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16 0123 Mardi 29 mai 2012 Législatives Dans les villes de France 1/11 Montpellier Envoyé spécial L es socialistes de Montpellier et de l’Hérault veulent croire que la longue séquence élec- torale commencée lors de la pri- maire d’octobre 2011 et qui se ter- minera au lendemain des législati- ves des 10 et 17 juin signe la fin des années de turbulences qu’ils vien- nent de vivre – pêle-mêle, Georges Frêche, des exclusions, une ges- tion douteuse et une mise sous tutelle. Et, surtout, galvanisés par la victoire de François Hollande, ils veulent croire à leurs chances de rafler la mise dans le département. Que peut espérer la gauche ? Jus- qu’ici, sept députés représen- taient l’Hérault – sous l’actuelle législature, deux du PS et cinq de l’UMP. Ils seront désormais neuf, la carte électorale ayant été redes- sinée, en 2010, pour tenir compte de l’expansion démographique de la ville et de ses alentours. A l’élection présidentielle, M. Hollande est arrivé en tête dans six de ces neuf circonscriptions, et dans quatre sur les cinq où votent les Montpelliérains. Alors, le PS met la barre haut. « Si nous n’arri- vons pas à faire monter cinq des nôtres au Palais-Bourbon, on pour- ra considérer que c’est un échec », analyse, prudemment anonyme, un élu socialiste de la ville. En juillet 2011, ce même élu était beaucoup moins optimiste. « On n’arrivera jamais à organiser proprement la primaire, et je n’ose même pas imaginer comment on parviendra à se mettre en ordre de bataille pour les législatives », redoutait-il alors. Depuis, le PS local semble avoir su mettre de côté crises et guerres intestines. « La fédération était perçue com- me celle de la fraude et de la divi- sion. On ne dit pas assez à quel point la primaire a permis de mobi- liser les troupes. On a redonné une utilité politique aux militants. Mal- gré la guerre des chefs, malgré les fractures, malgré l’affaire Navarro, on a réussi à afficher notre unité », se réjouit Christian Assaf, candidat dans la 8 e circonscription et man- dataire de Martine Aubry dans l’Hérault lors de la primaire. Le PS héraultais revient en effet de loin. En 2010, tandis que se pro- filent les élections régionales, Georges Frêche, le grand ordonna- teur de la politique locale, prési- dent du conseil régional Langue- doc-Roussillon, est écarté du PS après une énième sortie douteuse. Gênée aux entournures, la Rue de Solférino présente contre lui Hélè- ne Mandroux, qui lui a succédé comme maire de Montpellier en 2004. Certains la suivront dans ce combat perdu d’avance. D’autres resteront fidèles à M. Frêche et seront exclus du PS. Bombant le torse contre ces Parisiens de Sol- férino qui ne comprennent rien, M. Frêche est élu sans difficulté pour un deuxième mandat à la tête de l’exécutif régional ; man- dat qu’il n’exercera que quelques mois, jusqu’à sa mort soudaine, en octobre 2010. Juste avant la mort de Georges Frêche survient l’« affaire Navarro », du nom du sénateur de l’Hérault et chef de file des socialis- tes du département, exclu lui aussi pour son soutien à M. Frêche. En 2010, la direction du PS constate des irrégularités dans la gestion de la fédération. Le parti la place sous tutelle, avant de déposer plainte, quelques mois plus tard, pour que la justice se saisisse « des factures réglées pendant plusieurs mois par la fédération sans lien avec son fonctionnement ». Cette tutelle, renouvelée depuis, a eu une grande influence sur l’organisation des législatives dans le département. Tandis que, dans les autres fédérations socialis- tes, les investitures sont entéri- nées par un vote des militants, les candidats au Palais-Bourbon dans l’Hérault ont été choisis par le par- ti. Au lendemain de la primaire, la tutelle, dirigée par Alain Fontanel, chargé de l’animation des fédéra- tions au secrétariat national du PS, a pris les choses en main. Première- ment, tous les exclus des régiona- les ont été réintégrés, à l’exception notable de M. Navarro, qui faisait jusque-là la pluie et le beau temps pour les investitures aux élections législatives. Ensuite, l’autorité de tutelle a réuni les caciques du PS dans la région. M me Mandroux, maire de Montpellier, Christian Bourquin, sénateur des Pyrénées-Orientales et président du conseil régional, André Vezinhet, député et prési- dent du conseil général de l’Hé- rault, Jean-Pierre Moure, prési- dent de Montpellier Aggloméra- tion, et Pierre Bouldoire, président de Thau Agglo, ont scellé leur réconciliation. C’est lors de cette réunion, impensable quelques mois plus tôt, qu’a été établie la lis- te des candidats pour les législati- ves, conçue pour ménager les desi- derata – et les veto – des uns des autres, prendre en compte les ami- tiés et inimitiés pour feu Georges Frêche, les courants du PS, etc. « Ça a été un long tâtonnement », euphémise M. Fontanel. Cette approche raisonnable a pacifié la fédération, au moins pour un temps. « La tutelle a fait correctement les choses dans un contexte diffici- le, elle est parvenue à une solution élégante », se réjouit Anne-Yvonne Le Dain, qui fut vice-présidente du conseil régional auprès de Frêche et se présente dans la 2 e circonscrip- tion, la plus convoitée. Purement urbaine, celle-ci n’échappera pas à la gauche, sauf surprise majeure – c’est pour cela que Jean-Luc Mélen- chon a envisagé, un temps, de s’y présenter. L’investiture de M me Le Dain illustre bien ce que la tutelle parisienne a cherché à fai- re : ménager toutes les sensibilités, tout en écartant les nombreux pré- tendants à la succession de M me Mandroux à la mairie, qui ver- raient, dans cette circonscription imperdable, un marchepied bien commode vers l’hôtel de ville. Elle est finalement allée à une socialiste qui « soutient Hollande depuis l’époque des transcou- rants », dans les années 1980. « J’ai bien conscience que je fais partie de ce compromis », reconnaît M me Le Dain. « Anne-Yvonne rem- plissait toutes les cases, confirme un décrypteur socialiste. C’est une femme, ingénieure agronome reconnue, hollandaise convain- cue ; elle n’est pas appréciée par tout le monde, mais ne fâche per- sonne, et son investiture est un signe fort de rassemblement pour les frêchistes, puisqu’elle faisait partie des 58 exclus de l’époque des régionales. » M. Assaf, mandataire de M me Aubry pour la primaire de 2011, est lui aussi lucide sur sa pla- ce. « Ma candidature était accepta- ble dans la 8 e circonscription, elle ne l’aurait pas été dans la 2 e », car trop belle pour un aubryste, expli- que-t-il, sachant qu’on lui prêtait des ambitions pour la mairie. Dans cette 8 e circonscription, qui va de l’ouest de Montpellier jus- qu’à la mer, la tâche sera ardue pour le socialiste. Ancien directeur du cabinet de Frêche, il a été remer- cié par « l’empereur de la Septima- nie » avant de rejoindre M me Man- droux dans la course aux régiona- les et au sein de son cabinet à la mairie. Ce qui lui vaut d’être quali- fié de « Brutus de la politique loca- le» par son adversaire de l’UMP, Arnaud Julien, et critiqué d’autres, à gauche, en termes plus amènes. Globalement, le choix s’est por- sur des candidats moins connus, « qui ne sont redevables à personne et qui ne sont pas en train de préparer le coup d’après », expli- que un responsable du PS. Ce qui comporte le risque d’investir un candidat « un peu trop tendre » face à des vieux routiers de la poli- tique locale, souligne un élu, évo- quant la 3 e circonscription, où Fan- ny Dombre-Coste, élue municipa- le, affronte Jean-Pierre Grand, un partisan de Dominique de Ville- pin, maire de Castelnau-le-Lez depuis 1983 et député depuis 2002. La candidate de gauche ne part pas favorite : M. Hollande a devancé son rival d’une courte tête dans cette circonscription, et une triangulaire avec le FN – Mari- ne Le Pen y a obtenu 17,58 % au pre- mier tour de la présidentielle – est peu probable. Le Parti socialiste de l’Hérault, « convalescent », selon les mots de M. Fontanel, semble armé pour remporter la majorité des neuf cir- conscriptions. La stratégie de réconciliation a été acceptée par le plus grand nombre. Il y a certes des rancœurs tenaces, mais peu de candidatures dissidentes. Seuls Antonio Fulleda, à Béziers, et Charles Khoury, dans la 1 re cir- conscription, se sont déclarés, res- pectivement, contre Dolorès Roquet et Jean-Louis Roumégas, candidats d’Europe Ecologie- Les Verts soutenus par le PS dans le cadre de l’accord entre les écolo- gistes et les socialistes. Les problèmes du PS sont-ils réglés pour autant ? « Rien n’est réglé tant que nous n’avons pas ins- tallé un nouveau conseil fédéral », juge M me Le Dain. Une manière de dire que cet équilibre est fragile. La situation pourrait se dégrader de nouveau quand les appétits s’aiguiseront pour les municipa- les de 2014. La compétition risque d’être d’autant plus vive que, pour l’heure, la droite n’a pas pro- fité des divisions du PS pour lui opposer un candidat crédible. p Jonathan Parienté SOURCES : OBSERVATOIRE DE LA VIE POLITIQUE ET PARLEMENTAIRE ; INSEE, 2009 ; ASSEMBLÉE NATIONALE INFOGRAPHIE LE MONDE 6 5 2 1 7 4 3 a DÉPUTÉS SORTANTS* en % des suffrages exprimés par circonscription PS et apparentés UMP et apparentés * Le découpage des circonscriptions législatives a été modifié en 2010. De 10 000 à 14 000 De 14 000 à 16 500 De 21 000 à 32 000 De 16 500 à 21 000 a REVENU FISCAL MÉDIAN PAR UNITÉ DE CONSOMMATION** en euros par an et par commune Béziers Sète Pézenas Lodève Bédarieux Ganges Lunel r pellie r r ntpe o n n on r er r M Montpellier Frontignan Agde ** Unité de consommation : système attribuant un poids variable à chaque membre d’un ménage, et permettant ainsi de comparer les niveaux de vie de ménages de tailles ou de compositions différentes. Le nombre de personnes est alors ramené à un nombre d’unités de consommation. Le revenu fiscal médian d’une commune est tel que la moitié des unités de consommation de cette commune déclare un revenu inférieur à cette valeur et l’autre moitié, un revenu supérieur. Données non disponibles Agglomération de Montpellier Limite de circonscription France métropolitaine 18 355 euros Hérault 17 067 euros 3 6 7 8 9 1 2 5 4 27,75 27,51 37,3 26,19 27,74 26,77 25,94 27,75 27,66 a CANDIDAT ARRIVÉ EN TÊTE AU PREMIER TOUR DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DANS LE DÉPARTEMENT DE L’HÉRAULT en % des suffrages exprimés par circonscription Le PS bien placé pour emporter cinq circonscriptions dans l’Hérault Nouvelles circonscriptions* Anciennes circonscriptions N. Sarkozy F. Hollande M. Le Pen Numéro de circonscription Résultat en % 9 27,51 Montpellier Montpellier Les socialistes tournent la page Frêche et Navarro Après des années de remous, le PS de l’Hérault, toujours sous la tutelle de Paris, semble enfin en ordre de bataille Le choix de l’autorité de tutelle s’est porté sur des candidats moins connus, « qui ne sont redevables à personne », dit un responsable du parti « La primaire a permis de mobiliser les troupes. On a redonné une utilité politique aux militants » Christian Assaf candidat PS dans la 8 e circonscription

Le PS bien placé pour emporter cinq circonscriptions dans l’Hérault (Le Monde daté du Mardi 29 mai 2012)

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Page 1: Le PS bien placé pour emporter cinq circonscriptions dans l’Hérault (Le Monde daté du Mardi 29 mai 2012)

16 0123Mardi 29mai 2012LégislativesDans les villes de France 1/11

MontpellierEnvoyé spécial

L es socialistes de Montpellieret de l’Hérault veulent croireque la longue séquence élec-

torale commencée lors de la pri-maire d’octobre2011 et qui se ter-mineraaulendemaindes législati-ves des 10 et 17juin signe la fin desannées de turbulences qu’ils vien-nentde vivre – pêle-mêle,GeorgesFrêche, des exclusions, une ges-tion douteuse et une mise soustutelle. Et, surtout, galvanisés parlavictoiredeFrançoisHollande, ilsveulent croire à leurs chances derafler lamisedansledépartement.

Quepeutespérerlagauche?Jus-qu’ici, sept députés représen-taient l’Hérault – sous l’actuellelégislature, deux du PS et cinq del’UMP. Ils seront désormais neuf,la carte électorale ayant été redes-sinée, en 2010, pour tenir comptede l’expansion démographiquede la ville et de ses alentours.

A l’élection présidentielle,M.Hollandeest arrivé en têtedanssix de ces neuf circonscriptions, etdans quatre sur les cinq où votentles Montpelliérains. Alors, le PSmet la barre haut. «Si nous n’arri-vons pas à faire monter cinq desnôtresauPalais-Bourbon,onpour-ra considérer que c’est un échec»,analyse, prudemment anonyme,un élu socialiste de la ville.

En juillet 2011, ce même éluétait beaucoup moins optimiste.«On n’arrivera jamais à organiserproprement la primaire, et je n’osemême pas imaginer comment onparviendra à semettre en ordre debataille pour les législatives»,redoutait-il alors. Depuis, le PSlocal semble avoir su mettre decôté crises et guerres intestines.«La fédération était perçue com-

me celle de la fraude et de la divi-sion. On ne dit pas assez à quelpointlaprimaireapermisdemobi-liser les troupes. On a redonné uneutilitépolitiqueauxmilitants.Mal-gré la guerre des chefs, malgré lesfractures,malgré l’affaireNavarro,on a réussi à afficher notre unité»,seréjouitChristianAssaf,candidatdans la 8ecirconscription et man-dataire de Martine Aubry dansl’Hérault lors de la primaire.

Le PShéraultais revient en effetde loin. En 2010, tandis que sepro-filent les élections régionales,Georges Frêche, le grandordonna-teur de la politique locale, prési-dent du conseil régional Langue-doc-Roussillon, est écarté du PSaprèsuneénièmesortiedouteuse.Gênée aux entournures, la Rue deSolférinoprésente contre luiHélè-ne Mandroux, qui lui a succédécomme maire de Montpellier en2004. Certains la suivront dans ce

combat perdu d’avance. D’autresresteront fidèles à M. Frêche etseront exclus du PS. Bombant letorse contre ces Parisiens de Sol-férino qui ne comprennent rien,M.Frêche est élu sans difficultépour un deuxième mandat à latête de l’exécutif régional ; man-dat qu’il n’exercera que quelques

mois, jusqu’àsamortsoudaine,enoctobre2010.

Juste avant la mort de GeorgesFrêche survient l’« affaireNavarro», du nomdu sénateur del’Héraultetchefdefiledessocialis-tesdudépartement,excluluiaussipour son soutien à M.Frêche. En2010, la direction du PS constatedes irrégularitésdans lagestiondela fédération. Le parti la place soustutelle, avant de déposer plainte,quelquesmois plus tard, pour quela justice se saisisse «des facturesrégléespendantplusieursmoisparla fédération sans lien avec sonfonctionnement».

Cette tutelle, renouveléedepuis, a eu une grande influencesur l’organisation des législativesdans le département. Tandis que,danslesautresfédérationssocialis-tes, les investitures sont entéri-nées par un vote desmilitants, lescandidats au Palais-Bourbondansl’Héraultont été choisis par le par-ti. Au lendemain de la primaire, latutelle, dirigée par Alain Fontanel,chargé de l’animation des fédéra-tionsausecrétariatnationalduPS,aprisleschosesenmain.Première-ment, tous les exclus des régiona-lesontété réintégrés,à l’exceptionnotable de M.Navarro, qui faisaitjusque-là la pluie et le beau tempspour les investituresauxélectionslégislatives.

Ensuite, l’autorité de tutelle aréuni les caciques du PS dans larégion. MmeMandroux, maire deMontpellier, Christian Bourquin,sénateur des Pyrénées-Orientaleset président du conseil régional,André Vezinhet, député et prési-dent du conseil général de l’Hé-rault, Jean-Pierre Moure, prési-dent de Montpellier Aggloméra-tion,etPierreBouldoire,présidentde Thau Agglo, ont scellé leur

réconciliation. C’est lors de cetteréunion, impensable quelquesmoisplus tôt,qu’aétéétablie la lis-te des candidats pour les législati-ves, conçuepourménagerlesdesi-derata – et les veto – des uns desautres,prendreencomptelesami-tiés et inimitiés pour feu GeorgesFrêche, les courantsduPS, etc.«Çaa été un long tâtonnement »,euphémise M. Fontanel. Cetteapproche raisonnable a pacifié lafédération, au moins pour untemps.

«La tutelle a fait correctementles choses dans un contexte diffici-le, elle est parvenue à une solutionélégante»,seréjouitAnne-YvonneLeDain, qui fut vice-présidenteduconseil régional auprès de Frêcheetseprésentedansla2ecirconscrip-tion, la plus convoitée. Purementurbaine, celle-ci n’échapperapas àla gauche, sauf surprisemajeure –c’estpourcelaqueJean-LucMélen-chon a envisagé, un temps, de s’yprésenter. L’investiture deMmeLeDain illustre bien ce que latutelle parisienne a cherché à fai-re :ménagertouteslessensibilités,toutenécartantlesnombreuxpré-tendants à la succession deMmeMandrouxà lamairie, qui ver-raient, dans cette circonscriptionimperdable, un marchepied biencommodevers l’hôtel de ville.

Elle est finalement allée à unesocialiste qui «soutient Hollandedepuis l’époque des transcou-rants», dans les années 1980. «J’aibien conscience que je fais partiede ce compromis », reconnaîtMmeLeDain. «Anne-Yvonne rem-plissait toutes les cases, confirmeun décrypteur socialiste.C’est unefemme, ingénieure agronomereconnue, hollandaise convain-cue ; elle n’est pas appréciée partout le monde, mais ne fâche per-

sonne, et son investiture est unsigne fort de rassemblement pourles frêchistes, puisqu’elle faisaitpartie des 58exclusde l’époquedesrégionales.»

M. Assaf, mandataire deMmeAubry pour la primaire de2011, est lui aussi lucide sur sa pla-ce.«Macandidature était accepta-ble dans la 8e circonscription, ellene l’aurait pas été dans la 2e», cartropbelle pourunaubryste, expli-que-t-il, sachant qu’on lui prêtait

des ambitions pour la mairie.Dans cette 8ecirconscription, quiva de l’ouest de Montpellier jus-qu’à la mer, la tâche sera arduepourlesocialiste.AnciendirecteurducabinetdeFrêche,ilaétéremer-ciépar «l’empereurde la Septima-nie» avant de rejoindre MmeMan-drouxdans la course aux régiona-les et au sein de son cabinet à lamairie.Cequi lui vautd’êtrequali-fié de «Brutus de la politique loca-le» par son adversaire de l’UMP,Arnaud Julien, et critiquéd’autres,à gauche, en termesplus amènes.

Globalement, le choix s’est por-té sur des candidats moinsconnus, «qui ne sont redevables àpersonneetquinesontpasentraindepréparer lecoupd’après», expli-que un responsable du PS. Ce quicomporte le risque d’investir uncandidat «un peu trop tendre»

faceà des vieux routiersde la poli-tique locale, souligne un élu, évo-quant la 3ecirconscription,où Fan-ny Dombre-Coste, éluemunicipa-le, affronte Jean-Pierre Grand, unpartisan de Dominique de Ville-pin, maire de Castelnau-le-Lezdepuis 1983 et député depuis2002. La candidate de gauche nepart pas favorite : M.Hollande adevancé son rival d’une courtetête dans cette circonscription, etune triangulaire avec le FN –Mari-neLePenyaobtenu17,58%aupre-mier tour de la présidentielle – estpeuprobable.

Le Parti socialiste de l’Hérault,«convalescent», selon lesmots deM.Fontanel, semble armé pourremporterlamajoritédesneufcir-conscriptions. La stratégie deréconciliationaétéacceptéepar leplus grand nombre. Il y a certesdes rancœurs tenaces, mais peude candidatures dissidentes.Seuls Antonio Fulleda, à Béziers,et Charles Khoury, dans la 1recir-conscription, se sontdéclarés, res-pectivement, contre DolorèsRoquet et Jean-Louis Roumégas,candidats d’Europe Ecologie-LesVerts soutenus par le PS danslecadrede l’accordentre lesécolo-gistes et les socialistes.

Les problèmes du PS sont-ilsréglés pour autant? «Rien n’estréglétantquenousn’avonspasins-tallé un nouveau conseil fédéral»,juge MmeLe Dain. Unemanière dedire que cet équilibre est fragile.La situation pourrait se dégraderde nouveau quand les appétitss’aiguiseront pour les municipa-les de 2014. La compétition risqued’être d’autant plus vive que,pour l’heure, la droite n’a pas pro-fité des divisions du PS pour luiopposerun candidat crédible.p

JonathanParienté

SOURCES : OBSERVATOIRE DE LAVIE POLITIQUE ET PARLEMENTAIRE ; INSEE, 2009 ; ASSEMBLÉE NATIONALE INFOGRAPHIE LE MONDE

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a DÉPUTÉS SORTANTS*en% des suffrages exprimés par circonscription

PS et apparentés

UMP et apparentés

* Le découpage des circonscriptionslégislatives a été modifié en 2010.

De 10 000 à 14 000 De 14 000 à 16 500 De 21 000 à 32 000De 16 500 à 21 000

a REVENU FISCALMÉDIAN PAR UNITÉ DE CONSOMMATION**en euros par an et par commune

Béziers Sète

Pézenas

Lodève

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MontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellierMontpellier

Frontignan

Agde

** Unité de consommation : système attribuant un poids variable à chaque membre d’un ménage, et permettant ainsi de comparerles niveaux de vie de ménages de tailles ou de compositions différentes. Le nombre de personnes est alors ramené à un nombre d’unitésde consommation.Le revenu fiscal médian d’une commune est tel que la moitié des unités de consommation de cette commune déclare un revenu inférieurà cette valeur et l’autre moitié, un revenu supérieur.

Données non disponibles

Agglomération de Montpellier

Limite de circonscription

France métropolitaine18 355 euros

Hérault17 067 euros

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a CANDIDATARRIVÉ EN TÊTE AU PREMIER TOUR DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLEDANS LE DÉPARTEMENTDE L’HÉRAULTen% des suffrages exprimés par circonscription

Le PS bien placé pour emporter cinq circonscriptions dans l’Hérault

Nouvelles circonscriptions*

Anciennes circonscriptions

N. Sarkozy

F. Hollande

M. Le Pen

Numérode circonscription

Résultat en %

9

27,51

Montpellier

Montpellier

LessocialistestournentlapageFrêcheetNavarroAprèsdesannéesderemous, lePSde l’Hérault, toujourssous la tutelledeParis, sembleenfinenordredebataille

Lechoixdel’autoritédetutelles’estportésurdescandidats

moinsconnus,«quinesontredevablesàpersonne»,ditunresponsableduparti

«Laprimaireapermisdemobiliserlestroupes.Onaredonné

uneutilitépolitiqueauxmilitants»ChristianAssaf

candidat PSdans la 8e circonscription

Page 2: Le PS bien placé pour emporter cinq circonscriptions dans l’Hérault (Le Monde daté du Mardi 29 mai 2012)

LégislativesDans les villes de France 1/11

MontpellierCorrespondante

D ans la famille Le Pen, onconnaît lepère, Jean-Marie,la fille,Marine,et le compa-

gnon de celle-ci, Louis Aliot, vice-président du Front national. Demanière curieuse, le même sché-ma familial se retrouve dans lafédérationFNde l’Hérault: lepère,Alain Jamet, 78ans, vieux compa-gnon de route de Jean-Marie LePen, la fille, France Jamet, 51ans,dont déjà plus de trente engagésdans le parti, et son compagnon,Guillaume Vouzellaud, secrétairedépartementaldu Front.

Tous les trois se présentent auxélections législatives dans l’Hé-rault, à Béziers, Sète et Montpel-lier. Tous les trois peuvent jouerles trouble-fête, si l’on regarde lescoredelacandidatedeleurpartiàl’élection présidentielle (MarineLe Pen a obtenu 22,28% dans l’Hé-rault et 17,90%auplannational).

Les deux familles sont très pro-ches et ont développé des liensd’amitié qui remontent, en ce quiconcerne les deux aînés, à plus desoixante ans. Alain Jamet a sixansde moins que Jean-Marie Le Pen,mais ils se sont côtoyés aussi bienau sein du mouvement de PierrePoujade que plus tard en Algérie.Alain Jamet, frère de l’écrivainDominique Jamet, a participé à lafondation du Front national, en

1972, et créé l’une des premièresfédérations, celle de l’Hérault.

Il était encore, cette année, aucôté de Jean-Marie Le Pen pour lemeeting du FN, le 1ermai, à Paris.Pour M. Jamet, le parallélismeentre les deux familles s’expliquede manière toute simple: «Dansles deux cas, les enfants sont tom-bésdans lamarmitede lapolitiquedès leur naissance. Il n’y a pasd’hé-rédité des postes, mais certaine-ment une hérédité des missionsque l’on se donne.»

Malgré tout, la mainmise de lafamille Jamet sur le FN héraultaisne va pas de soi, au point que l’ondésigne parfois le trio comme «laPME Jamet-Vouzellaud». «Ce sys-tème a suscité des réactions, esti-me Jean-Michel duPlaa, conseillergénéral socialiste, qui a remportél’élection cantonale, en mars2011,face à M.Vouzellaud. Un certainnombre de dissidents du parti ont

été écartés par les Jamet, notam-ment le leader du Front au conseilmunicipal de Béziers, AlainRicard.» Evincé de la liste FN desrégionales en 2010, celui-ci a cla-qué laportepour fondersonmou-vement, «Béziers fait front».

Sans surprise, Mme Jamet metdavantage l’accent sur les difficul-tésd’êtrehéritièrequesurleséven-tuelles facilités qui s’y attachent.«Marineetmoi, ilafalluqu’ons’im-posenonseulementauprèsdesélec-teurs, mais aussi auprès de nospères!Necroyezpasqu’ilyaitquel-que népotisme. On n’est pas dansune logique d’héritage. Regardezcomment Marine a dû chercherson poste avec les dents ! Ici, je suisrestée dans l’ombre longtemps, etsi je suis passée tête de liste auxrégionales, en 2010, c’est à lademande de Jean-Marie [Le Pen],pas demonpère.»

De fait, le parcours deMme Jamet relève davantage de laconviction que de l’opportunis-me. « Je me suis présentée auxmunicipalesàMontpellieren 1983.J’avais une vingtaine d’années,j’étais en dernière position, maiscela a permis à mon père de faireune liste. Ensuite, je suis allée dansles cantons dont personne ne vou-lait. Aujourd’hui, on trouve descandidats mais, dans les années1990, c’était plus difficile.»

Quant àM.Vouzellaud, il préci-se qu’il a rencontréMme Jamet par-

ce qu’il était au FN, et nonl’inverse. «Je me suis engagé dansle parti à 16ans, et j’ai été pendantcinq ans secrétaire national, char-gé des adhésions. J’ai démissionnéde ce poste en 2004 pour rejoindreFrance dans l’Hérault, où j’avaismoi-mêmedesattaches familiales,avec un grand-père armurier à

Lodève. J’ai alors redémarré com-memilitant de base.»

Le trio compte un nombreimpressionnantd’épreuvesélecto-rales. Pour M. Jamet, ces législati-ves sont sa 44e campagne depuis1975, a huitième pour un siège dedéputé.A43ans,M.Vouzellaudenest, lui, à son 20epassage devant

lesélecteurs, tousscrutinsconfon-dus, cantonales, municipales,européennes et législatives. Il estnéanmoins impossible de fairel’additionpour les trois, ce trio, carMme Jamet avoue avoir perdu lecompte des campagnes qu’elle amenées.p

AnneDevailly

Jean-PierreGrand,candidat«raisonnable»del’UMP

MontpellierCorrespondante

M i-mai, Montpellier fêtaitcommeilsedoitsonéqui-pede football champion-

ne de France. Mais deux moisavant, la ville était déjà en pleinecélébration. Il s’agissait alorsd’inaugurer les deux nouvelleslignes de tramway : spectacles,musique, feux d’artifice, la fêteétait totale.

D’autresvillesontaussimisésurcemoyen de transport. Paris, Lille,Nantes, Grenoble, Strasbourg, etc.Mais seule Montpellier a eu l’idéede confier l’habillage de ce tram-wayàdesgrandsnomsdudesignetde la mode : le duo Garouste etBonettipouruneligne, lecouturierChristian Lacroix pour les deuxautres. Tandis que, ailleurs, leswagons restent sagement blancsou uniformes, à Montpellier, cesontdeshirondelles,des fleurs,despoissons ou des étoiles dorées quisillonnent laville.

Cette présence extrêmementforte de la communication et del’image est l’une des signatures dela ville. Georges Frêche, maire de1977 à 2004 – décédé en 2010 –était un grand communicant; sessuccesseurs,quecesoità lavilleouà l’agglomération, poursuiventdans cette voie. Montpellier estuneville attractiveet le fait savoir.

Résultat, la ville, huitième deFrance par la population, a été, audébut de l’année, retenue par leNewYork Timesparmi les quaran-te-cinqsites dumonde à visiter en2012. C’était la seule ville française

figurant dans ce classement. Nou-velle fierté, et nouvelle campagnedecommunicationpourbienfaireconnaître ce palmarès à tous leshabitants!

«L’attractivité n’est pas qu’unequestion d’image», modère JeanCottave,quipréside InvestLR, l’or-ganisme chargé de faire venir desentreprises dans la région. «L’ag-glomération, dit-il, a toujours misl’accent sur l’économie: elle possè-de des incubateurs parmi les plusdynamiques du pays, elle a fédéréles entreprises dans des filières etpossède des structures d’accueilqui fontdeMontpellier latroisièmevilledeFrancepour les congrès.Elleest, par ailleurs, une ville pharepour la recherche, publique ou pri-vée. L’économieestunepriorité,unfil conducteurpour les élus.»

Par ailleurs, ce dynamisme estporté par la plus forte pressiondémographique de France. Selon

unscénariodel’Insee, l’aggloméra-tion montpelliéraine devraitaccueillir 100000habitants deplus d’ici à 2030, et la moyenned’âgenedépassepas 40ans.

Tous ces facteurs ont pesé dansle choix de certaines entreprises

devenirs’implanterdanslacapita-le languedocienne, comme l’amé-ricainDell il y a quelques années.

Les succès sont donc tangibles.«L’ambiance générale est porteu-se», préciseunélude l’opposition,carcettedernièrelesaitet lerecon-

naît : elle ne critique générale-ment pas la gestion municipalesur les questions économiques.

Malgré tout, la communicationomniprésente autour de ces suc-cèsfinitparmasquerd’autresréali-tés, moins reluisantes : une villequin’apassuprévoirderocadeilya vingt ans et qui le paie, aujour-d’hui, par des engorgements dan-gereux et quotidiens ; une villedont le développement est freinépar un aéroport modeste et sansgrande desserte internationale ;une ville cherchant toujours despersonnalitésquipourraientobte-nir une auranationale.

Et, surtout, une ville dont ledynamismeneparvientpasàjugu-ler le chômage, qui touchait, autroisième trimestre 2011, 13,6% dela population de l’Hérault, contre9,3% dans l’ensemble de la Francemétropolitaine. p

A.Dy

législatives 20120123

Avec0123du lundi 28mai au vendredi 8 juin Lille

Une nouvelle génération de candidatsEnquête, analyse, reportage

Demain avec Le Monde daté 30mai

Série spéciale - 2 pages

Les clés du vote dansles grandes villes de France

Alain Jamet (à gauche) avecMarine Le Pen, au défilé du 1er-Mai, à Paris, en 2011. Ce vieux compagnonde route de Jean-Marie Le Pen a participé à la fondation du FN en 1972. VINCENT BOISOT/RIVA PRESS

«Marineetmoi, ilafalluqu’ons’impose

nonseulementauprèsdesélecteurs,maisaussiauprèsdenospères!»

France Jametcandidate FN dans la7e

circonscription

LesJamet, l’autrefamillerégnanteduFrontnationalAlain, lepère, France, la fille etGuillaumeVouzellaud, le compagnonde la fille: cesprochesdesLePenont lamainmisesur la fédérationde l’Hérault

V illepiniste parmi les ville-pinistes, Jean-PierreGrandbrigueun troisièmeman-

dat de députédans la 3ecircons-criptionde l’Hérault (nord-est dudépartement).M.Grandporterales couleurs de l’UMP, au granddamdes caciques de la droitelocale, qui ne lui pardonnent passes sorties répétées contreNico-las Sarkozy et la précédentemajo-rité.

Audiapasonde la gauche, ilavait dénoncé en 2010 les déman-tèlementsde campsdeRoms, fus-tigeantdes «méthodesqui rappel-lent les rafles pendant la guerre».Fin 2011, à l’approchede l’électionprésidentielle, il conseillait àNicolas Sarkozyd’envisagerune«sortie honorable» afind’éviterunedéfaite annoncée.

Un temps suspendude l’UMP,M.Grandapourtant été investipar le parti pour ces élections. «Ilanouédebonnes relationsavectout lemondedans le coin, ilgagneraavecou sans l’inves-titure. Alors, le parti a été raison-nable et a faitminede lui pardon-ner le passé,même si les rancœursà son encontre sont tenaces et quecelapourrait rapporter des voix àAlainBerthet [divers droite], quiseprésente contre lui», expli-que-t-onenprivé à l’UMP.

Celui qui sedit habitépar de«bonnes ondes chabanistes» – ilparticipa à la campagneprésiden-tielle de JacquesChaban-Delmasen 1974 –n’entendpasmodifierd’un iota sa critiquede la droitisa-tionde l’UMP. «Le discoursdroi-

tierde l’UMPva conduireaudésas-tre. Chaque fois que l’on va sur lesterres du FN, on renforce le FN,c’est une évidence. Si on veut le fai-re reculer, il faut agir sur le loge-ment, sur l’emploi, sur la sécuri-té», tonne le député sortant. Avec17,58%des voix, sur son terrain,le 22avril,Marine LePena réalisélàunede sesplusmauvaisesper-formancesdans la région.

«A la pêche»PourArnaud Julien, chef de

filede l’UMPdans l’Hérault, l’ana-lyse est à l’exact opposé.«Sansdiscoursdroitier, vouspouvezaller à la pêche. Le type dedroite,dans le Sud, qui fait discours sur lesocial, il ne serapas élu», expli-queM.Julien, qui porte les cou-leursde l’UMPdans la 8ecircons-criptionde l’Hérault.M.Grandentendprouver le contraire, enrassemblant le «noyau raisonna-ble de l’UMP».

La candidatePS qui l’affronte-ra, FannyDombre-Coste, veutcroirequ’elle bénéficierade ladynamiquede la victoirede Fran-çoisHollandeà la présidentielleet du serviceminimumde l’UMPpour soutenir son candidat.«Jean-PierreGrand est très isolédans sa propre famille; les élec-teursne savent plus où il se posi-tionnepolitiquement»,note-t-elle. EtMmeDombre-Costede conclure: «Le problèmedeJean-PierreGrand, c’est qu’il seratoujoursdans l’opposition, quelleque soit lamajorité.» p

Jo. P. (àMontpellier)

Lacommunicationomniprésenteautourdessuccèsmasqued’autresréalités,

moinsreluisantes:chômage,bouchons…

Une forte pression démographiqueNOMBRE D’HABITANTS DANS L’AGGLOMÉRATIONDE MONTPELLIER À L’HORIZON 2030*En milliers d’habitants

TAUXDE CHÔMAGE DE L’HÉRAULT COMPARÉÀ CELUI DE LA FRANCE MÉTROPOLITAINEen%

SOURCE : INSEE* selon un scénario basé sur le maintien des tendances démographiques passées (espérance de vie, fécondité, migrations)

320

360

400

440

480

1990 2010 2020 20301999

Projeté

Hérault

Observé 6

8

10

12

14

2006T1

2008T1

2010T1

2011T3

Hérault

FrancemétropolitaineProjetéObservé

472 13,6

9,3

Unevilleattractive…quin’hésitepasàlefairesavoirMontpellieraété retenuepar le«NewYorkTimes»parmi les45sitesdumondeàvisiteren2012

170123Mardi 29mai 2012