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Typologie, processus réflexifs et usages du portfolio numérique 2008, © Philippe-Didier GAUTHIER page : 1 Typologie, processus réflexifs et usages du portfolio numérique 2008 © Philippe - Didier GAUTHIER. Université Catholique de l’Ouest, France Courriel : [email protected] Résumé : Cette étude présente un état des recherches sur les usages du portfolio numérique. Elle s’intéresse en particulier aux pratiques et processus réflexifs relatifs au portfolio de développement personnel et professionnel numérique (ou e-portfolio). Dans un premier temps, nous nous attacherons à rechercher les définitions les plus exhaustives du e- portfolio, au regard des usages qui en sont fait. Cette recherche montre qu’il n’existe encore aujourd’hui pas de définition complète, capable de mettre en évidence la diversité des contextes et des pratiques. Ainsi deux définitions sont retenues, et l’analyse mettra en évidence leur complémentarité. Puis l’étude s’appuie sur la typologie récemment proposée par Josette Layec (2006), qui présente l’avantage d’un certain réalisme au regard de la dynamique des usages. L’exemple du Portfolio Européen des Langues Etrangères illustrera les caractéristiques dominantes des usages du e-portfolio de conception « capitaliste », notamment dans son intentionnalité de traçabilité du patrimoine professionnel tout au long de la vie. Un second exemple de portfolio illustre la conception « existentielle » du portfolio, à travers une démarche d’usage pour la valorisation des ressources et compétences clés par des femmes citoyennes d’Uruguay. Cet exemple présente notamment l’intérêt d’une conscientisation, puis remobilisation des savoirs issus d’apprentissages non formels et informels. Enfin, le troisième exemple -une étude longitudinale- illustrera une conception plus « formative » du e-portfolio, approche bien connue et largement développée en éducation et formation. Ainsi, l’étude interroge les classifications plus anciennes (portfolio d’apprentissage, d’évaluation, de présentation (2000 ?); portfolio adéquationiste, communicationnel, d’orientation (de Rosario, 2005), ou portfolio réflexif (Tartwijk et Driessen (2005)) sur la question de la dynamique des processus d’élaboration d’un e-portfolio. Dans un troisième temps, l’étude propose donc, à partir d’une synthèse de littérature, la description d’un processus de « production » d’un e-portfolio « personnel », en tentant de mettre en évidence le caractère réflexif de chacune des 5 phases : a) phase de contractualisation, b) phase rétrospective et introspective de « bilan de soi », c) phase analytique et de reformulation des ressources, apprentissages et compétences, d) phase projective d’orientation et de construction du projet, e) phase de réalisation, de validation des acquis ou de publication ou diffusion du projet professionnel. Ce processus réflexif nous permet de mettre en évidence le caractère praxéologique d’une démarche de e-portfolio, et sa ressemblance avec un apprentissage biographique selon Alheit et Dausien (2000). La dernière partie de notre étude propose une synthèse critique des recherches sur les avantages et inconvénients des e-portfolios, à travers la littérature scientifique de ces dernières années. Cette analyse met en exergue que les principales critiques portent notamment sur le soutien aux processus réflexifs (accompagnement pédagogique, cognitif), sur les conditions juridiques et sécuritaires liées à l’accessibilité et à la disponibilité, mais surtout sur les facilités et contraintes du support technologique des e-portfolios. Elle étudie enfin l’intérêt et les limites de l’apprentissage réflexif. Elle souligne, par les travaux de Crinon et Guigue (2003) et de Morisse (2006) les difficultés d’une écriture réflexive, ainsi que la rupture de paradigme nécessaire chez l’apprenant (Saint Arnaud, 2001) et le nécessaire changement de pratique d’évaluation (Bucheton, 2003). Au regard de la rareté des études longitudinales, de nombreuses questions (effets à long terme sur l’identité professionnelle numérique, sur la compétence à s’orienter tout au long de la vie, etc.), restent sans réponse, pour ce qui concerne les nombreux usages du e-portfolio pour piloter sa trajectoire professionnelle, son orientation, son insertion, ses transitions professionnelles, tout au long de la vie. Mots clés : e-portfolio, portfolio numérique, portefeuille de compétences, réflexivité, typologie, apprentissage tout au long de la vie.

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Cette étude présente un état des recherches sur les usages du portfolio numérique. Elle s’intéresse en particulier aux pratiques et processus réflexifs relatifs au portfolio de développement personnel et professionnel numérique (ou e-portfolio). Dans un premier temps, nous nous attacherons à rechercher les définitions les plus exhaustives du e- portfolio, au regard des usages qui en sont fait. Cette recherche montre qu’il n’existe encore aujourd’hui pas de définition complète, capable de mettre en évidence la diversité des contextes et des pratiques. Ainsi deux définitions sont retenues, et l’analyse mettra en évidence leur complémentarité. Puis l’étude s’appuie sur la typologie récemment proposée par Josette Layec (2006), qui présente l’avantage d’un certain réalisme au regard de la dynamique des usages. L’exemple du Portfolio Européen des Langues Etrangères illustrera les caractéristiques dominantes des usages du e-portfolio de conception « capitaliste », notamment dans son intentionnalité de traçabilité du patrimoine professionnel tout au long de la vie. Un second exemple de portfolio illustre la conception « existentielle » du portfolio, à travers une démarche d’usage pour la valorisation des ressources et compétences clés par des femmes citoyennes d’Uruguay. Cet exemple présente notamment l’intérêt d’une conscientisation, puis remobilisation des savoirs issus d’apprentissages non formels et informels. Enfin, le troisième exemple -une étude longitudinale- illustrera une conception plus « formative » du e-portfolio, approche bien connue et largement développée en éducation et formation. Ainsi, l’étude interroge les classifications plus anciennes (portfolio d’apprentissage, d’évaluation, de présentation (2000 ?); portfolio adéquationiste, communicationnel, d’orientation (de Rosario, 2005), ou portfolio réflexif (Tartwijk et Driessen (2005)) sur la question de la dynamique des processus d’élaboration d’un e-portfolio. Dans un troisième temps, l’étude propose donc, à partir d’une synthèse de littérature, la description d’un processus de « production » d’un e-portfolio « personnel », en tentant de mettre en évidence le caractère réflexif de chacune des 5 phases : a) phase de contractualisation, b) phase rétrospective et introspective de « bilan de soi », c) phase analytique et de reformulation des ressources, apprentissages et compétences, d) phase projective d’orientation et de construction du projet, e) phase de réalisation, de validation des acquis ou de publication ou diffusion du projet professionnel. Ce processus réflexif nous permet de mettre en évidence le caractère praxéologique d’une démarche de e-portfolio, et sa ressemblance avec un apprentissage biographique selon Alheit et Dausien (2000). La dernière partie de notre étude propose une synthèse critique des recherches sur les avantages et inconvénients des e-portfolios, à travers la littérature scientifique de ces dernières années. Cette analyse met en exergue que les principales critiques portent notamment sur le soutien aux processus réflexifs (accompagnement pédagogique, cognitif), sur les conditions juridiques et sécuritaires liées à l’accessibilité et à la disponibilité, mais surtout sur les facilités et contraintes du support technologique des e-portfolios. Elle étudie enfin l’intérêt et les limites de l’apprentissage réflexif. Elle souligne, par les travaux de Crinon et Guigue (2003) et de Morisse (2006) les difficultés d’une écriture réflexive, ainsi que la rupture de paradigme nécessaire chez l’apprenant (Saint Arnaud, 2001) et le nécessaire changement de pratique d’évaluation (Bucheton, 2003). Au regard de la rareté des études longitudinales, de nombreuses questions (effets à long terme sur l’identité professionnelle numérique, sur la compétence à s’orienter tout au long de l

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Typologie, processus réflexifs et usages du portfolio numérique

2008, © Philippe-Didier GAUTHIER page : 1

Typologie, processus réflexifs et usages du portfolio numérique 2008 © Philippe - Didier GAUTHIER.

Université Catholique de l’Ouest, France Courriel : [email protected]

Résumé :

Cette étude présente un état des recherches sur les usages du portfolio numérique. Elle s’intéresse en particulier aux pratiques et processus réflexifs relatifs au portfolio de développement personnel et professionnel numérique (ou e-portfolio). Dans un premier temps, nous nous attacherons à rechercher les définitions les plus exhaustives du e-portfolio, au regard des usages qui en sont fait. Cette recherche montre qu’il n’existe encore aujourd’hui pas de définition complète, capable de mettre en évidence la diversité des contextes et des pratiques. Ainsi deux définitions sont retenues, et l’analyse mettra en évidence leur complémentarité. Puis l’étude s’appuie sur la typologie récemment proposée par Josette Layec (2006), qui présente l’avantage d’un certain réalisme au regard de la dynamique des usages. L’exemple du Portfolio Européen des Langues Etrangères illustrera les caractéristiques dominantes des usages du e-portfolio de conception « capitaliste », notamment dans son intentionnalité de traçabilité du patrimoine professionnel tout au long de la vie. Un second exemple de portfolio illustre la conception « existentielle » du portfolio, à travers une démarche d’usage pour la valorisation des ressources et compétences clés par des femmes citoyennes d’Uruguay. Cet exemple présente notamment l’intérêt d’une conscientisation, puis remobilisation des savoirs issus d’apprentissages non formels et informels. Enfin, le troisième exemple -une étude longitudinale- illustrera une conception plus « formative » du e-portfolio, approche bien connue et largement développée en éducation et formation. Ainsi, l’étude interroge les classifications plus anciennes (portfolio d’apprentissage, d’évaluation, de présentation (2000 ?); portfolio adéquationiste, communicationnel, d’orientation (de Rosario, 2005), ou portfolio réflexif (Tartwijk et Driessen (2005)) sur la question de la dynamique des processus d’élaboration d’un e-portfolio. Dans un troisième temps, l’étude propose donc, à partir d’une synthèse de littérature, la description d’un processus de « production » d’un e-portfolio « personnel », en tentant de mettre en évidence le caractère réflexif de chacune des 5 phases : a) phase de contractualisation, b) phase rétrospective et introspective de « bilan de soi », c) phase analytique et de reformulation des ressources, apprentissages et compétences, d) phase projective d’orientation et de construction du projet, e) phase de réalisation, de validation des acquis ou de publication ou diffusion du projet professionnel. Ce processus réflexif nous permet de mettre en évidence le caractère praxéologique d’une démarche de e-portfolio, et sa ressemblance avec un apprentissage biographique selon Alheit et Dausien (2000). La dernière partie de notre étude propose une synthèse critique des recherches sur les avantages et inconvénients des e-portfolios, à travers la littérature scientifique de ces dernières années. Cette analyse met en exergue que les principales critiques portent notamment sur le soutien aux processus réflexifs (accompagnement pédagogique, cognitif), sur les conditions juridiques et sécuritaires liées à l’accessibilité et à la disponibilité, mais surtout sur les facilités et contraintes du support technologique des e-portfolios. Elle étudie enfin l’intérêt et les limites de l’apprentissage réflexif. Elle souligne, par les travaux de Crinon et Guigue (2003) et de Morisse (2006) les difficultés d’une écriture réflexive, ainsi que la rupture de paradigme nécessaire chez l’apprenant (Saint Arnaud, 2001) et le nécessaire changement de pratique d’évaluation (Bucheton, 2003). Au regard de la rareté des études longitudinales, de nombreuses questions (effets à long terme sur l’identité professionnelle numérique, sur la compétence à s’orienter tout au long de la vie, etc.), restent sans réponse, pour ce qui concerne les nombreux usages du e-portfolio pour piloter sa trajectoire professionnelle, son orientation, son insertion, ses transitions professionnelles, tout au long de la vie. Mots clés : e-portfolio, portfolio numérique, portefeuille de compétences, réflexivité, typologie, apprentissage tout au long de la vie.

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Table des matières

1. Le e-portfolio réflexif en question 2

2. Conceptions et usages du e-portfolio 3

2.1 Définir le e-portfolio 3 2.2 Trois conceptions du e-portfolio 3 2.3 Usages du e-portfolio dans une conception capitaliste 4 2.4 Usages du e-portfolio dans une conception existentielle 5 2.5 Usages du e-portfolio dans une conception formative 6 2.6 Dynamique dialogique des trois conceptions du e-portfolio 7

3. Les processus réflexifs de production du e-portfolio 8

3.1 Les processus de production du e-portfolio et leur réflexivité 8 3.2 Réflexivité et approche praxéologique du e-portfolio 9 3.3 Réflexivité et apprentissage biographique, avec le e-portfolio 9

4. Difficultés et soutien à la réflexivité dans les processus de production d’un e-portfolio 10

4.1 Un état des avantages et inconvénients du e-portfolio 11 4.2 Quelques enjeux liés à l’écriture réflexive 12 4.3 Réflexivité, ruptures et changements de paradigmes 13

5. Efficacité des processus réflexifs mis en jeu par un e-portfolio : recherches et limites 13

1. Le e-portfolio réflexif en question Depuis quelques années, l’élaboration d’un portfolio devient une pratique de plus en plus fréquente, tant en formation initiale que durant la vie professionnelle. Il s’agit d’une démarche d’analyse réflexive, accompagnée ou non, dont les fonctions sont de formaliser des apprentissages, capitaliser des réalisations personnelles et des preuves, valoriser un parcours de formation et d’expériences, et « vendre » son portefeuille de compétences au regard d’un projet professionnel défini, sur le marché du travail. La vocation du portfolio est aussi d’être éventuellement publié et consulté par des tiers, à des fins d’insertion ou de mobilité professionnelle interne ou externe à une organisation. Cette publication, sous une forme électronique, le plus souvent sur Internet, en fait un portfolio numérique, encore appelé e-portfolio. L’ensemble de la démarche de production d’un e-portfolio répond à la finalité de « co-naître (naître avec), produire un savoir sur cet enchevêtrement d’évènements et le faire connaître à celui qui écoute, ou lit. C’est enfin se re-connaître en donnant un sens à son parcours singulier » (Layec, 2006, p.113). Cette démarche mobilise un ensemble de processus dont la caractéristique de réflexivité semble jouer un rôle déterminant dans les apprentissages, l’orientation, la capitalisation, et finalement dans la construction d’une identité professionnelle. Cette réflexivité permet au portfolio de connaître diverses situations d’applications pertinentes. Il peut s’agir du prolongement d’un bilan de compétences, d’un projet de Validation des Acquis de l’Expérience (VAE), d’un outil de gestion interne des compétences, d’un support à la préparation d’une transition professionnelle, et cela sans limite de durée, tout au long de la vie. Au-delà des modes, des injonctions politiques (Portfolio Europass pour la Communauté Européenne), ou de l’incitation juridique, (Passeport Formation pour l’employabilité, Accord National Interprofessionnel de 2003 en France), le portfolio constitue pour Jacques Aubret (en préface de l’ouvrage de Layec, 2006) une « riposte » stratégique à toutes les formes de dépendances engendrées par la vie au travail :

«La quête identitaire et le sentiment d’appartenance communautaire marquent le début d’une ère nouvelle dans les rapports interhumains (…) – Se reconnaître pour se faire reconnaître –

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et, dans cette logique, il ne peut laisser à autrui le soin d’être la seule référence en matière de jugement sur sa valeur personnelle et professionnelle » (p.9).

En s’appuyant sur les recherches déjà menées sur les usages du e-portfolio, la présente étude appréhende les processus réflexifs mis en jeu, et tente de trouver quelques repères sur les conditions et les facteurs qui contribuent à soutenir la réflexivité dans les processus de réalisation de e-portfolio.

2. Conceptions et usages du e-portfolio Il existe de multiples définitions du portfolio numérique. Celles que nous sélectionnons ici prennent en compte le parcours de la personne adulte, dans ses expériences et apprentissages tout au long de la vie. Nous illustrerons ensuite par des exemples issus de pratiques ou de recherches récentes, trois conceptions différentes de e-portfolio.

2.1 Définir le e-portfolio

Notre définition principale est inspirée par le consortium Europortfolio proposée dès 2003, et disponible en ligne en anglais sur le site de l’organisation. Cette définition est reprise au Québec par Cloutier, Fortier et Slade (2006) : un e-portfolio est « une collection d’informations numériques décrivant et illustrant l’apprentissage ou la carrière d’une personne, son expérience et ses réussites. Un e-portfolio est un espace privé et son propriétaire a le contrôle complet de qui y a accès, comment et quand. Le contenu des e-portfolio et les services associés peuvent être partagés avec d’autres pour :

- accompagner les validations des acquis de l’expérience; - compléter ou remplacer des examens; - réfléchir sur son apprentissage ou sa carrière; - accompagner le développement professionnel continu, la planification de l’apprentissage ou la recherche de travail.

Cette définition pourrait être complétée par celle de Rosario (2005), qui s’appuie sur un projet pilote du CNAM de 2004. Elle en renforce le caractère technologique et surtout, elle souligne ses dimensions pérennes et durables, absentes de la plupart des autres conceptualisations :

« Le e-portfolio d’apprentissage tout au long de la vie est un outil unique, qui s’appuie sur une base de données personnelles, un espace collectif de publication sélective, une méthode unique d’analyse des situations professionnelles et une méthode générique, d’apprentissage, et une technologie interopérable. Il est multiculturel, transnational, et utilisable tout au long de la vie »(p.2).

Ces définitions dépassent largement les acceptions les plus connues et devenues classiques de portfolios « d’évaluation », de « présentation », de « développement », rappelées par les auteurs Driessen et Tartwijk (2005), qui ont également introduit une définition mixte, sous le nom de « portfolio de pratique réflexive ».

2.2 Trois conceptions du e-portfolio

D’autres auteurs ont proposé des typologies d’usage des e-portfolios. Nous avons retenu l’approche élaborée par Layec (2006). Il présente l’avantage d’être le fruit d’une longue pratique auprès d’adultes dans de multiples situations (formation, transitions, gestion des compétences…). D’autre part, il synthétise trois finalités d’usage du e-portfolio combinables entre-elles. Enfin, nous retrouvons dans cette approche la prise en compte des temporalités nécessaires aux approches réflexives, qu’il s’agisse des espaces- temps intermédiaires de la vie professionnelle (Leray, 2002), des phases de la vie (Riverin – Simard, 1984) ou des transformations de la vie adulte à l’ère postmoderne (Boutinet, 1999). Nous reprenons ci-dessous la typologie de Layec, et proposons de la compléter. Nos compléments apparaissent sous la forme de mentions entre parenthèses et en italiques dans le tableau ci-dessous.

Finalité : Capitaliste Existentielle Formative Objectif Faciliter les transactions avec

l’environnement professionnel Faciliter les transitions professionnelles et

Faciliter les transférabilités dans le domaine professionnel

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Finalité : Capitaliste Existentielle Formative personnelles

Effet principal recherché

Effet de thésaurisation (des ressources perso.)

Effet d’émancipation (identitaire)

Effet d’appropriation (des compétences)

Intentionnalité Traçabilité du patrimoine professionnel

Production de soi Construction de savoirs

Potentiel développé

Capacité de mémorisation et d’auto positionnement

Capacité d’autoformation et d’autoorientation

Capacité d’autoorientation et d’autoévaluation

Appellation la plus commune

Portefeuille, Passeport Formation, Europass

(Portfolio.) Portfolio de compétences.

Portfolio des apprentissages

Supports prévus

Outils préformatés, référentiels d’emploi, de compétences et d’activités. Référentiels de formation. (Outils de bilans de compétences, plates-formes de e-portfolio, outils de GEPC,)

Démarche accompagnée, supports à produire, Outils méthodologiques. Grilles d’analyses biographiques, Blasons, etc…(Outils de bilans de compétences, Sites personnels, blogs, e-portfolio, etc..)

Démarche guidée (dispositif pédagogique). Référentiels de compétences, d’activités et de formation. (Dossiers de VAE, plates-formes de e-formation).

Sources Commission européenne, Branches professionnelles, (Législation, Normes de management qualité, environnement, développement durable, etc..)

Courant des Histoires de vie, Derosches (1991) et Pineau (1983).

Pratiques réflexives (Schön) (et courant de l’autoformation, puis posture d’apprenance (Carré, 1992, 2005)).

Publics Cibles Adultes en activité (ou en transitions professionnnelles)

Adultes en activités ou non (ou en transitions professionnelles)

Jeunes scolarisés. Adultes en activité ou non. (Tous les publics d’apprenants, y compris universitaires et formation continue)

Lieu de mise en œuvre

Entreprises et lieux de formation

Centre de bilan, lieux ressources

Dans certains organismes de formation initiale et continue. (Ecoles, du primaire au doctorat, en formation initiale ou continue)

Utilisation privilégiée

Préparation des entretiens professionnels et de sélection (et recrutement)

Préparation et gestion des changements professionnels et personnels

Préparation et gestion de ses processus de formation, des dossiers de VAE.

Période de mise en oeuvre

Tout au long de la vie professionnelle

Tout au long de la vie Tout au long de la vie scolaire et professionnelle.

Figure 1 : Trois conceptions du e-portfolio (d’après Layec, 2006, p.69)

2.3 Usages du e-portfolio dans une conception capitaliste

La conception capitaliste du e-portfolio, comparable dans cette approche, à un book d’artiste, s’intéresse essentiellement à la thésaurisation de traces, preuves et résultats attestant des réalisations de la personne, dans un enjeu de traçabilité du capital expérientiel de la personne. Ces ressources, qui peuvent être multimédia, « remplissent une fonction attestative, et sont opposables dans toutes les situations de transactions » (Layec, 2006, p.61); entretiens professionnels annuels, dossiers de VAE, validation des acquis professionnels, entretiens de recrutements, démonstration de compétences). En Europe, le Portfolio Européen des Langues Etrangères a fait l’objet de nombreuses expérimentations dans de multiples pays (France, Italie, Finlande, Hongrie, Allemagne…). Dans une conception capitaliste mais non exclusivement, ce portfolio se base sur le cadre européen commun de référence pour les langues, élaboré par le Conseil de l’Europe. Il est composé :

a) d’un passeport de langues, faisant un état des lieux des connaissances linguistiques et les expériences interculturelles; il est basé sur une autoévaluation à partir d’une grille d’aptitude;

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b) d’une biographie langagière ou linguistique, qui permet d’exprimer son niveau de pratique et d’expérience des langues étrangères; c) d’un dossier capitalisant les travaux personnels relatifs aux apprentissages ou à la pratique des langues étrangères.

Les objectifs généraux de ce portfolio sont de : a) favoriser la mobilité en Europe, en renseignant sur les qualifications linguistiques d’une manière transparente et comparable au niveau international; b) encourager à étudier les langues étrangères; c) souligner la valeur du plurilinguisme et le pluriculturalisme et contribuer ainsi à améliorer la compréhension réciproque en Europe; d) favoriser l’apprentissage autonome et la capacité de s’auto évaluer.

Ce portfolio, dont la forme est standardisée, est doté d’une fonction attestative, (mais aussi formative) notamment pour la certification de compétences complexes (Weiss, 2000). Cette fonction attestative est définie par Aubret et Gilbert (1994) comme :

« Une démarche caractérisée par un double processus d’analyse et de synthèse des expériences personnelles, sociales et professionnelles, en vue de faire émerger les compétences qu’elles ont engendrées, de coder ces compétences dans un langage qui permet d’en mémoriser les contenus pour soi, pour autrui, et de rechercher les « preuves » qui peuvent attester de leur réalité pour autrui dans la négociation sociale » (p.116).

Pour Weiss, ce Portfolio attestant de ses compétences linguistiques, est expérimenté par des dizaines de milliers d’européens, et ses usages sont :

a) pour l’individu, favoriser la planification de sa formation linguistique et constituer un dossier personnel de ses propres compétences linguistiques; b) pour les institutions de formation, améliorer et diversifier la programmation des offres de cours dans la perspective de certifications graduées des compétences; c) pour les employeurs, fournir un instrument de référence fiable pour l’identification de compétences variées et adaptées aux besoins de l’activité professionnelle.

Cependant, concernant ces usages par les employeurs, Banon-Shirman et Makardidjian, de l’Université de Fribourg, soulignent « qu’il est encore trop tôt pour se prononcer sur l’impact auprès des employeurs, des entreprises et des services susceptibles de faire appel au Portfolio lors de l’entretien d’embauche ou de propositions de stages ». Ce portfolio permettra à l’employeur de poser un regard plus complexe et juste sur les connaissances linguistiques et interculturelles d’un candidat (2004, p.5).

2.4 Usages du e-portfolio dans une conception existentielle

Élaborée par Ginette Robin au début des années 1980 et actualisée ensuite (Robin, 1992), puis rapporté et développée par Gaston Pineau (1993) sous le nom d’Histoire de vie, cette démarche est cousine de celle des autobiographies raisonnées proposée par Henri Desroche (1990). Généralement accompagnée et peu instrumentalisée, l’approche existentielle de la création de portfolio vise à re-construire le sens, la signification d’événements, et des savoirs non formels ou informels (Mémorandum de la Commission Européenne, 2000) :

« Dans cette conception, il s’agit de mettre en place les conditions pour que chacun puisse apprendre ce qu’il sait déjà, mais ne sait pas qu’il sait, autrement dit, d’accéder à ses savoirs implicites, voire in-sus, acquis parfois à son insu, pour les transformer en savoirs explicites, mobilisables dans d’autres circonstances, savoirs issus de la vie même et pas seulement de sa vie professionnelle. (Layec, 2006, p.63»

En 2001, Paul Stevens, fondateur du Centre for Worklife Counselling, en Australie, promeut le e-portfolio de carrière, pour supporter les dix actions de pilotage de carrière qui peuvent se présenter à nous : « remanier sa fonction actuelle, enrichir sa fonction, avoir une promotion, réaliser une exploration, évoluer sur une fonction collatérale, rétrogradation, délocalisation, changement de direction, entreprendre ou créer, changer d’employeur » (p.4). Pour faire face à ces changements de plus en plus fréquents et liés aux transformations du monde du travail, l’auteur encourage, à l’aide du portfolio de carrière, « à l’acquisition des compétences à

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la mercatique de soi, à la veille professionnelle pour détecter les opportunités, à la résolution de conflits interpersonnels, au pilotage de sa vie professionnelle » (p.6). Dans une même logique de développement de l’autonomie de l’adulte au travail, mais dans une perspective existentielle très différente, Sarti (2006) présente sa conception du Portfolio of Assets, que l’on pourrait traduire par « Portfolio de ressources et compétences clés ». Celui-ci est mis en place par une organisation humanitaire et citoyenne basée en Uruguay, qui cherche à revaloriser le statut de citoyenneté des femmes, en mettant en valeur leurs compétences et savoirs informels. Le terme d’ « Asset » est défini par Caroline Moser, chercheur en anthropologie sociale, par « ressources mobilisées par un individu pour réduire sa vulnérabilité dans des situations à risques » (cité par Sarti). Cette définition est enrichie par des définitions plus larges, englobant des ressources matérielles et immatérielles, tangibles et intangibles, mobilisées globalement pour améliorer ses conditions de vie, et agir en faveur de ses intérêts propres. Mais pour Sarti, il s’agit pour les femmes citoyennes d’Uruguay de reconnaître leurs « assets », pour mieux les utiliser, à leur avantage, dans toute situation de négociation. Ces ressources sont de nature « économique (capitaux, équipements…), légale (contrats, assurances…), éducative (diplômes, connaissances, compétences, confiance en soi basée sur des savoirs…), politique (formes de pouvoir et d’influence, accès au médias, participation à des organisations civiles, capacité de mobilisation…), sociale (amis et réseaux d’appuis, alliances…), culturelles (langues et pratiques culturelles…) » (Anderson, Rapport de la commission sur l’éducation des adultes, 2006, citée par l’auteur). Sarti précise qu’après plus de 5 ans de ce processus d’éducation non formelle, la combinaison de ces ressources dans le portfolio des femmes s’avère essentielle. Cela a permis à ces femmes d’augmenter leur capacité à agir et à s’organiser, avec une plus grande efficacité, dans la complexité du monde social et institutionnel, et à diminuer ainsi les effets discriminatoires subis auparavant (2006, p.30-36). Cette perspective existentielle dans cet usage du portfolio (ici, sans version numérique) mobilise chez les femmes des apprentissages non formels et informels (Carré, 2003a), des savoirs et des ressources non sus, qui, après conscientisation, deviennent alors mobilisables et combinables. On reconnaîtra dans cette démarche, l’apprentissage d’une posture proactive, (appelée « Apprenance » par Carré, 2003b, 2005) vis à vis des savoirs, des compétences et de leur acquisition, sur une longue durée, et en dehors des structures éducatives.

2.5 Usages du e-portfolio dans une conception formative

Cette approche est basée sur le développement de capacités réflexives à partir de pratiques, qui peuvent être professionnelles (Shön, 1996), mais aussi sur des apprentissages réflexifs (Heyraud-Lemaître, 2002). Pour Bucheton (2003), les principes des dispositifs de portfolio formatifs sont :

- processus de tissage du sens des situations vécues au niveau des connaissances et des savoirs d’actions; - écriture progressive des références temporelles et conceptuelles à partir desquels on comprend ses propres expériences; - construction socialisée des savoirs, puis progressivement de l’identité professionnelle.

Pour Layec (2006), il s’agit de développer des capacités de métacognition, « à analyser son propre fonctionnement intellectuel, à se planifier, s’évaluer, réguler ses propres processus de pensée » (p.67). Ces processus sont réalisés en interactions avec une équipe pédagogique, ou en entreprise avec une équipe de managers, avec une visée de certification (VAE, homologation interne de compétences complexes). Cette forme d’usage du e-portfolio explose actuellement dans l’enseignement supérieur en Grande-Bretagne (Strivens, 2007), et se développe très progressivement dans l’ensemble de l’enseignement supérieur européen (Ecole des Mines de Nantes, Ecole de Commerce d’Amiens, Masters à l’université de Lille, Poitiers, IUFM…) et plus rarement dans la formation continue (Branciard, 2005, 2007; Slade, 2007). Dans son expérience de recherche québécoise (1996-2005), Sauvé (2006) nous présente une longue expérimentation du e-portfolio pour la formation d’adultes au postsecondaire : la mise en place du système SAMI-DPS, pour « système d’aide multimédia interactif de diagnostic, de planification et de suivi d’un projet d’apprentissage à vie sur l’inforoute ». Les objectifs de ce programme de recherche longitudinale sont :

1 – Mettre en place des conditions nécessaires pour favoriser l’apprentissage tout au long de la vie qui tiennent compte des acquis scolaires et expérientiels;

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Typologie, processus réflexifs et usages du portfolio numérique

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2 - Développer des environnements en ligne pour soutenir l’apprentissage tout au long de la vie et dégager leurs apports et leurs contraintes; 3 – Expérimenter et évaluer ces conditions et environnements en ligne auprès de différents groupes d’adultes canadiens en regard des variables suivantes : efficacité du e-portfolio pour améliorer la connaissance de soi en terme de compétences personnelles, professionnelles et d’apprentissage; pertinence (efficacité et efficience) du choix d’un projet de formation par rapport au besoins de formation et au marché du travail; personnalisation de l’apprentissage en ligne, rétention et réussite et persévérance aux études; développement des attitudes et actions face à l’apprentissage tout au long de la vie (p.1).

Après trois campagnes de recherche, le e-portfolio a évolué et il est finalement composé de quatre parties : a) un profil scolaire, b) un profil professionnel (y compris bénévolats, etc), c) un profil d’apprentissage adulte (styles d’apprentissage, stratégies d’apprentissage…), d) un dossier d’apprentissage, qui permet de se construire en ligne un cheminement personnalisé en fonction de besoins ou de compétences à acquérir, à partir d’un « entrepôt virtuel » d’objets d’apprentissages et d’ateliers synchrones de formation. Selon Sauvé, les résultats des recherches montrent :

a) une meilleure connaissance de soi sur le plan des compétences personnelles et professionnelles; b) un taux de satisfaction élevé, par rapport à l’utilité du e-portfolio en regard des apprentissages d’une part et des attentes des employeurs d’autre part; c) une augmentation du niveau d’autonomie des personnes dans sa démarche de formation; d) la confirmation qu’une meilleure connaissance de son profil de compétence et son profil d’apprentissage aura une influence sur le choix du programme de formation; e) il existe des résistances au changement liées aux technologies; f) l’e-portfolio a permis aux adultes (eux-mêmes formateurs) de connaître leurs acquis expérientiels et scolaires, d’identifier leurs capacités d’apprentissage, ainsi que leurs styles d’apprenant; g) la formation associée à l’e-portfolio a sensiblement augmenté leur niveau d’employabilité; h) cette formation, en lien avec le e-portfolio, a augmenté la motivation à l’apprentissage tout au long de la vie, après l’expérimentation (p. 6-8).

Dans cette longue recherche, dont la dernière phase est en cours en 2007, Sauvé met en évidence les apports d’une approche formative du e-portfolio pour préparer les adultes à l’apprentissage tout au long de la vie (Unesco, 2000). Selon Michèle Jean, vice-présidente de la commission canadienne pour l’UNESCO, « L’apprentissage tout au long de la vie permet de renforcer nos compétences et de comprendre notre passé, afin de mieux saisir le présent, et d’être en mesure de participer à la construction de l’avenir » (Déclaration à la semaine internationale des apprenants adultes au Canada, 2002, citée par Louise Sauvé, p.8).

2.6 Dynamique dialogique des trois conceptions du e-portfolio

A l’observation critique de cette classification des e-portfolios, choisie à l’insu de la typologie canadienne (portfolio d’apprentissage, d’évaluation, de présentation) et de la typologie proposée par de Rosario (2005) (Portfolio adéquationiste, communicationnel, d’orientation), nous observons que toutes les démarches de e-portfolio mettent en jeu chez la personne son « rapport au savoir ». Cette conception plus globale du e-portfolio « mixte » est aussi appelée « réflexive » par Tartwijk et Driessen (2005), ou encore « d’apprentissage tout au long de la vie » par de Rosario (2005) ou encore « de développement personnel et professionnel » dans la littérature de la formation professionnelle et continue. Pour Layec (2006), il existe une tripe dynamique dialogique entre ces trois conceptions capitaliste, existentielle et formative des portfolios, c’est-à-dire une tension réciproque entre ces trois pôles qui mettent en œuvre :

- une dynamique de management des compétences et des connaissances (entre finalité capitaliste et finalité existentielle); - une dynamique de transmission des savoirs (tension entre finalité formative et capitaliste); - une dynamique d’auto-orientation (tension entre finalité existentielle et formatives). (p.73-75).

Nous proposons de prolonger le propos de Layec (p.76), autour de cette triple dynamique, qui correspondrait à la mise en jeu de processus réflexifs chez la personne élaborant son e-portfolio; nous nous proposons

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Typologie, processus réflexifs et usages du portfolio numérique

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d’approfondir ici : a) quels sont ces processus réflexifs ? b) quels sont les aspects particuliers de cette réflexivité ?

3. Les processus réflexifs de production du e-portfolio

3.1 Les processus de production du e-portfolio et leur réflexivité

Nous présentons ci-dessous une démarche d’élaboration du e-portfolio, relativement générique, indicative et représentative de différentes approches et usages du portfolio réflexif, inspiré des pratiques et recommandations de Robin (1992), Layec (2006), Pineau (1993), Lainé (2005), Desroche (1990), Gauthier et al. (2006), Desjardins (2002), Mias (2005), Alheit et Dausein (2005), Cloutier et al. (2006) et d’autres praticiens. Nous décrivons cette démarche par différents processus du point de vue de l’apprenant (celui qui réalise le processus e-portfolio pour lui-même, à son profit et dans ses différents usages possibles, et dans une logique d’apprentissage tout au long de la vie), avec un cadre d’accompagnement non précisé. Dans chacune des cinq phases de cette démarche de production d’un eportfolio, nous évoquerons en particulier les activités réflexives : 1) La phase de contractualisation du processus : elle consiste à définir les règles de production ou de co-production dans la démarche, définir ses buts, ses attentes en terme de reconnaissance (personnelle, professionnelle (entretien annuel d’évaluation), académique (validation des acquis de l’expérience)), son champ d’autonomie et ses libertés de choix, ses modalités de travail, les règles de propriété morale et intellectuelle, de confidentialité, de déontologie, et les usages envisagés du e-portfolio, éventuellement les outils et supports de réalisation (plates-formes), et s’il y a lieu, les données budgétaires et les rôles des prestataires. Pour l’apprenant, la contractualisation est en soi une réflexion sur le pourquoi et sur le comment de cette démarche. 2) La phase introspective de « bilan de soi »: il s’agit pour l’apprenant de s’engager dans une réflexion sur son parcours, une re-structuration rétrospective de ce parcours, et d’en extraire les éléments vécus significatifs. Cette phase s’appuie généralement sur quelques outils simples, comme le blason, le curriculum vitae, le tableau bioscopique (Desroche, 1990), parfois combiné à un tableau des expériences, des graphiques. Le questionnement personnalisé du parcours de l’apprenant vise à mettre en exergue les évènements ou les phénomènes qui produisent du sens pour soi. Celui-ci produit une synchronisation de l’apprenant avec son cheminement vécu, dans tous les domaines de l’expérience, sur lequel il est invité à poser un regard évaluatif. 3) La phase analytique de « reformulation de ses ressources, apprentissages et compétences ». En s’appuyant sur des grilles d’analyse de compétences, l’apprenant s’engage dans une réflexion sur ses expériences pédagogiques, professionnelles et extra-professionnelles. Elles sont analysées en terme de contextes, activités réalisées, apprentissages réalisés, compétences développées éventuellement au regard de référentiels jugés pertinents. Celles-ci sont formalisées par une écriture réflexive, rigoureuse, et associées à des traces, preuves, ressources démonstratives et autres documents numériques ou non. Cette phase met en jeu un processus de transformation du capital d’expérience en capital « compétences », et un processus d’administration de la preuve (description de l’activité en contexte, résultats et impacts, ressources de démonstration (Gauthier et al., 2006)). Cette phase nécessite aussi une autoévaluation de ses apprentissages, ressources et compétences perçues à travers l’interaction sociale dans chaque expérience, et correspond également à un processus de reconnaissance de son patrimoine expérientiel présent (que d’aucun appelle La malle aux Indes !). 4) la phase projective, d’orientation et de (re)construction du projet professionnel, voire du projet de vie : cette phase comporte une réflexion sur l’accord à établir entre ses aspirations, ses souhaits, ses attentes, ses intentions, ses objectifs et les attentes du monde professionnel, de ses employeurs. Il s’agit en premier lieu du processus d’orientation, puis d’auto-orientation (Layec, 2006), et d’évaluation de son orientation, afin de se définir, au regard des besoins du monde (du travail, ou de son employeur), un cap, une direction, une identité, ainsi qu’une stratégie pour y parvenir. Ce processus aboutit à la formulation explicite d’un projet professionnel. Ce projet est ensuite évalué pour soi, et aussi sur son espace de réalisation, par exemple par une étude du marché du travail, ou par sa direction des ressources humaines, pour reconnaître sa place dans le monde, pour se mettre à l’épreuve d’un futur réalisable.

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5) la phase de réalisation de soi, de son projet professionnel, ou de validation des acquis : elle consiste soit : a) à publier son e-portfolio, instrument d’autopromotion de soi comme professionnel, de promotion de son projet professionnel, qu’il soit en devenir ou déjà accompli; b) à présenter son dossier de validation des acquis auprès d’un organisme certificateur ou d’un employeur; c) à réaliser des actions d’auto-socialisation, prises de contacts, d’échanges et de contributions professionnelles, Parfois présentée comme une activité d’« auto-mercatique », cette phase nécessite la construction d’un e-portfolio répondant à des caractéristiques précises et attendues des certificateurs, recruteurs et employeurs (Gauthier et al., 2006, 2007, étude à paraître). Il s’agit cette fois de (se) mettre en scène, et de le faire savoir aux cibles concernées par son projet. La réalisation de ce projet professionnel sera, on l’espère alors, le produit d’un plan d’action et d’un processus continu d’interaction avec les acteurs sociaux, de recherche d’emploi, de candidatures spontanées classiques et numériques, de participations à des débats en ligne ou en salle. Ces interactions peuvent être de vive voix, ou encore s’effectuer sur l’Internet, ou le plus souvent les deux à la fois. La réflexion ici porte sur l’analyse de ses interactions, avec pour visée de se faire reconnaître dans l’espace social choisi. Il s’agit alors d’évaluer cette reconnaissance, et d’ajuster son projet (et son e-portfolio) à soi, comme aux acteurs socioprofessionnels qui entourent « l’apprenant », ce qui d’une certaine manière, procède de la validation (et/ou invalidation – amélioration) du projet professionnel. La description succincte de cette démarche de production d’un e-portfolio met en évidence le caractère réflexif de ces processus et activités pour l’apprenant, à travers des évaluations, des bilans, des analyses et retours de la pensée sur elle-même, et sur ses différentes temporalités, pour mieux appréhender et maîtriser ses processus. Cette réflexivité dans la démarche de e-portfolio, évoquée par de nombreux auteurs (Paquay et Nieuwenhoven, 2007; Le Squere, 2007; Huver et Girardeau, 2007; Petters et al, 2005; Challis, 2005; Bruillard, 2004; Mias 2003; Bucheton, 2003; Wozney, 2001; Derycke, 2000) est définie ici dans une perspective identitaire, comme « capacité de réflexion sur soi et sur ces actions. C’est un potentiel que le sujet développe et qui fait partie de son identité, et une caractéristique névralgique (…) dans la post-modernité » (Demarais et al., 2003, p.259). Dans le contexte de notre démarche de e-portfolio, nous spécifions ici deux caractéristiques de cette réflexivité : a) elle est produite par une démarche praxéologique, b) elle induit progressivement un apprentissage biographique.

3.2 Réflexivité et approche praxéologique du e-portfolio

Cette réflexivité est mise en jeu dans une démarche praxéologique. Il s’agit d’une approche que Lhotellier (1995) définit comme « une démarche construite (visée, processus, méthode d’autonomisation et de conscientisation de l’agir à tous les niveaux d’interaction sociale, dans son histoire, dans ses pratiques quotidiennes, dans ses processus de changement et dans la mesure de ses conséquences » (p.235). En effet, c’est à travers les activités de production du e-portfolio et de ses processus que le sens de l’action et de l’expérience se construit pour l’apprenant. Pour passer de la pratique à la praxis, c’est-à-dire à l’action sensée, par une « conscientisation heuristique, herméneutique, et critique » (p.238), l’apprenant suit une démarche qui vise « l’unification des actes », la constitution du fil rouge du sens de l’existence, qui sera soumis à l’épreuve des autres. Cette démarche praxéologique d’élaboration du e-portfolio, puis de pilotage de sa navigation professionnelle est « visée, rythme, méthode, processus, opérations… ». Dans l’action, la démarche praxéologique aide l’apprenant à prendre un habitus réflexif, à déterminer son efficacité, et lui permet, en rendant consciente les paramètres de cette action, d’augmenter son « pouvoir d’entreprendre » (p.242), ce que Lainé appelle aussi « autorisation à produire sa vie professionnelle» (2005, p.256).

3.3 Réflexivité et apprentissage biographique, avec le e-portfolio

Les chercheurs allemands Alheit et Dausien (2005) définissent ainsi le concept d’apprentissage tout au long de la vie :

…Non pas comme la démarche d’acquisition et d’appropriation progressive de savoirs ou de compétences ciblées, mais un processus hautement organisé de la perlaboration, de la liaison et de la transformation des processus premiers en une figure biographique d’expériences, c’est-à-dire en quelque chose d’un « ordre second » des processus d’apprentissage (p.51).

Pour les chercheurs, cette démarche d’appropriation comprend, d’après le Mémorandum sur l’éducation et la formation tout au long de la vie, de la Commission européenne (p.8-9) :

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a) Les processus d’apprentissage formels qui ont lieu dans les institutions de formation classiques, et qui sont généralement validés par des certifications socialement reconnues; b) Les processus d’apprentissage non formels qui se déroulent habituellement en dehors des établissements de formation institutionnalisés, sur le lieu de travail, dans les organismes et les associations, au sein d’activités sociales, dans la poursuite d’intérêts sportifs ou artistiques; c) Les processus d’apprentissage informels, qui ne sont pas entrepris intentionnellement et qui accompagnent incidemment la vie quotidienne; d) La dimension du « lifewide learning », éducation, apprentissage au travers de la vie, embrassant tous les aspects de la vie, met l’accent sur la complémentarité entre apprentissages formels, non formels, informels.

Nous avons vu dans les quelques exemples précédents que la mise en œuvre du e-portfolio permet de mobiliser ces quatre formes d’apprentissage, qui deviennent actives tout au long de la vie. Alheit et Dausien (2000) mettent en évidence qu’un processus de réflexivité biographique se met en place autour de ces formes d’apprentissage, et le définissent comme un processus global de construction de soi :

La capacité (autopoiétique, p.77) du sujet à perlaborer l’expérience vécue (formelle, non-formelle ou informelle, en tant que contexte d’apprentissage), incluant la possibilité d’élaboration de nouvelles structures d’expériences culturelles et sociales, et à se donner une cohérence personnelle, une identité, à attribuer un sens à l’histoire de sa vie (p.77).

Quatre volets sont utilisés pour conceptualiser ce que ces auteurs appellent l’apprentissage biographique, « c’est-à-dire les processus et les cadres de représentations dans lesquels les individus interprètent leurs expériences et produisent leur propre sens biographique » :

(a) L’apprentissage curriculaire constitue une armature pour les apprentissages formels ; (b) Les nouvelles voies de formation (politiques de formation des années 70 à 90) ont créé de nouveaux modèles de parcours biographiques. Ces nouvelles voies sont confrontées aux temporalités propres de la vie, qui fait apparaître (chez les adultes notamment) des besoins de réflexivité autour de ses déficits de formation, de ses aspirations de formation, de ses reconstructions, de (re) mise en projet de la vie personnelle ; (c) La formation comme processus biographique, ou l’apprentissage (formel, non formel et informel) et toujours lié au contexte d’une biographie concrète. L’individu peut mobiliser une réserve de savoirs biographiques, issue d’apprentissage implicite, qui constitue un savoir pré-reflexif, qui s’est également développé dans un contexte social (apprentissage expérientiel, environnements d’apprentissages). Mais l’apprentissage auto-directif « est un modèle de l’apprenant autonome qui à la maîtrise réflexive et stratégique de son propre processus de formation, mais qui ne prend pas en compte la stratification complexe de la réflexivité biographique. Les processus de formation biographique ont leur propre principe de détermination, ils rendent possibles des expériences inattendues et des transformations surprenantes… » (d) La biographicité des expériences sociales est aussi la capacité à développer ses capacités de communication, de relations sociales, … et fait de la formation un lieu de gestion individuelle de l’identité mais aussi de processus collectifs et de rapports sociaux (p. 57-83).

L’apprentissage biographique est une combinaison des quatre processus d’apprentissage (formel, informels, non formels et au travers de la vie), il appelle un processus réflexif d’un « ordre second » et qui prend en compte la « stratification complexe de la réflexivité biographique » (p. 77) dans le cadre des parcours de vie, de la contextualité sociale et économique, et de la réflexivité des apprenants telle qu’elle se joue dans le processus de production du e-portfolio. Cependant, certains praticiens-chercheurs des démarches autobiographiques mettent en évidence des difficultés et des obstacles à cette réflexivité (Orland, 2005; Saint-Arnault, 2001), dans l’approche praxéologique, dans les ruptures de paradigmes, dans les rapports au savoir et à la technologie pour les apprenants (Sauvé, 2006).

4. Difficultés et soutien à la réflexivité dans les processus de production d’un e-portfolio Nombres de publications sur les expérimentations et mise en œuvre de portfolios numériques, en contexte de formation d’adultes ou d’enseignement supérieur, restent discrètes, voire silencieuses, sur les difficultés

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rencontrées par les apprenants. Une revue de cette littérature ne permet pas la réalisation d’un état des lieux significatif. Par ailleurs, ces difficultés dépendent du contexte, des publics, des spécificités des dispositifs qui peuvent anticiper et surmonter ces difficultés, en les rendant moins visibles. Après une courte revue des principaux avantages et inconvénients du portfolio numérique, tels que mentionnés dans la littérature scientifique, nous nous pencherons sur quelques difficultés liées à la réflexivité mise en jeu dans les processus d’élaboration du e-portfolio.

4.1 Un état des avantages et inconvénients du e-portfolio

Le tableau ci-dessous présente les points d’intérêt et de vigilance liés à la mise en œuvre d’un portfolio numérique, établi à partir d’une revue des articles et documents scientifiques et critiques de ces cinq dernières années. Ce sont des points de vue qu’il faut nécessairement relativiser dans une situation donnée.

Avantages et intérêts du e-portfolio Inconvénients et limites du e-portfolio

Soutien aux processus réflexifs :

Capitalisation de ressources et preuves quasi illimitée, en temps, en volume, pour tous les documents numériques et multimédia (Cloutier, 2006). Gain de place énorme par rapport à une capitalisation papier. Conservation illimitée de toute ressource biographique, note, contact, information, pour l’apprentissage tout au long de la vie (Cloutier et al., 2006; Abrami et Barrett, 2005).

Interactivité possible à distance, synchrone ou asynchrone, avec l’accompagnateur ou le dispositif pédagogique ou de tutorat, ou d’évaluation (Cloutier et al, 2006), et multiplication des possibilités de rétroaction de la part des mentors, tuteurs (Challis, 2005).

Intégration de référentiels, systèmes d’aides et supports pédagogiques associés (Cloutier et al, 2006; Keypal, 2006; Sauvé, 2006).

Support à l’apprentissage organisationnel (Cloutier et al, 2006), pour les e-portfolio collectifs, et les communautés de travail.

Soutien aux processus réflexifs :

Les fonctions de support à la réflexivité doivent être modélisées à l’avance, implémentées et adaptées, interfacées en fonction des attentes des utilisateurs (Challis, 2005, Fiedler, 2004, d’après de nombreux travaux).

Apprentissage spécifique de l’écriture multimédia (s’exprimer ou démontrer par le son, la vidéo, etc..) (Keypal, 2006)

Support technologique :

Le e-portfolio peut être formalisé numériquement en utilisant des outils de bureautique courante, comme sur des plates-formes spécialisées au standard du Web.

Le e-portfolio peut-être associé à un blog professionnel, à des espaces relationnels et communautaires, de partage de savoirs (Cloutier et al, 2006, Keypal, 2006).

Support technologique :

L’accessibilité, la disponibilité du e-portfolio doivent être garantis (Cloutier et al, 2006).

Ouverture, centralisation et mobilité des données personnelles à définir et à garantir (Cloutier et al, 2006)

Dépendance à la technologie : interopérabilité (Cloutier et al, 2006; Fiedler, 2004, ePortConsortium, 2003) non garantie à ce jour, malgré les efforts des éditeurs et les collaborations normatives (IMS, EPICC, ePortConsortium). Robustesse et fiabilité à garantir (Cloutier et al, 2006)

Nécessité d’un apprentissage de l’environnement numérique du e-portfolio, et de sa réappropriation, et d’une compétence informatique et Internet.

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Avantages et intérêts du e-portfolio Inconvénients et limites du e-portfolio (Préoccupations d’exclusions sociale, Cloutier, 2006)

Intégration de systèmes existants (Cloutier, 2006, Fiedler, 2004) comme les plates-formes de télé-formation, ou systèmes de recrutements.

Accessibilité et disponibilité :

Selon les paramétrages ou les technologies, le e-portfolio pourra être mis à jour de n’importe quelle partie du monde, à n’importe quel moment, et visité soit par des personnes ciblées, soit ouvert au public (Cloutier et al, 2006; Challis, 2005).

Plurilinguisme facilité, si supporté par la plate-forme (Keypal, 2006).

Droit, confidentialité et protection des données privées :

Des systèmes et protocoles de sécurité doivent garantir la protection des données personnelles (Cloutier et al., 2006), l’absence de piratage d’oeuvres et le droit de rectification ou suppression des informations personnelles, et les conditions d’accès au e-Portfolio (Cloutier et al, 2006)

Certification des données et garantie d’authenticité (Fiedler, 2004)

Figure 2 : Avantages et inconvénients des usages des portfolios numériques.

Comme le montre ce tableau, les avantages et inconvénients à l’usage du e-portfolio sont liés en grande partie aux contextes d’usage, aux possibilités et contraintes des technologies de l’information et de la communication, et notamment aux apprentissages que leur introduction suscitent, comme l’a montré la sociologue de Saint Laurent-Kogan (2007).

4.2 Quelques enjeux liés à l’écriture réflexive

Pour Bruillard (2004) ce n’est pas l’écriture d’un e-portfolio qui est centrale, mais le dispositif dans lequel cette écriture est insérée. Bucheton (2003) souligne que l’un des postulats du e-portfolio est « que l’écriture singulière peut jouer un rôle de mise à distance de l’expérience » (p.3). Cette écriture oblige l’apprenant à s’impliquer, à construire des habitudes d’écriture de travail, et à assumer un point de vue personnel. L’efficacité de cette écriture réflexive a été démontrée par Peters et al. (2005), notamment par l’utilisation de cartes conceptuelles, dans un dispositif soutenant la réflexivité des apprenants. Toutefois, nous n’avons pas trouvé de recherches spécifiques portant sur l’efficacité ou les difficultés de l’écriture multimédia réflexive, dans le cadre d’usage des e-portfolios. Pour Crinon et Guigue (2003), l’écriture réflexive sur l’expérience pose le postulat suivant : « Le passage par l’écrit est formateur. Écrire peut aider à analyser les situations d’apprentissage – enseignement » (p.168). Mais les auteurs spécifient que le « passage par l’écrit n’est pourtant pas une garantie que seront atteints des objectifs de construction de connaissances sur la pratique et de développement d’un rapport réflexif à l’exercice du métier » (p.169). En cause : une écriture de transcription, prise comme réponse formelle à une demande institutionnelle, et adoptée par des apprenants non impliqués. Pour les auteurs, l’écriture réflexive au contraire génère des stratégies d’écritures et de réécritures (modulaires ou évolutives, récursives), des réemplois différenciés de concepts, des autorisations à écrire « je », une réappropriation des pratiques professionnelles et des approches théoriques. Pour Morisse (2006), les difficultés de l’écriture réflexive reposent notamment sur la résistance au réfléchissement, « au dire le faire » (p.218), en raison du caractère fugace et singulier des situations professionnelles, et de la « prise de risque de se donner à voir et à lire, comme professionnel et membre d’une communauté discursive » (p.219). À cette résistance s’ajoute des difficultés de prises de postures appropriées pour produire un discours sur sa pratique, comme le confirment Hensler, Garant, Dumoulin, Paquay et Sirota.(2001), soulignant la nécessité d’un cadre de soutien à la réflexivité dans les dispositifs de formation. Si l’on se réfère à Morisse (p. 225-226), un dispositif d’accompagnement et de soutien à la réflexivité comprend notamment :

a) un support au dépassement des résistances au réfléchissement et à la prise de risques; b) une aide à la prise de conscience et aux activités d’auto-analyse pour développer les compétences réflexives; c) un support aux savoirs méthodologiques et

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théoriques, et aux activités langagières et discursives; d) des régulations de postures et aux raisonnements heuristiques de l’écriture réflexive.

Si Morisse souligne ainsi l’importance de l’accompagnement des apprenants dans un travail d’écriture réflexive, d’autres auteurs rendent compte des difficultés cognitives inhérentes aux changements de paradigmes liés aux processus mis en jeu dans les activités réflexives, comme celles qui sont mobilisées par le e-portfolio.

4.3 Réflexivité, ruptures et changements de paradigmes

La mise en œuvre d’une démarche réflexive dans les processus e-portfolio se réalise, comme nous l’avons évoqué plus haut, selon une approche praxéologique. Selon une recherche de Saint-Arnaud (2001), cette réflexivité, si elle est mobilisée dans l’action (ici l’écriture réflexive), provoque des difficultés de passage à l’action, pour nommer ses intentions et s’autoréguler dans l’action. Ces difficultés s’expliquent selon l’auteur par un conflit entre deux paradigmes. L’apprenant « qui agit selon le paradigme de l’expertise tente de réduire l’incertitude reliée aux particularités de la situation, à l’aide du savoir homologué ». Par contre, l’apprenant « qui agit selon le paradigme de l’incertitude, utilise les particularités de la situation pour s’autoréguler dans l’action » (p.17). Pour Perrenoud (2000), « quelques conditions peuvent permettre au travail réflexif sur l’habitus de dépasser le sens commun : a) une culture théorique minimale en sciences cognitives et anthropologie des pratiques; b) une intention commune et délibérée de travailler à ce niveau; c) une application à décrire l’action plutôt qu’à en chercher immédiatement les mobiles; d) une éthique sans faille et une grande clarté conceptuelle » (p.155). Lorsque le e-portfolio est utilisé dans un cadre académique, il nécessite également une rupture dans les pratiques de l’évaluation certificative. « La pratique du portfolio, comme instrument d’évaluation parmi d’autres, permet que cette parole du stagiaire sur des objets réels de sa formation soit entendue, que sa compétence réflexive soit objet d’évaluation » (Bucheton, 2003). Dans le cadre des épreuves liées aux transitions professionnelles, Pineau (2005) évoque la transition paradigmatique que nécessite l’auto orientation tout au long de la vie. Celle-ci mobilise l’apprenant dans un apprentissage majeur à réaliser, celui de la triangulation, « vue comme une opération de croisement de sources de données et de niveaux de réalité que chaque vie conjugue, dans un réseau de triangles possibles » (p.16). Cette transformation de la pensée est également convoquée par Molinié (2002), confirmant que la conscientisation de son histoire ne suffit pas à acquérir une capacité d’intervention sur sa vie. « Il (le sujet) lui faudra effectuer une véritable mutation de la pensée avant de pouvoir dégager des possibilités de se penser autrement. C’est cette mutation de la pensée que vise la réflexivité socio analytique » (p.362). Ces ruptures de paradigmes inhérentes aux processus réflexifs d’élaboration du e-portfolio à des fins de capitalisation, de formation, ou existentielles, nécessitent des accompagnements appropriés, afin d’aider l’apprenant à en surmonter les difficultés.

5. Efficacité des processus réflexifs mis en jeu par un e-portfolio : recherches et limites L’efficacité des processus réflexifs mis en jeu dans l’élaboration des e-portfolio est confirmée par quelques recherches. Celles-ci sont toutefois liées à des contextes spécifiques, et ne peuvent permettre une généralisation. Le corollaire de ce constat est que les processus de soutien et d’accompagnement à cette réflexivité n’ont pas fait l’objet de suffisamment d’études pour permettre d’en dégager une modélisation générique. Les résultats des recherches récentes en Europe et Amérique du Nord confirment l’intérêt de ces processus réflexifs. Paquay et al. (2007) montrent que le portfolio constitue une opportunité de développement des compétences, tout particulièrement « la capacité à analyser de façon critique les pratiques professionnelles, et à les lire en référence à des outils et des cadres théoriques » (p.464). Un résultat que confirme Sauvé (2006), et Milman et al. (2005, p.51-65) : « Les processus concernés par la création de portfolio numérique ont favorisé un réel perfectionnement professionnel, et constituent un élément déclencheur pour leur perfectionnement professionnel continu ». Cependant, les recherches à ce sujet présentent bien des limites. Tout d’abord, elles ne concernent généralement que des publics d’enseignants ou de formateurs, en formation initiale, continue ou en reprise d’étude. Qu’en est-il des cadres et techniciens de l’industrie, de l’agriculture, des services ? D’autre part, en

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Europe (Paquay et al. 2007), en Australie (Challis, 2005), en Amérique du Nord (Abrami et Barrett, 2005), les chercheurs soulignent de nombreuses questions qui rentent en suspend. En quoi les portfolios contribuent-ils, en détail, à la construction des compétences et de l’identité professionnelle ? Comment s’articule l’évaluation formative et l’évaluation certificative, avec l’appui d’un portfolio numérique ? Comment cette forme d’apprentissage réflexif impacte-t-elle les pratiques professionnelles, individuelles et collectives ? Par quelles opérations cognitives et conatives se développe progressivement l’apprentissage biographique, la compétence à s’auto orienter, à s’auto socialiser, à s’auto diriger dans sa navigation professionnelle ? À ces questions relatives aux processus réflexifs eux-mêmes s’ajoutent les questions relatives aux processus de soutien à cette réflexivité. Peut-on modéliser ce processus, structurer à priori ces accompagnements et télé accompagnements (Goullier, 2007), en déterminer les invariants, les variables, les caractéristiques et les pratiques, selon les contextes, les usages, les publics ?

Références

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2008 © Philippe - Didier GAUTHIER.

Université Catholique de l’Ouest, France Courriel : [email protected]