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Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques Par Lionel Maurel MESHS – Lille/Nor de France Le droit d’auteur dans un environnement numérique / Petits -déjeuners valorisation

Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

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Page 1: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Le statut des données

de la recherche : entre droit des bases de

données et données

publiques

Par Lionel Maurel

MESHS – Lille/Nor de France

Le droit d’auteur dans un environnement

numérique / Petits -déjeuners valorisation

Page 2: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

A l’origine : « Information Wants to Be Free »

(Stewart Brand – 1984)Im

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Les informations sont longtemps restées en dehors du champ de la propriété intellectuelle.

Page 3: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

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C. L'UNESCO soutient fortement l'accès au domaine public informationnel ou

"indivis mondial de l'information". Ce domaine public informationnel est

constitué par l'information publiquement accessible, dont l'utilisation ne porte

atteinte à aucun droit légal, ne viole aucun autre droit communautaire (par

exemple les droits des populations autochtones) ou n'enfreint aucune

obligation de confidentialité.

Le domaine public informationnel englobe donc l'ensemble des oeuvres ou

objets de droits apparentés qui peuvent être exploités par quiconque sans

autorisation, par exemple parce que la protection n'est pas assurée en vertu du

droit national ou international, en raison de l'expiration du délai de protection,

ou à cause de l'absence d'un instrument international assurant la protection

dans le cas des oeuvres ou objets de droits apparentés étrangers.

Le domaine public de l’information de l’UNESCO (2011) (2011)

L’information conçue comme un « patrimoine commun » ou un bien public « pur ».

Page 4: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Les idées, les faits, les données restent « de libre parcours »

Une condition fondamentale pour la liberté de la recherche

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Page 5: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

L’extraction des informations d’un livre…

… est un acte fondamentalement libre, lié à la

« liberté de lire » elle-même.

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Page 6: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Mais avec le numérique, tout change…

Projet Text2Genome : 3 ans de négociations complexes pour pouvoir

constituer un corpus de 3 millions d’articles.

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Page 7: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Depuis les années 90, les données sont peu à peu

saisies par le droit…

Directive 96/9/CE sur la protection juridique des bases de données du 11 mars 1996,

transposée en France par la loi du 1er juillet 1998 => Livre III, titre IV du Code de la

Propriété Intellectuelle

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Page 8: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Plan de l’intervention

I) Définition légale de la base de données

II) Incorporation d’éléments dans une base

III) Protection de la structure d’une base par le droit d’auteur

IV) Protection du contenu d’une base par le droit sui generis

V) Le nouvel enjeu du Text et Data Mining

VI) Le statut particulier des données de recherche et l’Open Data

Page 9: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

I) Définition de la base de données

Article L-112-3 CPI :

« On entend par base de

données un recueil d’œuvres,

de données ou d’autres

éléments indépendants,

disposés de manière

systématique ou méthodique,

et individuellement accessibles

par des moyens électroniques

ou par tout autre moyen. »

La loi ne définit pas en revanche la donnée :

« Représentation d’une information sous une forme conventionnelle

destinée à faciliter son traitement. »Arrêté du 22 décembre 1981 sur l’enrichissement de la langue française

Page 10: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelques exemples de bases de données

– un fichier papier

Cour d’Appel de Paris, 12 septembre 2001 : Peu importe que la base de

données soit sous une forme papier, le support est indifférent.

Page 11: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelques exemples de bases de données

– un fichier produit avec un tableur

Page 12: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelques exemples de bases de données

– un thesaurus

Anne-Laure Stérin : « Une liste alphabétique de mots n’est pas protégée par le droit d’auteur, si

elle constitue une compilation sans originalité. En revanche, une liste de mots présentant une

structure originale peut être protégée par le droit d’auteur. Un thésaurus par exemple, c’est-à-

dire une liste hiérarchisée de termes soigneusement sélectionnés est protégeable ».

Page 13: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelques exemples de bases de données

– une bibliothèque numérique

Conditions générales d’utilisation : « Gallica constitue une base de

données, dont la BnF est producteur, protégée au sens des articles L341-

1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. »

Page 14: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelques exemples de bases de données

– un entrepôt d’archives ouvertes

Page 15: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelques exemples de bases de données

– un site internet

Mais la protection par le droit des bases de données n’est pas

automatique et le site doit répondre à un certain nombres de critères

(voir Cour d’Appel de Paris, 20 mars 2015).

Page 16: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelques exemples de bases de données

– une application mobile

Voir Murielle Cahen, La protection juridique d’une application mobile.

Page 17: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Trois « couches » différentes de protection

Protection par le droit d’auteur

Protection par le droit sui generis

Protection des éléments

Image par Sametcaliskan. CC-BY

Tryptique : structure de la base / contenu de la

base / éléments constitutifs du contenu

Page 18: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

II) Incorporation d’éléments dans une base

Directive 96/9/CE :

« La protection des bases de

données par le droit d'auteur

prévue par la présente directive

ne couvre pas leur contenu et

elle est sans préjudice des droits

subsistant sur ledit contenu. »

Les données peuvent être directement générées par le producteur de la base.

Elles peuvent aussi être incorporées à partir de sources extérieures.

Dans ce cas, attention aux droits de propriété intellectuelle et au droit des données personnelles.

Page 19: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Incorporation dans une base d’éléments protégés par

des droits de propriété intellectuelle de tiers

Les questions de droit d’auteur doivent être réglées sur une base contractuelle avec les

différents titulaires de droits (ici, auteurs des articles et éditeurs de la revue) avant

incorporation des éléments dans la base.

Page 20: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Incorporation de « faits bruts », appartenant au

domaine public informationnel

Mais il est souvent difficile de faire la distinction entre les œuvres protégées ou non, à

cause de l’imprévisibilité du critère de l’originalité.

Tribunal de commerce de Compiègne, 2 juin

1989 : « les cotations et négociations

boursières » constituent des « informations

brutes » et des « biens communs à tous dès leur

publication »... «la cote des bourses est un

document Minitel destiné à l’information du

public ; les cotations des valeurs ou de biens ne

sont pas, comme tout prix de produits,

susceptibles d’appropriation. »

Page 21: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Consécration d’une « liberté documentaire »

Cour de Cassation, 30 octobre 1987, Microfor contre Le Monde : « lL'édition à des fins

documentaires, par quelque moyen que ce soit, d' un index comportant la mention des

titres en vue d'identifier les œuvres répertoriées ne porte pas atteinte au droit exclusif

d'exploitation de l'auteur »

Création de la notion « d ’œuvre d’information » et consécration de la possibilité

d’indexer, de référencer, de produire des mots-clés, des résumés.

Page 22: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Mais manipuler de l’information peut s’avérer

dangereux…

Mais CJUE 16 juillet 2009 Infopaq : des citations de 11 mots d’articles incluses dans un

produit de veille de presse ont été considérées comme des infractions au droit

d’auteur…

Normalement, une base

de données est

considérée comme une

« œuvre citante »

permettant d’y incorporer

des courtes citations.

Page 23: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

IncorporationIncorporation d’éléments correspondant à des

données personnelles

Incorporer des

données

personnelles dans

une base

correspond à un

« traitement » au

sens de la loi

Informatique et

Libertés du 6

janvier 1978.

Les individus disposent (sauf exceptions) à un droit d’information,

d’accès, de rectification et d’opposition (opt-out) et non d’un droit

d’autorisation préalable.

Page 24: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

III) Protection de la structure d’une base de

données par le droit d’auteur

Article 112-3 CPI : « Les

auteurs de traductions,

d'adaptations,

transformations ou

arrangements des oeuvres

de l'esprit jouissent de la

protection instituée par le

présent code sans

préjudice des droits de

l'auteur de l'oeuvre

originale. Il en est de

même des auteurs

d'anthologies ou de

recueils d'oeuvres ou de

données diverses, tels que

les bases de données, qui,

par le choix ou la

disposition des matières,

constituent des créations

intellectuelles.

Tribunal de Grande instance de Paris, 13 avril 2010, Optima on Line c/ Media Contact Israel : « pour que la base de

données puisse bénéficier de la protection du droit d’auteur, il faut démontrer que le choix et la disposition des matières

sont originaux c’est-à-dire qu’ils portent l’empreinte de la personnalité de son auteur »

Cour de justice de l’union européenne, 1er mars 2012, affaire C-604/10, Football Dataco Ltd et a. c/ Yahoo ! UK Ltd et

a : La protection de la base de données par le droit d’auteur est subordonnée la condition « que le choix ou la disposition des

données qu’elle contient constitue une expression originale de la liberté créatrice de son auteur ».

Page 25: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Originalité et structure d’une base de données

Cour de Cassation, 13 mai 2014, Affaire Xooloo : « la constitution de la base de données avait nécessité le découpage et l'analyse non seulement

de l'ensemble des pages et rubriques des sites sélectionnés mais aussi des liens mis en ligne par les éditeurs, pour s'assurer de la conformité de

chaque contenu avec les choix éditoriaux de la charte de la société Xooloo, et constate que la base de données se compose d'une longue liste

d'adresses URL renvoyant vers des sites, des rubriques de sites, et des pages, avec un portail thématique regroupant les adresses les plus

pertinentes listées par genre (musique, sport, voyages etc.), destiné à faciliter la navigation des enfants ; la cour d'appel en a déduit que la « liste

blanche » était le résultat de choix personnels opérés au regard de la conformité des contenus qui la constituent à la charte qui gouverne la

démarche de la société Xooloo, et traduisait un apport intellectuel, caractérisant, au regard des choix effectués et de la classification élaborées,

une oeuvre collective originale, éligible à la protection par le droit d'auteur »

Page 26: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Portée de la protection par le droit d’auteur

Article 5 directive du 11 mars 1996 : « L’auteur d’une base de données bénéficie, en ce qui concerne l’expression de cette base pouvant faire

l’objet d’une protection par le droit d’auteur, du droit exclusif de faire ou d’autoriser : a) la reproduction permanente ou provisoire, en tout ou en

partie, par quelque moyen et sous quelque forme que ce soit ; b) la traduction, l’adaptation, l’arrangement et toute autre transformation ; c)

toute forme de distribution au public de la base ou de ses copies. La première vente d’une copie d’une base de données dans la Communauté

par le titulaire du droit, ou avec son consentement, épuise le droit de contrôler la revente de cette copie dans la Communauté ; d) toute

communication, exposition ou représentation au public ; e) toute reproduction, distribution, communication, exposition ou représentation au

public des résultats des actes visés au point b) ».

La protection de la structure

va durer 70 ans après la mort

de l’auteur (personne

physique) ou de la publication

(personne morale)

Page 27: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Qui est titulaire ? A qui appartient le droit d’auteur sur la

structure d’une base de données ?

En principe, le droit d’auteur appartient à l’auteur-personne physique, mais en matière de base

de données, les juges sont plus enclins à admettre la qualification d’œuvre collective » pour

les bases développées par une pluralité de contributeurs.

Article L113-2 CPI : « Est dite collective l’œuvre

créée sur l’initiative d’une personne physique ou

morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa

direction et son nom et dans laquelle la contribution

personnelle des divers auteurs participant à son

élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel

elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à

chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble

réalisé. »

Page 28: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Protection par le droit sui generisIV) La protection du contenu de la base par

le droit « sui generis »

La loi française reconnaît en plus du droit d’auteur un droit sur le contenu des bases de données qui protège

son producteur, c’est-à-dire la personne qui a investi dans la base. Le producteur obtient ainsi le droit

d’interdire l’extraction de tout ou partie du contenu de la base sous certaines conditions. Ce droit permet de

protéger les investissements qui ont été faits sur la base.

La protection par le droit

d’auteur peut se cumuler

avec le droit sui generis,

mais une base à la

structure non-originale

peut tout de même être

protégée par le droit sui

generis .

Page 29: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Critère de protection par le droit sui generis : la

notion « d’investissements substantiels »

Article L. 341-1 du CPI : « Le

producteur d'une base de

données, entendu comme la

personne qui prend l'initiative

et le risque des

investissements

correspondants, bénéficie

d'une protection du contenu

de la base lorsque la

constitution, la vérification ou

la présentation de celui-ci

atteste d'un investissement

financier, matériel ou humain

substantiel.

Cour de justice de l’Union européenne, 9 nov. 2004 - aff. C-203/02, The British Horseracing Board Ltd et a.

c/ William Hill Organization Ltd : la « notion d’investissement lié à l’obtention du contenu d’une base de

données (...) doit s’entendre comme désignant les moyens consacrés à la recherche d’éléments existants et à

leur rassemblement dans ladite base », à l’exclusion des « moyens mis en œuvre pour la création des

éléments constitutifs du contenu d’une base de données » .

Page 30: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Un droit d’autoriser ou d’interdire les

« extractions substantielles » de données

Extraction =

réutilisation ou

reproduction par un

tiers de tout ou partie

du contenu de la base,

s’appréciant d’un point

de vue quantitatif ou

qualitatif.

+ les extractions non substantielles répétées => « Article L342-2 CPI : “l’extraction ou la

réutilisation répétée et systématique de parties qualitativement ou quantitativement non

substantielles” dès lors que les emprunts “excèdent manifestement les conditions d’utilisation

normale de la base de données”

Page 31: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

La durée de la protection par le droit sui generis

Article L342-5 CPI : 15 ans à compter du 1er janvier suivant l’année d’achèvement de la base de

données ou sa mise à disposition au public, si cette mise à disposition intervient dans le délai de

15 ans. Cette protection est prolongée pour une nouvelle période de 15 ans après tout nouvel

investissement substantiel.

Page 32: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Une tendance au durcissement ?

L’ajout d’une protection par les conditions

générales d’utilisation

CJUE, 15 janvier 2015, Ryan Air : admission d’une protection par de simples clauses

contractuelles d’une base de données protégeable ni par le droit d’auteur, ni par le droit sui

generis et ne souffrant aucune exception.

Page 33: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Une tendance au durcissement ?

La consécration graduelle du « vol de données »

Cour de Cassation, 20 mai 2015, Affaire Bluetouff : pour la première fois, la Cour de Cassation

admet la qualification de « vol » s’agissant de téléchargement de fichiers informatiques, en

s’appuyant sur la loi Godfrain.

Page 34: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

V) Un nouvel enjeu crucial pour la recherche :

la question du Text and Data Mining (TDM)

Page 35: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

La fouille de données ou de textes nécessite généralement

que des copies ou des extractions de contenus soient

effectuées.

Or ces actes déclenchent en principe l’application du droit d’auteur et/ou du droit des

bases de données. Les exceptions traditionnelles conviennent mal (citation, illustration

de la recherche, copies techniques provisoires, etc).

Page 36: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Dans ce contexte, volonté des éditeurs scientifiques

d’imposer des licences pour le Text et Data Mining

Cette solution contractuelle a été fortement poussée au niveau

européen (processus Licences For Europe => Echec en 2013).

Page 37: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Les licences de TDM constituent une manière de « privatiser

Exemple de conditions

figurant dans la licence

TDM d’Elsevier :

- L'utilisation obligatoire de

l'API maison d'Elsevier ;

- Une limitation des extraits à

200 signes ;

- L'obligation de placer le

résultat de la recherche sous

une licence non-commerciale. ;

- L'obligation d'inclure un lien

DOI vers la source originelle

(article…)

Les licences de TDM constituent une manière de « privatiser

l’information », au-delà du droit des bases de données

De plus, les licences ne peuvent couvrir que les contenus fournis par des éditeurs

identifiés. Comment faire pour les explorations de données conduites sur le web, où

les titulaires peuvent être très nombreux ou difficilement identifiables ?

Page 38: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Position de LIBER, la ligue des bibliothèques de recherche

européennes en réaction à la politique de TDM d’Elsevier.

Volonté d’inscrire ces usages a minima dans une exception

au droit d’auteur.

Le droit de fouiller les données doit rester un

corollaire du « droit de lire ».

Page 39: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

En Angleterre, une nouvelle exception introduite en 2014

pour sécuriser les « analyses computationnelles » effectuées

dans un cadre non-commercial.

Aux Etats-Unis, de larges ouvertures en matière d’exploration de

données, considéré comme un usage transformatif couvert par le fair

use (usage équitable), y compris parfois dans un cadre commercial

(jurisprudence Google Books - 2013).

Page 40: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Pendant ce temps, en France...

Un rapport remis au Ministère de la Culture qui préconise un moratoire

sur deux ans et de privilégier les solutions contractuelles…

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On ne peut ignorer que

l’activité d’exploration

de données se développe sur

la création et l’investissement

d’autrui, des bases de

données et des oeuvres. Sans

cet apport initial, l’exploration

de données ne pourrait ni

exister, ni développer de

valeur. En ce sens, dans

l’ordre des organismes

vivants, l’exploration de

données est de nature «

parasitaire ».

Rapport CSPLA sur le Text et

Data Mining. 2014

Page 41: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Pendant ce temps, en France...

La licence nationale conclue par Couperin avec Elsevier contient une

clause relative au Text et Data Mining, ce qui crée un précédent

important et légitime l’approche contractuelle.

Page 42: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Prochain enjeu : la réforme de la directive européenne sur le

droit d’auteur.

Révision annoncée par la Commission européenne à l’horizon 2016.

Le rapport de l’eurodéputée Julia Reda, adopté en commission JURI du Parlement européen,

recommande d’introduire une exception pour le Text And Data Mining, « à des fins de

recherche ».

The Hague

Declaration On

Knowledge

Discovery In The

Digital Age (2015)

Page 43: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

VI) Le statut particulier des données

de la recherche et l’Open Data/Science

Page 44: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Le droit à la réutilisation des

informations publiques

Pas un droit de propriété, mais au contraire un droit de réutilisation reconnu au profit

des citoyens, pouvant toutefois être encadré et conditionné par l’administration

(notamment au paiement d’une redevance)

Page 45: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Article 10 / loi du 11 juillet 1978

« Les informations figurant dans des documents produits ou reçus par les administrations mentionnées à l'article 1er, quel que soit le support, peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus. »

Par dérogation au présent chapitre, les conditions dans lesquelles les informations peuvent être réutilisées sont fixées, le cas échéant, par les administrations mentionnées aux a et b du présent article lorsqu'elles figurent dans des documents produits ou reçus par :

a) Des établissements et institutions d'enseignement et de recherche ;b) Des établissements, organismes ou services culturels.

Article 11 / loi du 11 juillet 1978

Principe

Exception

Le régime dérogatoire des données de la recherche

Disparaît pour les

données culturelles dans

la prochaine directive,

mais pas pour les données

de la recherche…

Page 46: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Quelle portée exacte pour ce régime

dérogatoire ?

Dans le champ culturel, la justice administrative a réintégré les données des archives

publiques dans le champ du principe général de réutilisation (CAA Lyon, 4 juillet 2012).

Page 47: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Surprenant retour du droit des bases de

données contre le principe de réutilisation…

Concernant des services d’archives départementales, le juge administratif admet que

l’administration puisse invoquer le droit sui generis des bases de données pour faire

obstacle au principe de réutilisation (CAA Bordeaux 26 janvier 2015).

Page 48: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Un projet de numérisation de livres anciens Des scans image et de l’OCR corrigé

Un encodage en TEI et la production de métadonnées

Une valorisation éditoriale à travers un site web et des articles de revue

Dans le cadre d’un projet de recherche, distinguer les

différentes « couches de droits »

Page 49: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

� Couche des données :

� Couche des métadonnées :

� Couche des contenus :

Statut des différentes « couches de droits »

Page 50: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

� Couche des données :

� Couche des métadonnées :

� Couche des contenus :

L’institution :

-Droit des bases de données appartient

au « producteur de la base de

données »

- Droit à la réutilisation des

informations publiques =

administration qui produit ou collecte

les informations

L’individu :

-Le droit d’auteur sur les œuvres

appartient en principe à l’individu

personne physique

- Mais les agents publics sont réputés

céder leurs droits sur leurs créations à

leur administration de tutelle

- Sauf pour les enseignants chercheurs

qui conservent pleinement leur droit

d’auteur.

Conséquences des statuts différents

Page 51: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Développement d’une politique d’Open Data

en France

Extension progressive de la gratuité et de la mise à disposition sous licence ouverte.

Possibilité que la gratuité devienne principe général applicable par défaut, à l’occasion

de la transposition de la nouvelle directive (par la loi numérique ?).

Page 52: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Juridiquement, l’Open Data est une renonciation à l’exercice

des droits sur une base de données

Vous êtes libre de réutiliser « l’Information » :

• Reproduire, copier, publier et transmettre « l’Information » ;• Diffuser et redistribuer « l’Information » ;• Adapter, modifier, extraire et transformer à partir de « l’Information », notamment pour créer des « Informations

dérivées » ;• Exploiter « l’Information » à titre commercial, par exemple en la combinant avec d’autres « Informations », ou en

l’incluant dans votre propre produit ou application.

Sous réserve de :

• Mentionner la paternité de « l’Information » : sa source (a minima le nom du « Producteur ») et la date de sa dernière mise à jour.

Droits de propriété intellectuelle

Le « Producteur » garantit que « l’Information » ne contient pas de droits de propriété intellectuelle appartenant à des tiers.

Les éventuels « Droits de propriété intellectuelle » détenus par le « Producteur » sur des documents contenant « l’Information » ne font pas obstacle à la libre réutilisation de « l’Information ». Lorsque le « Producteur » détient des « Droits de propriété intellectuelle » sur des documents qui contiennent « l’Information », il les cède de façon non exclusive, à titre gracieux, pour le monde entier et pour toute la durée des « Droits de propriété intellectuelle », au « Réutilisateur » qui peut en faire tout usage conformément aux libertés et aux conditions définies par la présente licence.

Page 53: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Dans le champ de l’enseignement supérieur

Ouverture de jeux de données par le Ministère de l’Enseignement et de la Recherche,

mais pour l’instant, aucune obligation sur les universités ou les établissements de

recherche.

Page 54: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

� Couche des données :

� Couche des métadonnées :

� Couche des contenus :

Différentes licences Open Data utilisables pour

les données de recherche

Page 55: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Incitation de l’Union Européenne à aller vers

une ouverture des données de la recherche

Open Data Research Pilot (2013) dans le cadre d’Horizon 2020 : incitation à utiliser les

licences CC-BY ou CC0 pour l’ouverture des données de la recherche

Page 56: Le statut des données de la recherche : entre droit des bases de données et données publiques

Progression du concept « d’Open Science »

Open Access +

Open Data +

Open Source =

Open Science ?

Ouvrir les données de la recherche dès le départ avec des licences

adaptées pour favoriser les usages en aval et ne pas avoir à les négocier

auprès d’intermédiaires.

Vers une Charte Universelle

de l’Open Science ?

(projet ADBU/CNRS)