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Pollution de l'air : c'est quoi le problème ?
Saint-Étienne, 4 octobre 2014 - Michel Puech
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sommaire
Pollution de l'air : c'est quoi le problème ?
❶ un problème philosophique
❷ d'un nouveau type
❸ pour lequel il existe des méthodes
❹ bilan
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❶ un problème philosophique
je ne suis pas un spécialiste de la pollution ni de l'air...
mais un philosophe des nouveaux systèmes de valeur
parmi lesquels la soutenabilité et notre relation avec la technologie
→ dans les question écologiques / technologiques :une dimension philosophique
des questions de valeur, notamment
pas seulement « spéculative »
mais pratique et pragmatique : elle mène à un dispositif d'action (éthique)
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❶ un problème philosophique
dimension philosophique des deux notions
a) l'air
un sujet « transparent » philosophiquementparce qu'il est « trop naturel »
« comme on respire » = parfaitement naturellement, sans y penser
sauf quand on rencontre une difficultédès qu'on commence à « manquer d'air », tout de suite on ne pense à rien d'autre, il (l'oxygène) devient l'urgence absolue
pourtant la vie humaine se situe entre deux soufflesle premier (inspiration) et le dernier (expiration)
et entre les deux la maîtrise du souffle est essentiellesurtout ailleurs, dans la méditation indienne, la médecine chinoise, les arts martiaux japonais
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❶ un problème philosophique
une transparence dangereuse : on ne « voit » pas l'importance de l'air
il devient une poubelle à ciel ouvert, la poubelle la plus universelle et la plus discrète de la civilisation industrielle
un seul exemple de cette inconscience : l'échappement des voitures
1) chacun sait qu'il est un air mortel, on peut se suicider avec
2) chacun voit que nos rues en sont pleines, nous vivons au milieu de cet air, nous y promenons les poussettes et les bambins
→ quelque chose nous « échappe »...
une transparence « morale » de l'air
en termes de valeur
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❶ un problème philosophique
réintégrer l'air dans nos soucis :
une prise de conscience philosophique : la totalité écologique (« holisme »)
les humains et leur « technophère proche » ne sont pas des systèmes isolés
ils ne peuvent exister qu'à l'intérieur d'écosystèmes locaux
qui ne peuvent exister qu'à l'intérieur de l'écosystème global
= pas seulement une question de santé humaine (la respiration)
question anthropocentrisme / écocentrisme en philosophie environnementale
élargir nos soucis à l'air, et au-delà même de notre respiration
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❶ un problème philosophique
plusieurs holismes écologiques s'appliquent à la question de l'air :
l'hypothèse Gaïa de James Lovelockla Terre (l'écosystème planétaire) est un seul organisme vivant, dont tous les autres organismes ne sont que des composants
l'atmosphère fait partie du système Gaïa (écocentrisme)
la théorie de l’anthropocène= changement d'ère géologique : les activités humaines ont pris le relais des forces géologiques
elles sont notamment responsables de l'état de l'air, de l'atmosphère, du climat assumer cette responsabilité
des philosophies écologistes « profondes »Arne Naess, percevoir la totalité et le sens de l’harmonie globale, incluant les éléments non vivants
≠ valeurs du monde industriel, occidental
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❶ un problème philosophique
bilan : deux problèmes techniques avec l'air : la pollution / le climat
→ un seul problème moral : la transparence
qui est LE problème moral par excellence : la négligence, l'inconscience, l'irresponsabilité, le ne-pas-vouloir-savoir
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❶ un problème philosophique
b) la pollution
même approche : pas seulement une question technique
Michel Serres : « Nous ne savons traiter de la pollution qu'en termes physiques, quantitatifs, bref, qu'au moyen des sciences dures. Eh non, il s'agit bien de nos intentions, de nos décisions, de nos conventions. Bref, de nos cultures. » (Le mal propre. Polluer pour s'approprier ?, Le Pommier, 2008)
mais attention au naturalisme et à son idéologieMary Douglas, idéologies de la pureté et de la souillure
la notion de « pollution » porte les symboliques de la souillure et du mal, présentes dans toutes les cultures, et qui pour elle menacent de se développer en idéologie de la pureté écologique
éviter la confrontation idéologique qui bloque toute réflexion : idéologie naturaliste contre idéologie industrialiste
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❶ un problème philosophique
principe de l'Homo Sapiens Technologicus :
il a le droit de modifier la nature ≠ préservationnisme
mais il en est responsable
notamment vis-à-vis de ce qu'il reconnaît comme étant des valeurs :
la vie
la santé (humaine)
les écosystèmes
…
il ne s'agit pas de garder l'air « pur » de toute trace humaine
mais d'être responsable de ce que nous y mettons
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❷ d'un nouveau type
un nouveau type de problème philosophique
comme toutes les grandes questions d'environnement : le climat, la biodiversité, l'alimentation, la surpopulation, l'énergie, ...
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❷ d'un nouveau type
Hardin et la « tragédie des biens communs »
référence fondatrice de la réflexion pour l'écologie et la soutenabilité
HARDIN Garrett, "The Tragedy of the Commons", Science, 162, 1968, p. 1243-1248 - www.garretthardinsociety.org/articles/art_tragedy_of_the_commons.html
les commons = biens utilisables par tous (pré communal, moulin, rivière...)
tous en usent, chacun en abuse pour son propre compte
ils finissent par se dégrader et devenir inutilisables par tous
un système de régulationque Hardin voulait appliquer en priorité au contrôle de la natalité
l'air est le bien commun par excellenceinappropriable, difficilement régulable
et pourtant totalement essentiel
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❷ d'un nouveau type
la singularité philosophique du problème : la « tempête parfaite »
GARDINER Stephen M., A perfect moral storm: The ethical tragedy of climate change, Oxford U.P., 2011
s'applique au problème du changement climatique chez Gardiner, « tempête morale parfaite »
mais est partiellement extensible aux autres problèmes de l'air
les pires conditions (de problème) sont réunies incertitudes et controverses sur les données de base et leur interprétation
énorme dispersion des causes et des effets
fragmentation des responsabilités
question transgénérationnelle
inadéquation des institutions
hypocrisie morale générale préalable : nous ne voulons pas savoir ce qui nous contrarie
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❷ d'un nouveau type
l'acrasie collective : Oreskes et ConwayORESKES Naomi, CONWAY Eric, The collapse of Western civilization: A view from the future, Columbia U.P., 2014, trad. L'effondrement de la civilisation occidentale, Les liens qui libèrent, 2014
science-fiction : un rapport écrit dans le futur sur notre effondrement à la fin du 21e siècle
la question : alors qu'ils savaient, pourquoi n'ont-ils rien fait ? (« ils » = nous aujourd'hui)
réponse des auteurs : mauvaise construction des sciences (sur la question de l'incertitude) + corruption des pouvoirs par les marchés
intérêt philosophique : c'est une question de base en éthique, celle de l'acrasie
ne pas parvenir à agir alors qu'on sait qu'on doit / alors qu'on veut
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❸ pour lequel il existe des méthodes
une position constructive
« à faire soi-même »
les nouveaux courants de l'éthique, constructifs
rendus nécessaires par l'échec ou par les limites des anciennes approches
paternalisme technocratique
délégation institutionnelle
délégation politicienne
militance moralisante
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❸ pour lequel il existe des méthodes
conscience
la dimension de prise de conscience personnelle, première étape de la consistance et peut-être de la sagesse
« soin de soi » et « éthiques de la vertu »
le retour du « soi » en philosophie≠ approches sociologiques, économiques, politisées
les éthiques de la vertu → la construction de soi par des actions, auto-éducatives, en lien avec un système de valeurs, personnel et évolutif
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❸ pour lequel il existe des méthodes
le soin de soi et l'attribution d'importance (Harry Frankfurt)
une méta-attitude : comprendre l'importance de choisir en conscience ce dont on se soucie, et prendre soin de ce qui est important, selon soi (The importance of what we care about)
= résister à la transparence morale – applicable à celle de l'air
la reconstruction de collectifs collaboratifs (Elinor Ostrom)
un nouveau type d'institutions, collaboratives, bottom-up, gérant les biens communs
articulées avec les institutions d'État mais n'émanant pas d'elles
inspiration : les nouvelles valeurs du numériquele collaboratif, le global, les micro-actions conscientisées et constructives
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❸ pour lequel il existe des méthodes
une refondation du politique par le bas, par le micropolitique
conscientiser et modifier ses modes de transport, d'alimentation, de consommation, ...
= les comportements individuels et collectifs
à partir de ce qu'on sait déjà (…)
ce qu'on va apprendre ici pendant cette journée, et partout
juste appliquer ses propres valeurs≠ faire des sommets de puissants qui vont en avion dans des hôtels climatisés pour nous demander de baisser le chauffage
≠ se demander pour qui on va bien pouvoir voter pour que les choses changent
≠ se dire que puisque personne ne fait rien cela ne sert à rien que moi je fasse
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❹ bilan
la pollution de l'air...
1) est (aussi) un problème philosophiqued'un nouveau type, caractéristique
au-delà d'un problème technique
2) qui appelle (aussi) une réponse éthiqued'abord personnelle et de l'ordre de la prise de conscience
ensuite dans la construction de collectifs collaboratifs d'un nouveau type (rénovation ou réanimation institutionnelle)
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