relativement exhaustif des événements négatifsquotidiens grâce au classement dans les différentsdomaines.

Attributions spécifiquesAprès avoir mentionné l’événement ayant eu le plusgrand impact depuis le dernier signal ESM ainsi queson degré négatif, les participants devaient évaluer cetincident à la manière décrite par Metalsky et al. [25].On demande ainsi à l’individu, après avoir indiqué lacause principale de l’événement négatif, d’évaluer ledegré de stabilité de l’événement ; en d’autres termes,s’il pense que le problème persistera ou non, le degré deglobalité de l’événement, c’est-à-dire s’il pense que leproblème affecte de nombreux domaines de sa vie, etenfin le degré d’internalité, c’est-à-dire s’il pense que leproblème est causé par lui-même ou bien par d’autrespersonnes ou circonstances. Stabilité, globalité et inter-nalité sont évaluées sur des échelles Likert de sept points(les scores les plus élevés correspondant à une plus fortestabilité, globalité et internalité).

Équipement de l’ESMLes sujets recevaient les signaux soit par beeper électro-nique (échantillon américain) soit par montre Casio™TGW10 programmée (échantillon français).

Analyse de données

L’objectif de nos analyses était tout d’abord de décrirel’expérience individuelle (intra-sujet) concernant desvariables décrivant des concepts fondamentaux pour lesthéories cognitives de la dépression. Dans un deuxièmetemps, les effets différentiels de ces variables selon laculture (américaine ou française) des sujets ont étéexaminés (variations inter-individuelles). Étant donnél’impossibilité de traiter à la fois les variations intra- etinter-individuelles, dans cette structure hiérarchique,par analyses de régression standard, les données ont étéanalysées à l’aide du modèle linéaire hiérarchique, hie-rarchical linear modeling (HLM), développé par Bryk et

Raudenbush [12]. Selon la théorie cognitive, on peutdécrire la relation entre le niveau d’humeur dépressiveet la perception des événements pour une personne à unmoment donné par l’équation suivante :

Depressionij = b0j + b1� Attributionij � + rij (1)

où Dépressionij est le score de l’état d’humeur aumoment de l’observation i de la personne j, l’intersec-tion b0j est le score de l’humeur anticipé pour la per-sonne j lorsque le score de l’événement est 0 ; la penteb1j est le changement anticipé pour le score de l’humeurde la personne j lors d’un accroissement de la négativitédes attributions de l’événement ; Attributionij est lanégativité de l’attribution pour un événement précis del’observation i de la personne j ; rij est l’erreur associée àl’observation i de la personne j.

Afin d’examiner la variation due aux facteurs cultu-rels, les intersections et pentes des individus j peuventêtre expliquées au niveau 2 par les équations ci-dessous :

b0j = c00 + c0� Sexej � + c0� BAIJ � + c0� BDIj � +

c0� Nationalitej � + u0j (2)

b1j = c10 + c1� Sexej � + c1� BAIJ � + c1� BDIj � +

c1� Nationalitej � + u1j (3)

où c00 est l’intersection générale ; c01 à c03 représententles effets du sexe de l’individu et de ses niveaux cliniquesinitiaux (niveaux de base) de l’anxiété (BAI) et dedépression (BDI) sur b0j; c04 est le principal effet del’origine du groupe (américaine ou française) sur b0j ;u0j est l’unique incrément de l’intersection associé àl’individu j, c10 est l’effet principal de l’occurrence del’événement négatif ; de c11 à c13 se trouvent les termesd’interaction entre sexe et scores cliniques initiaux avecla négativité de l’événement ; c14 est le terme d’interac-tion du groupe d’origine ; u1j est l’incrément de lapente associé à l’individu j.

RÉSULTATS

Les statistiques descriptives de toutes les mesures ESMet cliniques sont présentées dans le tableau I. Les niveauxde base trouvés suite à l’évaluation clinique initialeconcernant l’anxiété (par le BAI) et la dépression (par leBDI) sont indiqués dans ce tableau à titre indicatif. Cesdonnées sont utilisées par la suite pour contrôler statis-tiquement l’effet possible du niveau de base de dépres-sion et d’anxiété, tout comme l’effet sexe sur lesphénomènes qui nous intéressent ici (voir équation 2

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de la méthode d’analyse HLM décrite précédemment).Les deux échantillons ont permis de réunir 4 187 obser-vations valides provenant de divers contextes de la viequotidienne. Une vérification du respect de la métho-dologie ESM a mis en évidence que les sujets françaisn’ont négligé de répondre en moyenne qu’à 2,61 ques-tionnaires sur les 35 (écart type = 3,10), tandis que lesAméricains en ont manqué 5,4 sur les 35 (écarttype = 4,95). De plus, la plupart des formulaires validesfurent remplis dans les dix premières minutes suivant lesignal dans les deux échantillons.

Les différences basiques entre les deux échantillonssont représentées dans l’équation 2 par le terme c04,indiquant dans quelles proportions l’expérience de cer-taines variables (mesurées à maintes reprises et dans denombreux contextes par l’ESM) est influencée par lanationalité de l’individu. Comme le montre letableau II, les sujets français et américains s’avèrentsignificativement différents dans leur perception de lasévérité des événements négatifs, leurs attributions spé-cifiques et réactions d’humeur dépressive (évaluée par leMAAL-R). Après avoir contrôlé statistiquement à lafois les effets liés au sexe et aux niveaux cliniques ini-tiaux de dépression et d’anxiété, l’origine nationaleexplique 24 % de la variance inter-individuelle relativeaux perceptions de la négativité de l’événement� c04 = 0,880, t = 6,555, p < 0,001 � et 5,2 % de lavariance inter-individuelle relative à l’humeur dépres-sive � c04 = 0,169, t = 2,847, p < 0,01 �.

Ainsi, bien que l’échantillon français attribue uneplus grande négativité aux événements que l’échan-tillon américain, ce fait n’explique pas une grande partiede la variance de l’humeur dépressive. Cela provientprobablement du fait que les Français, tout en perce-vant les événements de façon plus négative que lesAméricains, ont des cognitions relatives à ces mêmesévénements beaucoup moins sévères. L’origine natio-nale explique 18,3 % de la variance inter-individuelleconcernant le facteur stabilité de l’attribution� c04 = − 1,135, t = − 5,435, p < 0,001 �, 29,5 % de

la variance concernant le facteur de causalité interne de� c04 = − 0,741, t = − 6,492, p < 0,001 � et 7,9 % dela variance liée au fait que les événements affecteraientglobalement de nombreux domaines dans la vie del’individu � c04 = − 0,625, t = − 3,346, p < 0,001 �.

S’il est vrai que les différences de score indiquent quel’expérience typique de ces variables n’est pas identiquepour les groupes français et américains, ces analyses nepermettent pas de comprendre la possibilité de généra-liser des concepts théoriques relatifs à la dépression d’ungroupe à l’autre. Dans l’objectif d’examiner plus préci-sément ce point, les analyses décrites dans les équa-tions 2 et 3 ont été exécutées. Ces analyses sont centréessur le terme d’interaction, c14 qui indique si la relationentre variables spécifiques (c’est-à-dire la pente dechaque individu) varie de façon significative en fonc-tion de l’origine du sujet. Comme on le constate dans letableau III, l’origine de l’échantillon n’a aucun impactsur les relations entre variables, à l’exception de la penterelative à la globalité et à l’humeur dépressive� c14 = 0,050, t = 2,556, p < 0,05 �. De plus, enaccord avec la théorie, les deux échantillons se caracté-risent par une ligne de régression positive. Ainsi, malgréles nombreuses variations importantes entre échan-tillons, en ce qui concerne certaines variables, il est clairque fondamentalement la validité de la théorie (quelsque soient les échantillons) ne s’en trouve pas affectée.

Tableau I. Moyenne et écarts-types des niveaux de base d’anxiété et de dépression suite à l’évaluation clinique initiale et des mesures ESM.

Variables Français (N = 90) Américains (N = 43)M Écart type M Écart type

Anxiété et dépression traits évaluation clinique initialeDépression (BDI)a 7,04 5,44 5,51 3,74Anxiété (BAI) 9,59 7,38 7,28 3,82Moyennes ESM (évaluation quotidienne)Humeur dépressive (MAACL-R) 0,53 0,36 0,30 0,28Négativité de l’événement 3,08 0,80 2,12 0,66Attribution de stabilité 4,44 1,18 5,44 0,88Attribution de globalité 3,38 1,04 3,91 0,93Attribution d’internalité 3,76 0,61 4,53 0,55aLes scores du BDI abrégés ont été convertis à l’échelle originale

Tableau II. Sévérité moyenne des variables selon l’origine (améri-caine ou française), après avoir contrôlé la représentation des deuxsexes et les niveaux cliniques initiaux d’anxiété et de dépression.

Variable Coefficient c04 t

Humeur dépressive 0,169 0,059 2,847**Négativité de l’événement 0,880 0,143 6,155***Attributions de stabilité – 1,135 0,209 – 5,435***Attributions de globalité – 0,625 0,187 – 3,346***Attributions d’internalité – 0,741 0,114 – 6,492

**p < 0,01 ;***p < 0,001

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DISCUSSION

Nous avons examiné dans cette étude la possibilité degénéraliser d’une culture à l’autre les mécanismes spé-cifiques des changements d’humeur (c’est-à-dire lesrelations entre variables). En ce qui concerne l’expé-rience typique des événements négatifs, les attributionscorrespondantes et les états d’humeurs dépressives asso-ciés, des différences significatives entre les deux échan-tillons ont été mises en évidence de façon consistanteavec des résultats précédents [36]. Les sujets françaisont évalué leurs événements négatifs quotidiens de façonplus négative que les Américains, mais leurs attribu-tions causales se sont avérées moins sévères. Ces diffé-rences semblent toutefois s’être compensées puisque lesdifférences d’humeur entre les échantillons, bien quesignificatives, se sont avérées de faible magnitude. Cesconclusions rejoignent celles des études, de plus en plusnombreuses, examinant le rôle des différences cultu-relles ou de l’origine nationale dans l’expression despsychopathologies et l’expérience des attributions spé-cifiques et des perceptions [5, 20, 23, 24, 28, 30-32,37]. Étant donné que les effets liés au sexe ou auxniveaux cliniques initiaux anxieux ou dépressifs étaientcontrôlés dans toutes les analyses, il est improbable queces résultats s’expliquent par des différences dans lareprésentation des deux sexes dans les échantillons ouune expérience peut-être plus stressante de la vie étu-diante pour les sujets français ou américains.

En dépit des différences importantes entre sujets fran-çais et américains pour ce qui est de l’expérience desvariables spécifiques, les analyses idiographiques ontdémontré que les concepts de la théorie cognitivedemeurent identiques quelle que soit l’origine cultu-relle. À l’exception, toutefois, d’une faible différence ence qui concerne les relations entre les attributions deglobalité et la dépression, caractérisées par une penteplus grande pour les sujets français. Cela signifie que lesattributions de globalité ont abouti à une dépressionlégèrement plus élevée chez les sujets français que chezles sujets américains. Néanmoins, les deux échantillonsont tous deux été caractérisés par des pentes positivesentre la globalité et la dépression, ce qui rejoint lathéorie [34, 35]. Ces conclusions mettent en évidencequ’il est possible de généraliser les résultats de la

recherche dans ce domaine d’une population à l’autre,et démontrent que des différences dans l’expérience debase des attributions, événements, ou états d’humeur,n’affectent pas forcément la validité d’une théorie psy-chologique donnée.

Les points forts de cette comparaison internationaleincluent l’usage de mesures et de procédures de recueilde données identiques pour tous les sujets, ainsi que lefondement des résultats sur des milliers d’observationsrelevées dans des contextes sociaux et environnemen-taux très divers. Cependant, il est important de consi-dérer certaines limites avant de tirer les conclusions deces constats nouveaux. Ainsi, cette étude n’effectue unecomparaison que dans le contexte d’une seule théoriecognitive : la théorie de la dépression du désespoir [1].Bien que les tenants de cette théorie partagent de nom-breuses similitudes avec d’autres formulations cogni-tives [4, 7, 18] on ne peut pas considérer que lesrésultats confirment toutes les perspectives cognitives.De plus, l’ESM a recours à un contrôle ambulant audétriment de certains aspects importants. En effet, lesexamens ESM sont forcément brefs et ne permettentpas de prendre en compte toutes les dimensions desattributions ou perceptions. Un examen de ces pointsnous semble nécessaire avant d’interpréter les conclu-sions de cette étude ou de concevoir de nouvelles inves-tigations destinées à l’examen de la validité des théoriespsychologiques d’une société ou une culture à l’autre.[40]

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Tableau III. Relation entre variables selon l’origine (américaine ou française), après avoir contrôlé la représentation des deux sexes et les niveauxcliniques initiaux d’anxiété et de dépression.

Pente Coefficient c04 Erreur t

Négativité de l’événement /dépression – 0,006 0,023 – 0,265Attribution de stabilité/dépression 0,006 0,022 0,268Attribution de globalité/dépression 0,051 0,019 2,556*Attribution d’internalité/dépression 0,007 0,017 0,431

*p < 0,05

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