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CAHIERS POUR UNE MORALE GA LLI MA,R D

Cahiers pour une morale

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  1. 1. CAHIERS POUR UNE MORALE GA LLI MA,R D
  2. 2. n a t tir de l'dition originale de cet ouvrage trente-huit exemplai res sur verg blanc de Hollande Van Gelder numrots de 1 38 et cinquante-huit exemplaires sur vlin d'Arches Arjomari-Prioux numrots de 39 96. ditions Gallimard, 1983.
  3. 3. Sartre a toujours souhait que les textes philosophiques inachevs de sa maturit ne soient publis qu'aprs sa mort.: ns reprsente ront ce que, un moment donn, j'ai voulu faire et que j'ai renonc terminer, et c'est dfinitif. Tandis que, tant que je suis vivant..., ilreste une possibilit que je les reprenne ou que je dise en quelques mots ce que je voulais en faire. Publis aprs ma mort, ces textes restent inachevs, tels qu'ils sont, obscurs, puisque j'y formule des ides qui ne sont pas toutes dveloppes. Ce sera au lecteur d'interprter o elles auraient pu me mener (J.-P. Sartre, Situations X, 1975). C'est en 1947 et 1948 que ces Cahiers pour une morale ont t crits. Dans la conclusion de L'Etre et le Nant (1943), l'auteur annonait qu'il consacrerait un prochain ouvrage au problme moral. L'ontologie, crivait-il, ne saurait formuler elle-mme des prescriptions morales. Elle s'occupe uniquement de ce qui est, et il n'est pas possible de tirer des impratifs de ses indicatifs. Elle laisse entrevoir cependant ce que sera unethiquequiprendra sesresponsa bilits en face d'une ralit humaine en situation. Le projet de fonder une morale est cependant antrieur L'Etre et le Nant: Sartre tait dj trs engag dans cette recherche en 1939 (voir ses Carnets de la drle de guerre). Les textes que nous publions ici m'ont paru former un ensemble. L'auteur les a intituls lui-mme Notes pour la Morale, Tome 1 et Tome II. Le deuxime cahier (" Tome II ) n'a t utilis qu' moiti, ce qui donne penser qu'il y a bien eu rupture d'une continuit, mme si le projet n'tait pas pour autant abandonn On trouvera galement deux appendices. Le premier est un texte de 1945, crit sur de grandes pages volantes plies en deux, incomplet ou abandonn, intitul Bien et subjectivit ; il se prsente comme un 7
  4. 4. dbut de journal, deux fois dat. Le second est une tude sur l'oppression des Noirs aux Etats-Unis, que Sartre avait sans doute l'intention d'incorporer sa Morale. Ces Notes , bien qu'crites au courant de laplumeet non relues, sont un peu plus que des notes; elles ont un fil et sont souvent plus qu' demi rdiges. Mais elles n'ontpas de structure : l'index, qui ne se prtend pas exhaustif, a pour but de compenser un peu cette absence, en suggrant quelques contours. Arlette Elkam-Sartre
  5. 5. CAHIER 1
  6. 6. Tant qu'on croit en Dieu il est loisible de faire le Bien POUR tre moral. La moralit devient un certain mode d'tre ontologique et mme mtaphysique auquel il nous faut atteindre. Et comme il s'agit d'tre moral aux yeux de Dieu, pour le louer, pour l'aider dans sa cration, la subordination du faire l'tre est lgitime. Car en pratiquant la charit nous ne servons gue les hommes, mais en. tant charitable nous. servons Dieu. L'tre suprieur auquel 'nous atteignons est encore un tre-pour-autrui. De l ce que j'appellerai un individualisme ontologique du chrtien. Il s'enri chit et se pare, il devient une belle maison, spacieuse et bien meuble la maison de Dieu. Il est lgitime d'tre le plus beau, le meilleur possible. L'gosme du Saint est sanctionn. Mais que Dieu meure et le Saint n'est plus qu'un goste: quoi sert qu'Hait l'me belle, qu'il soit beau sinon lui-mme? A ce moment la maxime faire la moralit pour tre moral est empoisonne. De mme faire la moralit pour faire la moralit. Il faut que la moralit se dpasse vers un but qui n'est pas elle. Donner boire celui qui a soif non pour donner boire ni pour tre bon mais pour supprimer la soif. La moralit se supprime en se posant, elle se pose en se supprimant. Elle doit tre choix du monde, non de soi. Problme je me dfie de la moralit immdiate, il y entre trop de mauvaise foi, toutes les tideurs de l'ignorance. Mais du moins elle a ce caractre essentiel de la moralit la spontanit, la subordination l'objet. La moralit est l'inessentiel parce que subjectivit; l'objet est l'essentiel. La rflexion supprime la mau vaise foi et l'ignorance, mais l'objet passe au rang d'inessentiel (comme au point de vue de la connaissance: cogito), d'apparence. Solution: tre la fois dehors et dedans. Est-ce possible? 11
  7. 7. Si tu cherches l'authenticit pour l'authenticit, tu n'es plus authentique. La moralit: conversion permanente. Au sens de Trotsky: rvolution permanente. Les bonneshabitudes: elles ne sont jamais bonnes, parce qu'elles sont habitudes. Type de la morale substantialiste: Jouhandeau, Algbre des valeurs morales: Ce qui importe c'est d'tre dans un certain tat. Ce qu'on fait n'a d'importance que pour les autres. Jouhandeau, ibid., 61 : Certains observent de loin en eux-mmes les phnomnes de la vie comme s'ils leur taient personnellement trangers. A leurs propres dsirs, ils assistent comme un vnement d'ordre universel. De l leur partialit, leur intransigeance envers le pch seul; ils pardonnent tout la vertu. et ibid., 60 : Les pcheurs ont leur honneur, leurs exigences de pcheur et, hors la loi, il y a une loi du pch, loi spontane, fugace, relative, d'autant plus proche de la vie. Ide d'une adquation avec soi, d'une solidarit avec soi: l'universel manque la signification du pch et la vie. Il faut tre moral du dedans de son dsir et non du dehors. Mais d'autre part y aura-t-il moralit sans l'universel? Nous retrouvons le dilemme dehors-dedans. Il n'y a pas de Vertu, il y a des vertus. Contre cette illusion de l'esprit de srieux, faire voir avec Jouhandeau la dialectique des vertus et des vices, chacune appelant l'autre et passant dans l'autre. Dehors-dedans: que la rflexion tienne la spontanit entre parenthses, en suspens, sans lui ter sa force affirmative, comme rn0x'TJ 1 phnomnologique o la rflexion non complice n'empche pas une seconde d'affirmer dans l'attitude naturelle la ralit du monde. La base uruque de la vie morale doit tre laspontanit. c'est- dire l'immdiat, l'irrflchi. L'origine de la rflexion est un effort de rcupration du Pour-soi par soi-mme, pour arriver un Pour-soi qui soit Soi. Il convient donc que la rflexion ait pour but direct et essentiel le Pour-soi irrflchi. Rien n'est important pour elle que le Pour-soi. Dans la 1. Voir en fin de volume, page 595, la traduction des termes grecs (N.d.B.). 12
  8. 8. rfIicmmorille complice, ce qui imp9rte c'est l'tremoI'A 'i#lchi. Il sagit de vouloir le Bien (dans l'irrflexiqn) pour tr mor.al. La modification en rflexion pure peut-elle. modifier ce pqint de vue? : . .., J'O.: J'ai montr comment une rflexion complice tait possible partir. de, l'irrflchi 1. : A:prsent. je .doisi montrer.cottlment.une rflexion; pure est,possible, partir-de lairfIexion impure. U:ne sagitpas de montrercommeilt larflexion'puresortdela tflexion impure mais comment elle en peut sortir. Sinon.nous aurions affaire une dialectique, non une morale. De la mme faon d'ailleurs le passage de !':irrflexion la rflexion'est urt drame libre de la personne.: ' " ;'"'' 'je; ", '. : '.,; Le fait que le choix dans l'immdiat est la plupai1du tempsl: , Ils me disent : il faut bien que vous expliquiez la naturecar ily' hez vous une nature qui est l'inauthenticit. Le fait mme que L'tre et le Nant est une ontologie d'avant la conversioilsuppose qu'une conversion est ncessaire et, par consquent, qu'il y a une attitude naturelle. Comment donc expliquez-vous la nature, puis:: que l'homme est libre? Je ne nie pas qu'il y ait une nature, c'est-; dire qu'on commence par la fuite et l'inauthentique. Mais la ques tiori' eSt de savoir si cette nature est universelle ou historiqUe. Il y a, il'y a eu, il y aura un nombre fini d'hommes et le drame s'est jou t se jouera entre ces hommes-l. Le systme est parfaitement clos'el c'est l'Histoire. Ainsi lorsque je considre que les objections faites u lV" sicle av. J.-C. Platon et celles que l'on fait aujourd'hui {'existentialisme n'ont pas chang, n'atteignent jamais la philosOl phie particulire mais simplement le droit de'conversion, je peux l'interprter sans doute comme une nature universelle de l'homme. Mais aussi, comme Pascal, comme sa chute originelle, c'est--dire tomme un vnement historique qui est l'tablissement d'uri socit. La nature serait le fait historique que les hommes aient uri nature, que l'humanit en choisissant l'oppression pour dbut d !ibn histoire ait choisi de commencer par la nature. En ce seris l tve perptuel de l'antiphysis serait justementla possibilit histt:>rP qUe etperptuellement utopique de l'autre choix. La nature c'est le choix de soi-mme en face de la libert oppressive des autres. , ), Pas de caractres dans l'Apocalypse. On y est 'totijoui'S surpris: je ne le croyais pas capable de cela. Le caractre est ,. '1; Cf.. Appendice 1 (N,d.E.). , 2. Il se peut qu'une page manque ou que Sartre ait omis de barrer la phrase ommence (N.d.B.). 13
  9. 9. l'ensemble stable des relations avec l'autre, avec les instruments et avec le monde, sous la pression des liberts extrieures. S'il est stable c'est que la pression reste constante et que les institutions sont stables. Le caractre est le produit d'une socit institution nelle et traditionaliste. Le caractre, c'est--dire la nature. L'ontologie existentialiste est elle-mme historique. Il y a vne ment premier, c'est--dire l'apparition du Pour-soi par nantisa tion de l'tre. La morale doit tre historique, c'est--dire trouver l'universel dans l'Histoire et le ressaisir dans l'Histoire. Tant d'hommes, tant de chaises, tant de maisons: un nombre fini. Nous pensons l'homme, srie infinie. C'est, dira-t-on, que nous considrons la srie concrte et finie des hommes rels comme un cas particulier de la srie infinie des hommes possibles. Mais le possible vient de l'homme concret. Nous sommes tels que le possible se possibilise partir de nous. Ainsi, bien que le possible et, donc, l'universel soit une structure ncessaire de l'action, il faut revenir au drame individuel de la srie finie Humanit lorsqu'il s'agit des buts profonds de l'existence. A la source finie et historique des possibles. A cette socit-ci. La morale est une entreprise individuelle, subjective et historique. A qui s'adresse l'exigence morale? A l'universel abstrait? Mais elle perd tout sens et devient abstraite elle-mme, et formelle; puisque la situation concrte, c'est--dire sociale, peut changer. Si l'on dit: agis de telle ou telle faon, toutes choses gales d'aillurs, l'exigence perd tout sens car elle se rfre au retour ternel. Problme de la collaboration ou rsistance : voil un choix moral concret. Le kantisme ne nous apprend rien ce sujet. Il faut: un certain dveloppement de l'ide de patrie - une certaine liaison de l'idologie politico-sociale l'idologie nationale, etc. J'exige d'un Franais qu'il refuse la collaboration en 1940. Je suis beaucoup moins sr lorsqu'il s'agit d'un noble du XVIIIe sicle: l'ide de patrie est incertaine et le noble en somme est fidle un rgime de droit divin, que des hommes qui il n'accorde pas le droit de produire un gouvernement (puisque c'est cela justement qui est en question) viennent de renverser. Et si nous supposons une guerre russo-amricaine et la France de nouveau envahie, la solution que j'ai choisie en 1940 n'est dj plus valable, puisqu'elle supposait une minorit de collaborateurs au lieu que dans ce conflit c'est toute une moiti de la population qui se rangera d'un ct ou de l'autre. En vrit nous choisissons l'universel concret. C'est--dire l'ensemble des hommes qui se trouvent dans la mme situation historique. Et nous exigeons de l'historien qu'en se replaant par la pense synthtique dans notre situation (c'est--dire, en somme, en 14
  10. 10. reprenant l'ide) et en pousant le mouvement de l'Histoire, il approuve nos principes. Dvelopper la notion d'universel concret: la morale sera d'au tant plus large et plus profonde qu'ils'agira d'un groupe plus large. Au xvue sicle: l'honnte homme. Petit groupe de privilgis. Peu,t on sortir de sa classe? Il faut, vrai dire, crer l'universel concret. Vers une morale concrte (synthse de l'universel et de l'histo rique). Dissocier l'universel (comprhension) de son extension infinie. Ex. de caractre rsultant de l'ensemble social: ignorance appelle colre (au sens de : rsoudre par la magie les conflits dont le sens rationnel chappe. Absence de colre: trouver une solution adapte. Mais si la solution adapte est hors de porte par situation?). Colre conjugale: infriorit de la femme. L'homme ne peut pas trouver l'exigence profonde de la femme et s'irrite, etc. Ou colre-intimidation du chef. L'enfance comme cration de situations insolubles. Nous ne voulons pas comprendre le monde, nous volons le changer. " Et l'ide de la philosophie se ralisant. La philosophie ne se distingue pas de l'homme en train de changer le monde. La totalit de l'homme en acte c'est la philosophie. Penseurs tough (Heidegger) et penseurs mous (Jaspers). Ne vous attendez pas une morale pleine d'esprance. Les hommes sont ignobles. Il faut les aimer pour ce qu'ils pourraient tre, non pour ce qu'ils sont. Esquisse d'une morale tough. Plan : 1) Absurdit et ncessit d'une morale. 2) Immoralit de la morale : les valeurs conues comme objecti vit. Abstraction et formalisme : l'universel. Morale de la faute et faute de la morle. Oscillation entre morale de l'intriorit (au bout: gratuit, valeurs transformes en gots) et morale du transcendant (au bout : l'homme connatle Bien. Le connatre c'est le faire). Oscillation entre morale subjective (l'intention coupe de l'acte) et morale objective (les rsultats coups de l'intention). 3) De la faute originelle : l'objectivit comme signe de l'oppres sion et comme oppression. L'objectivit = le monde vu par un autre 15
  11. 11. qui en tient la cl. Les valeurs dans l'esprit de srieux : id. Les valeurs ne sont pas des En-soi'platoniciens pour l'esprit de srieux; Elles sont poses par une conscience qui n'est pas la mienne, et qui m'opprime. La nature en moi c'est moi-mme en tant qu'objecti vit transcende pour l'autre. Il va de soi que je ne peux jamais vivre ma nature. Ainsi l'autre me transforme en objectivit en m'opprimant et ma situation premire est d'avoir un destin-natllre et d'tre devant des valeurs objectives. Il va de soi qu'une c,onversion est possible en thorie mais elle impliquera non seule ment un changement intrieur de moi mais un changement rel de l'autre. En l'absence de ce changement historique, il n'y a pas de conversion morale absolue. Comme le refus de la guerre ne supprime pas la guerre pour autant. 4) Position privilgie du moraliste: Il est un personnage historjr que. Celui que sa position historique loigne le plus des opprims et des oppresseurs. Cependant oppresseur encore et opprim suffi samment pour concevoir la ncessit d'une morale sans oppres sion, donc pour concevoir la conversion. On ne peut pas faire la conversion seul. Autrement dit la morale n'est possible que si tout le monde est moral. Mthode : les valeurs rvlent la libert en mme temps qu'elles l;alinent. Une classification des valeurs doit conduire la libert. Classer les valeurs dans un ordre tel que la libert y paraisse de plus en plus. Au sommet: gnrosit. La communication n'est pas : elle est faire. De mme que chez un antismite vous ne pouvez pas imaginer une loyaut partielle. De mme dans un univers de violence vous ne pouvez concevoir un amour pur. A moins que dans cet amour ne soit contenue la volont de faire cesser l'univers de violence. La communication entre deux person nes passe par l'univers entier. La communication: l'Amour, avoir l'autre en soi. Sentir sa proprelibert propos de chaque geste de l'autre comme dpart et commencement absolu du geste de l'autre. Mais nepas oublier que le rapport avec autrui est toujours en prsence du tiers et sous le signe de l'oppression. Empoisonn. Autre forme de communication: L'appel. 16
  12. 12. ,;..Vautre: totalit dtotalise. Les deux erreurs:.chercher.ruJlit (substantialisme de l'esprit, fascisme) - chercher la pluralit (individualisme). En fait: il faut vouloir la totalit dtotalise. Avoir l'autre en soi comme autre et pourtant comme source libre de mes actes. :.'." -:: La conversion: la reconnaissance de moi-mme comme Pour-soi ek.statique entrane la reconnaissance de l'esprit comme totalit dtotalise. De l'objectivit: mes ides et mes actes passent l'objectif et j'en suis responsable; Dans le rgne des fins: pas de problme. Car si des liberts se voulant libres reconnaissent mon acte comme issu de ma libert et le reprennent en libert, je .veux lafois monacte avec ma libert et la leur. L'objectivit disparat. Mon. acte n ' a cette troublante objectivit que parce qu'il est repris par des consciences qui en font un objet et qui se font objet par rapport lui. J'en suis responsable parce que je ne peux pas ignorer qu'ilsera ainsi dot d'une pseudo-causalit. Ex. : le scandale d'un livre de Miller. Il influencera les enfants, etc. Ambigut de cette responsa bilit: en un sens elle ne devrait pas tre (puisque les gens sont libres), en un autre sens, il est normal qu'elle soit dans notre socit. 5) Analyse d'un exemple. Le chef et ses valeurs. Aprs la dialectique du matre et de l'esclave, dialectique du chef et des subordonns. Le subordonn conu comme libert inessentielle. Oscillation entre la tche et le caprice du chef. La tche (patrie) comme jstification du caprice. Rsultat: des liberts qui se considrent elles-mmes comme inessentielles - complices .du chef. Et pourtant dans la socit actuelle, il faut des chefs.Donc... - le chef comme ralisme de la transcendance. Par-del les liberts inessentielles, il dcide. Et une grce mystrieuse fait de sa dcision l'essentiel. 6) Le Mal. Ou l'objectivit subjective. Essai pour expliquer le Mal. Le Mal toujours objet. Toujours marginal par rapport la volont. Le mal: objectivit subjective ou objectivation de la subjectivit. . Faute n'est pas caprice. L'acte historique par quoi l'tre se nantise en Pour-soi est chute et souvenir du Paradis Perdu. Mythe de la faute dans toutes les religions et le folklore. Il ne faut ici voir ni une ncessit dialectique comme chez Hegel, o la premire
  13. 13. relation individuelle est ncessairement celle du matre et de l'esclave, ni un caprice totalement incomprhensible. Mais une faute originelle qu'on peut clairerpar la considration de l'vne ment originel. L'apparition du Pour-soi est proprement parler l'irruption de l'Histoire dans le monde. Le mouvement spontan du Pour-soi comme manque (sur le plan irrflchi) est de chercher l'En-soi-Pour-soi. La rflexion surgit originellement comme com plice puisqu'elle est une nouvelle cration diasporique comme essai de rcupration. Mais par l mme, on le sait, il se manque. Donc surgit ici la possibilit de la rflexion pure comme constata tion du manque et prise de position en face du manque. Si donc la rflexion pure, ncessairement postrieure la rflexion impure, est rendue possible par l'avnement de la rflexion impure, pourquoi n'est-elle pas opre au moins la moiti du temps? C'est qu'ici un autre lment intervient qui est l'Autre. Je laisse indcid s'il s'agit d'un effort nouveau de dcollement. On peut en tout cas se servir de a comme mythe: le nouvel effort de rcupration prsente la conscience non plus comme quasi-objet mais comme objet. D'o scission complte. A ce moment, tout se passe comme si l'Autre tait une seconde nantisation opre sur ma subjectivit par une subjectivit dont le sens profond est d'exister comme ngation objectivante de ma subjectivit. C'est la faute originelle. Car, au moment o la rflexion pure intervient, il est dj trop tard: elle peut bien dissiper le caractre de quasi-objet que je possde pour ma rflexion impure, mais non pas celui d'objet que j'ai pour l'autre. Ainsi ne sera-t-elle jamais totalement efficiente. Et dans la rflexion pure il y a dj appel transformer l'autre en pure subjectivit libre, pour que la scission soit supprime. Seulement il faudrait que l'autre en fit autant, ce qui n'est jamais donn et ne peut tre que le rsultat du hasard. Car sa mauvaise volont est pour moi destin et sa bonne volont hasard, puisqu'il est libre. Noter que l'autre est par rapport ma subjectivit irrflchie dans la position exacte de moi-mme comme rflexion. Et qu'il n'a jamais de lumire directe sur ma rflexion - pas plus que ma rflexion qui est elle-mme conscience non-thtique de soi. Les motivations: 1 La rflexion est d'abord impure non en ses rsultats mais en son intention, qui participe de l'impuret de l'irrflchi, puisqu'elle prend naissance dans l'irrflexion. 2 La rflexion impure est motivation pour la rflexion pure. Elle est originellement mauvaise foi parce qu'elle ne veut pas voir son chec. Mais seule la mauvaise foi peut tre l'origine de la bonne foi. La rflexion pure est bonne foi et comme telle appel la bonne foi de l'autre. 18
  14. 14. Atmosphre de la morale : 1 Echec. 2 Mystre. Il ne faut pas le prendre religieusement. Mais il est de fait que rien n'est lucid. Le monde se donne non seulement comme changer mais dcouvrir. A dcouvrir quand il est chang. Et le plus profond du mystre c'est que c'est peut-tre nous qui le crons. En un mot: il s'agit d'tre moral dans l'ignorance. C'est pourquoi la morale intellectualiste a raison et tort: bien sr le savoir aide la morale (il est souhaitable que le savoir ne soit plus pour personne du sicle ignorance) mais il ne fait que reculer le mystre: comme le savoir absolu est impossible, il faut concevoir la morale comme s'accomplissant par principe dans l'ignorance. L'optimisme: considrer que la morale est l'est; naturelle de l'homme. Et qu'une attitude morale est toujours possible. Le pessimisme: considrer la morale comme parfaitement impossi ble. A la vrit, originellement la morale a lieu dans une atmo sphre d'chec. Elle doit chouer parce qu'il est toujours trop tard ou trop tt pour elle. Mais c'est dans et par cet chec que chacun de nous doit prendre ses responsabilits morales. Le passage la rflexion pure doit provoquer une transforma tion: de la relation au corps. Acceptation et revendication de la contingence. La contingence conue comme une chance. de la relation au monde. Eclairement de l'tre en soi. Notre tche: faire exister de l'tre. Vritable sens de l'En-soi-pour-soi. de la relation avec moi-mme. La subjectivit conue comme l'absence du Moi. Puisque le Moi est est; (psych). de la relation avec autrui. Nous pouvons renvoyer galement la morale du Transcendant et celle de l'intriorit. La premire fait des valeurs des objets et nous soumet l'objectivit. L'intriorit nous transforme nous-mmes en objets et refuse les valeurs-objets de la transcendance; mais elle fait de chaque valeur particulire un got et ce got est une disposition subjective de l'objet, dont il n'est pas responsable. Des gots on ne discute pas. Mais les voil aussi bien crits dans la Nature que les valeurs-objets l'taient au ciel. Il n'y a pas de sensible diffrence. C'est que refuser la transcendance-objet des valeurs ne doit pas nous empcher de les voir comme des exigences que nous avons tre et dont nous sommes responsables. Le monde rsiste la morale comme la Nature la science. Il faudrait parler d'un immoral cach du monde comme d'un irrationnel cach de la nature. Les situations sont originellement 19
  15. 15. insolubles. Elles le sont cause de l'Autre. En chaque cas invention d'une solution morale comme d'une hypothse scientifique qui rejette plus tard l'clatement du conflit. . Exemple du subjectif objectiv: l'ide. Subjective en ce qu'elle estpermable notre esprit et que nous pouvons la reprendre la racine et en reprendre le mouvement. Objective en ce qu'elle est dj yue du dehors. L'installer en nous, la reprendre, c'est installer l'objectif en nous, c'est nous objectiver au sein de notre subjectivit cratrice. La morale aujourd'hui doit tre socialiste rvolutionnaire. Le mouvement historique: deux caractres: toute ide est reprise par des consciences libres - toute ide devient chose. Action trs particulire du subjectif-objectiv. Une ide reprise par la gnration suivante est dforme mais reste subjective. Elle est motivation. Mais du coup, transcende par ses adversaires, elle devient objet et agit par causalit. Ainsi l'ide a une double efficience. D'o la mauvaise foi qui s'installe entre les deux. En tant que causalit, l'ide va au plus simple, au plus bas, par la lourdeur du dterminisme, l'extrme: jusqu'au bout travers l'Histoire, pendant qu'elle s'affine et se spiritualise en tant que subjectivit. La tentation de l'objectivit: Spinoza et les staliniens : tout objectiver pour supprimer la conscience de l'autre et finalement la sienne propre. L'conomique peut se rduire la ncessit de manger: qu'est ce que manger du point de vue du corps subjectif? Nous avons dans la tte des penses de pierre ( demi). Ce ne sont pas elles qui nous aideront nous dlivrer. Etre comme tout le monde - n'tre comme personne: renvoyer dos dos. Le dfaut est dans le verbe tre. L'ide ou la ruse de la mauvaise foi. On n'adoptepas une ide: on s'y coule. Attendu que l'ide n'est pas une bille qu'on met dans un sac mais un immense complexe de penses, d'actes et de senti ments, une hypothque sur mon avenir et un clairement de mon pass. L'ide apparat d'abord au loin comme objet: c'est le socialisme, l'idalisme, etc. Mais cette apparence disparat lors qu'on approche l'ide; le glacis objectif qui la dfendait s'ouvre, ds que nous faisons l'effort de nous placer son cur et de refaire les dmarches essentielles. A ce moment l'ide redevient projet liubjectif; mon projet en libert. Je deviens l'ide. Seulement du
  16. 16. m.mc::cpuPI:lle .st ref!me,sur moi; elle't objetiy(t,p,Qur les autres; elle a un aspect d'n-soi : consistance, permanence, corporit. Du coup je suis caractris par l'ide. Je deviens un communiste, un socialiste. L'ide a deux couches d'objectivit; . l'objectivit dans l'immanence,c'est-dire qu'elle;n!est pas seule ment pense et vcue par moi mais pense et vcue pard!autrs L'erreur est de croire que l'ide unifie. Bien sr. Mais il y a deux mouvements: penser une mme ide unifie plusieurs hommes: Mais rciproquement: qu'une pluralit pense lide en inme temps la pluralise, c'est--dire qu'elle offre desdehors'celuiqui est dedans en tant qu'un autre la pense. Miroitemenfde:J!idequi est la fois ma subjectivit et l'objectivit. Miroitement 'de l'ide entre l'En-soi et le Pour-soi. Quand elle est tout entire pour-soi elle est moi, quand elle est tout entire en soi elle est moimme objet pour moi ou au contraire le non-moi absolu, selon qu'elle m'entrane ou non dans son extriorisation. Mais en outre l'ide a une deuxime couche d'extriorit: ce qu'elle est pOUr les autres qui ne la partagent pas, adversaires, nophytes, indiffrents. Ace niveau l'ide est tout fait chose puisqu'elle est opaque. On l'observe du dehors, on refuse de faire l'effort d'y entrer. On l'explique par le dterminisme psychologique.. Ou bientout;au contraire (ou tout la fois) elle est respectable. Faute de saisir l lien profond de ses lments qui est projet, elle va de pls en plus vers la nature qui est extriorit pure, il y a juxtaposition des lments. Ainsi me donn-je en me coulant dans l'ide 'une carapace d'extriorit. Je deviens un communiste, un idaHsie.;Ot en beaucoup de cas, ce qui me tente c'est d'tre un socialiste, c'est--dire d'tre fig en extriorit pendant que j'aUi j'Ustifica tion intrieure de chercher vivre le socialisme. En-soipbur-si.'A partir de ce moment les traits reco;tns 'd socihsnleCq'J devrais vivre en ttonnant et rinventer, je ls possde parE;L. Le communiste est le hros permanent de notre temps. J)'''st :mon caractre, ma nature. Voir s'il ne peut y avoir communication des subjectivits dqs l'ide. . Valable aussi pour : . , ,"', . la profession et lesdignits(elles ont aussi une intriorit; onjoue des deux) . . " . , les reprsentations collectives (comment elles deviennent valeurs) i l'ie d'homme {ambigut: en,un sens je ne peux PSl,s tre,a"tre chose qu'un homme. En un autr il est difficile d'tre u,n homme )" i, .>
  17. 17. Fausse objectivit, subjectivit profonde de l'humanitde chacun de nous. a) Aucun recul tel que nous puissions juger l'homme avec les yeux du cheval ou de Dieu. b) Mais totalit dtotalise: recul de chacun de nous par rapport l'autre. Il le fige en objet et l'humanit avec lui. Il objective donc son humanit. Mais c'est une objectivit inobserva ble, une objectivit fantme. c) L'ide morale qu'on se fait de ce que doit tre l'homme (communisme, christianisme, etc.) imprgne l'objectivit ainsi vue. Naturellement l'homme devient e;t. En soi-pour-soi. En ralit nous ne pouvons saisir l'humanit comme objet. C'est un fond de subjectivit absolue sur quoi se dterminent nos connaissances. Ignorance comme limite aprioride nos connaissan ces infrahumaines. Je vois ces hommes qui passent : je dis des hommes . Du coup me voil homme. Mais si j'ai objectiv ma subjectivit, du coup j'ai projet toute ma subjectivit sur eux. Remplacer la pseudo-objectivit CI les hommes " par une vrita ble subjectivit collective. Assumer la totalit dtotalise. Nous ne faisons qu'un mais nous sommes cependant inunifiables. Les droits. Explication. Vivre sans droit. Perdre tout espoir de se justifier. Vivre injustifiable. L'enfant est d'abord objet. Nous commenons par tre enfants avant que d'tre hommes , cela veut dire : nous commenons par tre objets. Nous commenons par tre sans possibilits propres. Pris, ports, nous avons l'avenir des autres. Nous sommes pots de fleurs, qu'on sort et rentre. J'ai eu tort de dire tout l'heure injustifiable . Nous ne sommes pas injustifiablesparcequ'il faudrait pour cela un systme de justification o nous n'aurions pas notre place. Ni justifiables, ni injustifiables. Deux extrmes en mme temps : en tant que contingence l'homme est lsans cause ni raison. En tant que projet, il cre la justification de tout systmepartiel mais de ce fait ne peut ( jamais se justifier lui-mme. D'o la ruse de la bonne conscience : on cre un systme partiel dans lequel on entre titre de moyen et on se justifie comme moyen du systme. C'est oublier qu'on est en mme temps le crateur du systme donc qu'on est hors de toute justification en tant que fondement. L'homme fondement injusti fiable de toute justification. 22
  18. 18. L'homme n'importe qu' l'homme. Qu'il y ait des hommes ou non,l'Etre en soi ne s'en porte pas plus mal. Il faut donc vouloir l'homme. Non pas le dcouvrir mais l'inventer. Processus normal: }O L'enfance: objectivit et justification. A partir de l l'enfant, mystifi, se choisit des qualits-objets. 20 L'adolescence: par effondrement des parents, apparition de l'injustifiabilit et du subjectif. Mais souvent c'est trop tard: stratifications, on glisse une autre objectivit. 30 L'homme avec ses couches d'objectivit, ses carapaces. L'homme se veut Dieu ou Nature: oscillations. En gnral les deux la fois. Morale du Chef (aprs Matre-Esclave): rapport fodal d'homme homme. Le subordonn se dcouvre l'inessentiel par rapport au chef qui essentiel. Mais il est justifi par la tche. En tant qu'il accomplit la tche il est universel (interchangeabilit) mais en tant que le regard du chef tombe sur lui et qu'il est reconnu comme accomplissant la tche d'une manire unique il recouvre sa particularit. Le chef de son ct est reconnu et se reconnat comme la source de la morale. Il est donc au-dessus de toute morale. Et par l il serait subjectif et existential, s'il ne jugeait les autres comme inessentiels. En outre, il invente une morale relative et garde comme lointaine justification le but (grandeur de la France, etc.). La transcendance du subordonn lui apparat comme transcendance-objet. Transcendance naturellement limite. L'esclave est justifi (vieux esclaves noirs). Passage de la justification de l'esclave l'injustifiabilit du proltaire. La religion : hypostase de l'Autre qui nous transforme en objet absolu pour une libert qui n'est plus jamais objet. Mais du coup pressentiment de la libert absolue et de l'intriorit en lJtutre. Mais pour viter de retomber dans l'injustifiabilit totale, on suppose que l'Autre est justifi. Sans donner de raison. La religion chrtienne: supposer une humanit-objet, justifie dans son ensemble. Se voir avec les yeux de Dieu. Que le cur de l'homme est creux et plei'n d'ordures. Aux yeux de qui? Ce ne peut tre qu'aux yeux de l'hommeet du point de vue d'une certaine morale. !.:'homme est sOJ.![ce de tout bien et de_ l et se juge au nom au bien e!...dlJ. u'il cr!::Uonc, a priori ni bon ni mauvaIs. ' 23
  19. 19. Il n'y . a pas de morale abstraite. Il n'y a qu'une morale en situation donc concrte. Car la morale abstraite est celle de la bonne conscience. Elle suppose qu'on peut tre moral dans une situation foncirement immorale. La morale est dpassement de cette situation. Mais en la dpassant elle la garde. La morale c'est l'ide qu'on peut tre bon sans changement de la situation, bref, toutes choses gales d'ailleurs . C'est l'ide qu'on peut avoir sa conscience pour soi . La morale est donc dsintrt lorsqu'elle est abstraite. C'est une manire de retirer son pingle du jeu. C'est aussi la supposition que le salut est possible dans l'absolu. La morale c'est la thorie de l'action. Mais l'action est abstraite si elle n'est travail et lutte. Ex. : sauver un enfant qui se noie. Absurde. Les problmes concrets: Luther devait-il abandonner les paysans lors de la guerre des paysans? Chaque peuple se vnre lui-mme dans les dieux qu'il adore, il prend conscience de soi en croyant reconnatre le divin (Kojve, Intr. Hegel). En fait, dialectique avec un terme inexistant. }O Projection de la situation, hypostase de l'Autre sous forme de regard divin 2 Retour du soi hypostasi sur le soi vcu pour le fixer en objet. Donc double reprsentation de la communaut. 2e saloperie: la puissance et l'acte. Une morale doit tre en acte. Distinguer puissance et possibilit. Analyse de l'homme religieux la collectivit (chrtienne) 1rapport soi catgories religieuses au monde la foi comme mauvaise foi le monde comme chiffre confusion du spirituel et de l'impossible utilisation de la transcendance pour la mauvaise foi (un homme est beaucoup plus qu'un homme) contestation du mot par lui-mme. Un tre au-del de l'tre, etc. But: russir dans la 4e dimension. Jaspers et l'chec. Transcendance religieuse: hypostase de l'acte de transcender. Fausse galit des.chrtiens et fausse libert: tous gau" comme esclaves d'un mme matre. Comment y aurait-il libert dans une religion dont le principe est le matre (Seigneur)? Appartenance totale Dieu qui nous a crs. L'me: hypostase en moi de ma transcendance. A la fois mon objectivit et mon au-del en moi. 24
  20. 20. 2 .,omme la situation a volu on noiera le poisson, n ,dira q,! Dieu n'est pas mon matre, qu'il a pour moi un infini respect Il: Mais ce n'est qu'amenuiser la ralit. J'ai ma conscience pour moi. C'est se dsintresser de l'actio pour se rfugier dans le subjectif. Ce qui importe c'est la ralisation de l'acte. L'homme doit tre orgueilleux parce qu'il fait exister de l'tre, L'orgueil c'est la conscience d'tre autonome et crateur. Mais ces, un orgueil qui s'adresse la subjectivit comme telle, non, aux qualits ou EELI;. Car comme les qualits nous sont confres par la socit, par l'autre, et retires par eux, c'est nous mettre sous la dpendance que de les revendiquer. En outre c'est s'insrer dans une srie intensive virtuellement indfinie, donc o nous somme& sr d'avoir un plus que nous. Si je suis fier de ma beautu de ma fqrce, je suis sr en mme temps que, selon toute probabilit, il y a plus beau et plus fort. En tout cas, il y a eu. De l les championnats, instits pour tranquilliser les consciences. Le premier, brevet. ;; Morale de la mdiocrit. Etre mdIocre. L'homme moye P'a,pord l'homme-moyen comme on dit l'homme-fuse. II est'au niveau des moyens. Il se perd exprs dans l'infini des moyens pOUI; ne ,pas,regarder la fin en face. La fin est sous-entendue. En outre il st Victime de la solidification des moyens qui devinnent eU7 lllmes fins. En sorte que la tragdie de la poursuite de l'tref'l tI:ansforme en comdie. L'homme moyen est l'homme le l c;omdie. Epaississement du moyen. Par l'habitude. , et par, la satisfaction d'tre jet dans un procs infini o on ne sea jamajs ell face de l'essentiel. Par pdantisme aussi: l'homme moyen est pdant parce qu'il accorde une importance primordiale aux prfpa ratifs. S'il peint, l'essentiel est le choix du pinceau. Ou ,bien ils masque la fin ou bien elle devient rve ou ide rgulatrice. r;n econd lieu l'homme moyen se veut moyen (mdiocre). C'est--dJ;: qu'il veut tre comme tout le monde,. pour raliser par, lu,i mme l'unit de l'Esprit. Aussi pour l'anonymat des foules. S'il est moyen, il est perdu dans la foule des moyens. Donrien"ne yient JI! toucher qui lui soit destin. Les malheurs sont effets du hasard. Statistiquement improbables. Toujours l'paisseur de la foule avant lui. L'homme moyen est homme statistique. Il refuse le destin. Du coup il voit le monde en moyen. Weltanschauung1 du mdiocre: les objets de qualit moyenne, les spectacles moyens,d. ll;l nature (qualits esthtiques moyennes : douceur, discrtion, etc.). En troisime lieu, il est la fois justifi et inessentiel. Justifi 1 . Voir en fin de volume, page 595, la traduction des termes allemands (N.d.B.).
  21. 21. parce qu'il est un moyen pour atteindre des fins apodictiques (parce qu'elles ne sont jamais remises en question) et inessentiel parce qu'interchangeable avec n'importe quel autre moyen, donc sans responsabilit crasante. Il fait toujours ce que n'importe qui pourrait faire sa place. S'il le fait bien, il est content, cela signifie qu'il est particulier uniquement en ce qu'il ralise mieux que d'autres le rle d'instrument. Ne pas confondre le moyen avec le subordonn . Le subordonn obit avec folie de zle au chef, il se sacrifie, il place 1''U6pt, la particularit, l'angoisse dans le chef. Rapport fodal et concret d'homme homme. L'homme moyen est abstrait et soumis des lois abstraites. Il est toujours subordonn mais il l'est mdiocrement et des mdiocres. Il veut tre toujours entre les extrmes; il veut qu'il y ait toujours au-dessus de lui des suprieurs qui risquent et au-dessous des coupables qu'il puisse juger. Pour tre moyen il a besoin des extrmes. Mais il pense que les extrmes sont des moyens pour qu'il soit moyen. Ainsi finale ment tout tombe dans l'inessentiel. 4 L'homme moyen est un milieu (medium). Sa ralit est statistique. Il sait qu'il est le plus grand nombre, puisqu'il se veut le plus grand nombre. Donc c'est lui qui cre les qualits dominantes de la socit. L'Anglais, le Franais sont des moyens . S'ils parlent entre eux, ils se ttent et se reconnaissent comme moyens. En mme temps il est mdia teur. Pour lui les extrmes se touchent: le chef et le criminel, l'homme de gnie et le fou. Circularit du monde moyen: Carpen tier battu par un garagiste. La paire de sept bat le poker d'as. Le moyen est synthse (se croit synthse) des extrmes. Lauvrire 1 et Edgar Poe. 5 L'homme moyen: classes moyennes. 6 Vertus et morale: rien de trop, on a toujours besoin d'un plus petit que soi. 7 Pense de l'homme moyen: le lieu commun. Sadisme et Masochisme sont la rvlation de l'Autre. Ils n'ont de sens - comme d'ailleurs la lutte des consciences - qu'avant la conversion. Si nous avons assum le fait d'tre libert et objet pour autrui (ex. : le Juif authentique) il n'y a plus aucune raison ontologique de rester sur le plan de la lutte. J'accepte mon tre objet et je le dpasse. Mais il peut rester des raisons historiques (il ne suffit pas que le Juif accepte son tre-objet). Ambivalence de l'Histoire. Ambigut du fait historique 1) L'action historique. Qu'aucun parti ne peut se prsenter comme l'interprte de l'Histoire. La collectivit historique est une totalit dtotalise.Tout agent historique (personne ou groupe) est une partie de cette collectivit. S'il pense l'Histoire, sa reprsenta- 1. Auteur d'une thse sur Edgar Poe (N.d.B.). 26
  22. 22. tion de l'Histoire (idologie) devient un facteur historique. Du coup l'Histoire n'est dj plus ce qu'ils en pensent: elle est cela plus l'action de la reprsentation qu'ils en ont. Mais cette action elle mme est d'un type particulier: elle est par proposition. Mme si les consciences jouent l'inertie elles ne sont pas inertes, on n'agit pas sur elles par causalit. Elles doivent reprendre le thme propos; du coup il sert d'autres fins. Ainsi l'action de la thorie de l'Histoire considre ne peut avoir lieu que dans et par la dformation de la thorie. En un mot toute thorie de l'Histoire est historique. Il n'en serait pas ainsi si l'Esprit tait une totalit totalise parce qu'alors il serait ce qu'il penserait tre (comme dans la conscience de chacun). C'est le mythe hglien. Ainsi suffit il que Hegel fasse le hglianisme pour que nous soyons post hgliens; il suffit que Marx cre la dialectique matrialiste pour que cette dialectique soit joue par des consciences qui du coup sont par-del cette dialectique. Autrement dit : l'Histoire a un sens si l'Esprit est un. Dans la mesure o l'Esprit est totalit ce sens existe, donc il y a direction donc progrs; dans la mesure o il est alin lui-mme par le nant qui le transit (dtotalisation) il n'y a ni direction ni progrs : pitinement. La situation c'est donc une Histoire qui n'est pas Histoire, un progrs pitinant, une explica tion totale par le ncessaire et totaie par le contingent. . 2) A cause de cela, deux attitudes envers l'Histoire:. ceux qui nient sa ralit (Pascal, Alain) et ils ont raison (aussi les plaisante ries anachroniques, le centurion appel juteux pour montrer que rien ne change) - ceux qui affirment son existence (Hegel, Comte, Marx) et ils ont raison aussi. Les philosophes, en gnral, cherchent ou ordonner ces deux aspects : ex. contingence dans les dtails, ncessit dans l'ensemble - ou montrer l'un comme l'apparence et l'autre comme la ralit. De fait ils sont vrais tous les deux, il n'y a pas les hirarchiser. Il faut dcrire et montrer leur ambivalence. 3) Idalit du temps historique - ralit de la temporalit inter subjective. 4) Etre toujours par-del son action historique. Comme l'His toire elle-mme. Celui qui reste dedans est enferm en elle comme dans un cercueil, l'Histoire est dj ailleurs. Rvolution perma nente. 5) Plus l'agent historique choisit pour moyen la violence, le mensonge et le machiavlisme, plus il est efficace. Mais plus il contribue la division, plus il met l'accent sur la dtotalisation; plus il est lui-mme objet en Histoire et plus il dfait l'Histoire (dont l'existence idale serait par totalisation); Le vritable agent 27
  23. 23. historique..est moins efficace mais en traitant les hommes comme lui,mme, il tche faire exister l'Esprit comme unit donc l'Histoire. C'est par lui qu'une Histoire est possible (par l'crivain, le philosophe, le saint, le prophte, le savant). . 6) La politique est la ngation de l'Histoire parce qu'elle suppute sur la division. Elle est donc recommencement. 7) Aspect perptuel de rptition et de nouveaut dans chaque fait. Rptition si on l'isole, nouveaut si on feint l'existence de l'Esprit. Yogi et commissaire nient la ralit: l'un voit l'unit (tat tvam asi), l'autre la diversit. Yogi: appuie sur le mme"Commissaire: sur l'autre. La synthse c'est l'Histoire dshistoricise, la totalit dtotalise, donc le commissaire-yogi. 8) Partons de l'esprit absolu contenant en soi le divers titre de reprsentation. A ce moment rien n'est que ce dont il y a conscience. La loi de l'tre c'est d'tre conscient. L'imagination mme est-elle possible? En outre puisqu'il y a unit (au sens kantien du terme) toute pense est ncessairement lie la pense antrieure: elle est traditionnelle. Soit qu'elle se retourne vers la pense antrieure et qu'elle la S!lisisse par connaissance, soit qu'elle la contienne en elle par immanence. Peut-tre des deux faons la fois. En ce cas il y a histoire. L'Histoire en effet est de l'individuel (l'unit de l'Esprit en fait une personne), elle exclut la rptition: le fait de venir dans l'unit aprs un terme quelconque M implique ncessairement que le terme Ml en soit diffrent mme s'il est trs voisin. L'existence du pass en fait une tradition (le pass repris et agissant). Ce type d'action du pass sur le prsent est intriorit. Enfin, puisqu'il s'agit d'un esprit dcidant, l'Histoire, quels que soient les zigzags de sa libert, est oriente. Il dcide totalement et tout entier. Sa dcision n'agit donc pas sur lui par contrecoup: il est tout entier en elle, tout entier elle; il n'y a pas une partie de lui-mme qui puisse tre influence mcaniquement par sa dcision. Elle est tout entire lui. Ainsi l'avenir est la fois dans la perspective du pass et donnant un sens au pass. A lafinde l'Histoire on peut donner un profil, une courbure d'existence qui est prcisment l'Histoire tout entire; on peut apprcier une quelconque Erlebnis du point de vue de ce qu'elle fut en tant que voulue, en tant que vcue, en tant que reprise et juge et finalement en tant qu'elle apparat aux yeux qui jugent les jugements internes dont elle a fait l'objet. Une dialectique est possible, depuis le surgissement de cet Esprit, donc un progrs. Notons tout de suite cependant: 1 que le jugement sur la totalit close est pris ,en
  24. 24. extri()rit et suppose donc une autre Histoire du,point deV,l,de laquelle on juge cet Esprit, donc qui le contient et qui conteste l'histoire vcue de cet Esprit en la transformant en histoire-objet; 2 que le jugement sur la totalit ouverte est pris en intriorit et d()n, Jlit partie de cette totalit titre,plmeI?-t agisant., mtamorphose donc Je cours de l'Histoire et il peut tre jug)i mme par l'instant postrieur qui d'ailleurs sera modifi,pour lui, Dedans ou dehors: dans l'Histoire vcue le jugement est histori que; dans l'histoire juge du dehors, le jugement est ahistoriqe relativement elle (mais ncessairement historique relativement. un autre systme de rfrence) mais l'Histoire est ,morte.:Remar quons en outre que l'Histoire suppose un lment d'opacit la prvision. La science de l'Histoire tuerait l'Histoire en supprimant le temps. Le temps de l'Esprit (historique) suppose progrs donc mouvement ncessaire ou, tout au moins, orierit.Pour qin vnement soit historique il faut qu'il ait toujours un infini avenit; cause d'une infinit d'interprtations possible. Ha sa profondeur dans la libert c'est--dire dans un avenir non fait. ,Si nous supposons au contraire des individus ou des groupes placs dl'lns des circonstances analogues mais parfaitement isols les uns,ds autres (comme par exemple pouvaient l'tre diffrentes peplad primitives des les de Corail, de l'Australie centrale et de l'Afriqut; quatoriale) chacune de ces peuplades peut avoir une histoire elle mais il n'y a point d'histoire commune. Et si l'identit des circonstances amne des ractions presque semblables, il sera possible d'envisager une loi, donc de passer l'universel. O si pous supposons des civilisations qui paraissent et disparaissent sans liaison, un esprit transcendant, extrieur ces civilisations, pourra mettre au jour des rptitions. Dix fois un dpart sera pris, on mnera une volution jusqu' un certain point puis cataclysme, dluge, etc., et, d'autres hommes sortant de terre; on recommence Ainsi la dispersion engendre la rptition et l'universel (dans le cas le plus favorable). C'est le sens du mythe de l'Atlantide; I,a oncentration implique au contraire l'historicit. Or la ralit n'est ni tout l'un ni tout l'autre: c'est }O le fait que l'homme est en face de l'univers et que, en consquence, certaines de ses ides ou de ses dcisions peuvent tre touffes par l'univers. Autrement dit l'imagination est possible. Et ce qui peut tre touff, ce qui est purement imaginaire n'est pas historique ( moins que l'imagina tion ne soit ralise en tant qu'art). Donc, il existe des moments humains qui chappent l'Histoire. Cependant l'Histoire l ressaisit en tant qu'elle est totalit. Premire ambigut par flcollement du rel et de l conscience. 2 Chaque homme fait avec tous les autres une totalit dtotalise.Donc l'action de Paul au Zambze n'affecte pas ncessairement ' Pierre au Japon. Il y ,a ten,dance l'isolement de actions; il y a un seuil historiqu. Mais
  25. 25. ce seuil est minemment variable. A ce niveau intervient le hasard. Il n'y a hasard en histoire que parce qu'il peut y avoir rencontre, donc absence d'unit. Dans un esprit, le hasard est impossible. Il ne peut y avoir rencontre de deux sries causales parce qu'il n'y a rien que l'unit. 3 L'action historique est ncessairement partielle. Comme ce sont des esprits qui la reprennent, elle est toujours dborde par les deux ailes. Dborde et reprise. Ncessairement pervertie. Donc autre qu'elle-mme. Dans un systme mcanique on peut concevoir que le mouvement communique une partie. Je communique la totalit sans subir d'autres altrations que celles qui sont prvisibles. Ainsi pour obtenir un effet dtermin sur le tout on agira sur la partie ,d'une manire rigoureusement fixe. C'est ce que nous nommerons l'action par incidence. Mais cela suppose l'inertie. Or en un sens l'inertie existe mais joue (fuite, inauthenticit) dans la conscience. Donc en une certaine faon l'action historique est mcanique. Mais d'autre part elle est joue, toujours rvocable et d'ailleurs partielle. Une proclamation de Hitler agit sur les Allemands mcaniquement parce qu'ils se veulent inertes et n'est que proposition pour les opposants et les chefs des autres gouvernements. A ce moment elle devient histori que. Ahistorique en tant qu'elle fait directement l'Histoire, elle devient historique en tant qu'elle est occasion passive pour l'Histoire de se faire. Ainsi est-elle perptuellement dehors et dedans : faisant l'Histoire donc surgissant de la non-Histoire (absolu de la libert, mcanique de l'inertie, ces deux limites- la limite le monde de l'ingnieur, homme en face des choses) et faite par l'Histoire (pure proposition dsarme laquelle les autres donnent sa valeur). 4 L'action historique n'a d'efficacit que si l'ide se fait chose. Pour qu'une ide soit prsente titre de proposition il faut en faire un objet. J'ai montr plus haut que cet objet tait pseudo-objet, la condition qu'on y veuille entrer. Le communisme est pseudo-objet et ide pour les marxistes, il est objet rel pour les non-marxistes. Objet c'est--dire: ralit ext rieure non parfaitement comprhensible, opaque, explique par l'extrieur d'elle-mme (c'est l'aigreur, le complexe d'infriorit qli les rend communistes), combattue par des moyens extrieurs (dispersion, arrestation, massacre des communistes). Elle agit donc perptuellement par double tranchant: toujours en tant qu'ide assimile par des consciences (lment d'unification), en tant qu'objet sur des inerties (facteur de division: le communisme fait peuraux bourgeois, etc.). 5 Cela revient dire que tout homme en tant qu'il est spar (subjectivit) peut prendre sur l'Histoire une vue sparatrice et parler de l'Histoire universelle. Donc reflter et vivre cette histoire. Mais c'est une fausse vision car il faudrait tre transcendant l'homme ou bien tre l'Esprit-un pour juger l'Histoire. Cependant on agit historiquement par vue de l'Histoire. 30
  26. 26. Donc l'Histoire est pseudo-rflexive, perptuel jeu de reflet-refl tant avec nantisation qui fait avancer l'Histoire. Mystre en pleine lumire: l'Histoire est tout entire devant moi et je ne peux pas la juger parce que je suis dedans. 6 En tant qu'il y a toujours sparation d'un moment historique l'autre, d'une nation une autre nation contemporaine, il y a rptition et universel. Je suis X ce qu'un Romain du temps de Csar tait Y. Organes homologues. Je suis Z ce qu'un citoyen anglais est W. En tant que cependant il y a totalit, par rapports rciproques, il n'y a jamais rptition. Tout se passe comme si le nant avait lard la Conscience-Esprit qui est le mythe historique proprement dit. Dans la mesure 6 la totalit se dtermine elle-mme, il y a volution et progrs. Donc progrs pitinant. Toujours des oppri ms : donc proltaire patron comme esclave matre. Et peut tre plus malheureux. Pas d'intimit domestique avec le matre. Recrudescence des suicides, etc. Mais d'autre part progrs : l'es clave est chose, l'homme moderne est seulement alin (libert reconnue mais mystifie). Impossibilit d'apprcier le progrs et pourtantncessit de le poser. 7En tant que l'on considre l'Esprit pure subjectivit, idalisme. Pas de ralit. Il y aussi cela en histoire : en un sens aucun lment matriel n'agit historiquement s'il n'est repris par . des esprits. La peste tue, elle n'est pas historique. Ses consquences le sont : reprise historique d'une nouvelle hirarchie, prix plus grand acord aux proltaires parce que moins nombreux en Angleterre du [XVIIe] sicle. Ncessit de crer une conscience de classe du proltariat. Mais en un autre sens, en tant que les' hommes sont corps et objet, action directe et physiqe (statistiques conomiques, etc.). 9) S'il y a une Histoire c'est celle de Hegel. Il ne peut pas y en avoir d'autre. Mais s'il n'y a qu'une pseudo-Histoire : alors carica ture. A cause de l'unit introuvable. Un des facteurs de l'Histoire (rptition) c'est le rve toujours renouvel de l'unit (Saint Empire, etc.). Mais le rve de l'unit est lui-mme dans la pseudo Histoire titre de facteur de division aussi bien que d'union. Puisque d'autres s'opposent l'unit. 10) L'existentialisme contre l'Histoire par affirmation de l'indi vidualit irrductible de la personne. 11) Action des murs, coutumes, religion, idologie, etc.: bref l'Esprit objectif. Ne pas oublier que toute conscience mme inerte et flottante est en dehors d'eux. 12) Le mythe historique des philosophes (comparer l'humanit une plante : le progrs est le dveloppement de l'ordre) et le mythe 31
  27. 27. historique des historiens (causalit physique de l'instant t sur l'instant tl, rptitions, contingence, l'univers physique). Ni l'un ni l'autre. 13) Si l'humanit tait une totalit, chaque moment de son dveloppement serait relatif aux autres titre de moyen terme, mdiation, etc. Ainsi la souffrance comme moment du dveloppe ment total serait justifie et fondue dans le tout. Mais la sparation des consciences implique ncessairement que la souffrance du sacrifi n'est pas rcuprable. Ainsi le nant qui spare les conscience les unes des autres fait de chaque dtermination de ces consciences un absolu. Il serait facile de montrer, rciproquement, que la joie en quelque moment ou la volont sont des indestructi bles. Prcisment parce qu'ils ne peuvent tre que reprisdu dehors. Ainsi, au sein de l'Histoire, chaque tre historique est en mme temps un absolu ahistorique. Mais inversement l'existence-en liaison de chacun fait de cet absolu un certain point de vue un relatif. Tout d'abord parce qu'il a un dehors et qu'il peut, par le dehors, entrer dans une statistique. Ensuite parce que le dpasse ment du moment est malgr tout - cause de la liaison totalisante .,....- un moyen de progresser. Ainsi tout se passe comme s'il y avait dpassement d'un moment de la conscience universelle par elle mme, avec cette diffrence que justement la dtotalisation impli que l'autonomie du moment par rapport ce qui la dpasse. En un sens il y a dpassement d'un moment vers un autre tat qui le conserve, en fait le dpassement, le moment initial et le moment terminal sont autonomes et la conservation du moment dpass est une pseudo-conservation. Ex.: une rvolution proltarienne peut bien conserver le moment bourgeois en le dpassant. Mais en fait elle conserve seulement les acquisitions bourgeoises car, peut-tre bien que les bourgeois se sont enfuis ou ont t massacrs. Et d'autre part les consciences proltaires sont des surgissements autonomes et frais qui ne sont pas pntrs par l'acquis bourgeois mais qui le reprennent. Ainsi y a-t-il dpassement qui ne dpasse rien, conservation qui n'est pas conservation, absolu-relatif. Et de ce seul fait, une vie commence toujours sans tremplin. Elle surgit au milieu d'une situation absolument neuve et sans user de l'acquis puisqu'en ralit l'acquis fait partie de la situation. Le fusil est certes un acquis par rapport la lutte contre la bte sauvage et intensifie la lutte des hommes entre eux. En tant qu'il existe il n'est pas solution mais danger. Il n'est solution qu'en tant qu'il est perfectionn, qu'il devient invention nouvelle. Le donn est tou jours problmatique. On ne capitalise pas, prcisment parce qu'il n'y a pas un tre pour capitaliser (reconnu par le bon sens sous la forme : l'exprience des autres ne profite jamais). C'est le pitine ment. Cependant les problmes eux-mmes sont autres : il y a en
  28. 28. quelque sqrte non pas progrs vers- Ia.,solution _rqJ.s!pr,ogrs"dq problme. Peut-tre l'Histoire est un problme insoluble mais de mieux en mieux pos. . .14) Le--problme n'estjamais dans les faits : c'estrhomme qui se fait problme historique partir des faits. 15) Histoire : continuit idale . perptuellement brise par le discontinu rel. , ',.', .: 16) Synthse impossible du continu et du discontinu. Faite. et dfaite comme la tapisserie de Pnlope. Progrs constant de M Ml en tant que la gnration M part de M.et progresse jusqu' MI Mouvement rompu par le nant : mort et naissance. A distance d'une mort et d'une naissance, ce qui tait progrs devient situation propose, c'est--dire referme sur soi et problmatique. Pourtant il reste qu'un retour est impossible. . ,,' ! " ';.' 17) Chaque vnement historique a un aspect physique qi l'altre et l'attire du ct du gnral. (Mme une voix, dans un discours : vibration de l'air, qui porte ou ne porte , pas.) Par consquent il y a hasard l'intrieur de chaqu vl1eent historique. Ds lors que j'envoie un message, j'utilise le monde physique. Donc rencontre non synthtique l'intrieur de ce monde de deux sries, l'une non causale et libre, l'autre causale. ; s'il n'y avait pas eu tempte, le messager serait arriv temps pour empcher l'excution. Donc non-signification au cur de la.signifj. cation ou plutt, perptuelle signification qu'il y a une non signification, que tout vnement signifiant est rong par; la non signification : si Staline mourait, rien ne serait .chang. Mais prcisment si : au moins cela que le mythe sovitique s'incarne en Staline et ne s'incarnera plus en personne de la mme mani. Ainsi le mythe historique est concret et il est endangerdemortdans le monde du gnral : 1'Histoire est en danger de mort dans l monde de la non-histoire. 18) La non-histoire dans l'Histoire : la SCISSIOn de fait des consciences, le gnral, la rptition, le hasard comme rencontre', le pluralisme et, en un sens, la libert. . _ -iJ 19) C'est la libert qui fait l'Histoire mais c'est aussi la libert qui fait la non-histoire. . 20) S'il y a Histoire, il y a ralit du temps, Sinon, le temps n'tant qu'illusion, restent les essences. Le temps, mythe platoni cien pour exprimer le rapport entre les essences. Mais si le temps 33
  29. 29. n'est qu'apparence, au moins a-t-H la ralit de l'apparence donc l'tre, il se pose pour soi et il existe absolument. Mais quelles conditions le temps peut-il exister : justement la condition que tout ne soit pas fix d'avance : contingence, libert, au moins partielles. Mais on ne fait pas sa part la libert. Donc tout contingent. 21) La libert constitue l'Histoire en crant la dure concrte et absolue de non-rptition. Mais elle tue l'Histoire en pouvant toujours la nier tout instant par un dcret. Sur quoi elle est reprise par l'Histoire comme assimile et mise en rapport avec le pass dans son caprice mme parelle-mmeet surtout par d'autres liberts. Ceci est vrai mme dans l'hypothse mythique de l'Esprit un. Il ne suffit pas qu'il soit un. Il faut qu'il soit libre dans'sa non libert et non-libre dans sa libert. Il faut la fois qu'il soit imprvisible dans le futur et qu'on retrouve la ncessit dans le pass. D'o le mythe dvelopp par Bergson et tant d'autres mais absurde : ncessit de l'action passe, libert de l'action prsente et future. 22) Ambigut donc du ncessaire (liaison) et du contingent (absolu de temporalit). 23) Ambigut aussi de l'objet historique. Ex. : Beaucoup de boites de La Nouvelle-Orlans ont ferm cause de la haine des Noirs pour les Blancs. Ambigut : la haine, en un sens, pousse jusqu'au bout devient l'essentiel et les gens qui la vivent l'inessen tiel. On parle du mcontentement de 1789 : chaque individu historique surgit sur fond de mcontentement, est charg d'expri mer le mcontentement. Mode par rapport la substance. Serait vrai si l'individu tait rellement un produit d'manation d'une substance spinoziste ou de la conscience hglienne. Mais d'autre part, mcontentement vcu et devient l'inessentiel. Par exemple, pense de l'ennemi des Noirs : les Noirs seraient bien tranquilles si tel meneur particulier ne provoquait leur mcontentement. 24) Pareillement : ambigut de l'objet historique. Fabrice et la bataille de Waterloo. Tout le monde reconnat qu'il y a eu une bataille de Waterloo. Mais qu'est-elle ? 10 Un vnement matrieL Boulets de canon - dpense d'nergie calorifique - mort comme phnomne biologique. 20 Des totalits concrtes : un rgiment. Mais ici une description de l'objet rgiment s'impose. a) C'est une forme institutionnelle. Le rgiment prexiste ses membres, en tant qu'il est pens par des ministres, un chef de gouvernement, l'ennemi. Il est pensalors radicalementcomme objet-ustensile. On le dplace comme un marteau ou une scie, donc on le considre 34
  30. 30. comme passivit pure. A noter qu'il est pens comme rgiment par le ministre de la Guer:re par ex. en tant qu'il est ministre, c'est dire en tant qu'il incarne une institution et en tant qu'il y a un monde institutionnel. [b)] Mais pour qu'il soit dplac comme rgiment, il faut que lui-mme se pense comme rgiment. La liaison ne peut pas s'oprer par une passivit naturelle mais voulue; La passivit naturelle gaillerait le rgiment : plus ou moins de force physique de chaque soldat, etc. Donc chaque soldat doit contribuer crer le rgiment en niant la pluralit relle pour .constituer l'objet idal. Cela implique : 1 que le soldat considre ses camarades comme objets; 2 qu'il fait une synthse de ces objets en un seul objet; 3 qu'il se considre lui-mme comme objet(en quoi il est aid par ses camarades qui justement le considrent comme l'autre) et comme faisant partie du ,tout. Mais en mme temps 'Comme la liaison est insuffisante puisqu'elle serait pure addition, il faut que le rgiment possde une unit subjective : relations de camaraderie, chaque homme est un autre moi-mme. Mais la camaraderie est ici l'inessentiel en ceci que cet autre moi mme est conu en gnral. Toute amiti particulire contribue isoler un lment autonome et [est] donc nuisible. Donc le cama rade c'est moi-mme mais remplaable. J'aime mon voisin travers le rgiment. La camaraderie est le mortier. Ici, naturelle ment, ambigut : c'est vrai en partie. Indiffrence aux morts ; sa propre mort. Si l'on se considre comme l'inessentiel par rapport l'essence, comme la partie structure par le tout, ce qu'on perd vous est rendu : justification. Mais d'autre part, perptuelle ten dance l'isolement par les amitis naturelles ou la subjectivit. Ainsi l'objet rgiment ne peut tre objet que par des subjectivits qui se font objet et qui mettent leur libert imiter l'inertie. C'est l'esprit de corps. 4 Le chef et le symbole. Indispensable. A ce moment d'ailleurs on dote le rgiment d'un moral. Mais le moral est l'inessentiel. Il va de soi, bien sr, que le mauvais moral rend le rgiment un mauvais outil. Mais une science traditionnelle permet de traiter ce moral convenablement. En attendant l'objet est trait comme chose. C'est le premier moment. Lorsqu'on s'en sert, c'est un objet ambigu. Chose toujours : on le porte ici ou l. Mais, d'autre part, unit organique : animal-outil. On le fait donner JO. D'ailleurs variable : peut tre pure passivit (guerre moderne) ou semi-objectivit. De toute faon il fait le mouvement dcid par le gnral mais il le fait plus ou moins bien. Pion sur l'chiquier mais supriorit vitale de certains pions sur d'autres. Donc ambigut : objet la fois matriel, organique et spirituel. Mais ordre invers. Limite d'abord matrielle (pion) puis organique (valeurs vitales) puis spirituelle (moral, esprit de corps). Le spirituel subordonn au matriel : rle du spirituel : donner une cohsion au matriel, l'empcher de s'parpiller. D'autre part curieux objet irrationnel : 35
  31. 31. objet collectif et singulier, fait de parties gnrales et quelconques. La vrit : en tant que je suis totalit organique de cellules, je suis fait de cellules individuelles. Mais on me considre volontiers comme l'assemblage de cellules en gnral. Car si l'on prlve un fragment de cellules, on l'examine comme gnral, non comme particulier. C'est la mme chose pour le rgiment : les hommes meurent, on les remplace, ils prennent le moral du rgiment. Donc analogue la loi physique : l'atome n'a pas d'individualit. En un mot le rgiment est un objet individuel dont les structures secondaires sont gnrales. Mais jusqu' un certain point seule ment : mal nourri, ou vaincu, il explose en individualits. La crainte perptuelle en cas de rvolution ou de coup d'Etat : aurons nous l'Arme pour nous ? Pareillement l'opinion publique synthse individuelle de structures gnrales (l'ouvrier ou l'intel lectuel de gauche). Donc en de et au-del de l'objet : l'en de : former un rgiment (discipline, habitude, etc.) - l'au-del (point de rupture : mcontentement, mutineries). 5 Valeur. Le rgiment est valeur(drapeau, fourragre) mais valeur vitale. Conscration de son mana qui est mordant , fougue , etc. Tout cela est bien entendu mim. Il faut que les consciences se fassent inertes et gnrales. Il faut que tout le monde soit en complicit. Qu'un groupe refuse. le rgiment est par terre. Cela signifie naturellement que. pour que le rgiment soit. il faut le vivre. Mais il y a tout pour le vivre. a) Penser l'Autre en objet. b) Se vouloir justifi. c) Penser avec son corps le gnral (perception = action =gnral). Cepen dant le rgiment est toujours dehors. Objet hantant les consciences. On n'est jamais assezrgimentaire. Le rgiment pour l'Autre titre d'action : pour enlever cette redoute. Naturellement : Arme liai son des rgiments. Forme plus faible parce que les rgiments sont individuels. Pourtant unit. Unit dj plus abstraite (l'arme n'a pas de valeur vitale par elle-mme. Pas d'aspect. Retourne au gnral avec unit singulire temporelle). Donc : objet gnral avec unit temporelle, instrument passif, demi-abstrait, dont les struc tures premires sont des units individuelles (rgiments) et les structures secondes des lments gnraux. En outre : unit orga nique de l'arme (hirarchie des rgiments) - unit mcanique du rgiment (fait d'atomes, de parcelles). L-dessus ['vnement comme unit mouvante des deux armes. L'unit est dans une conscience (Napolon) : en ce sens uvre d'art. Imposition d'une forme une matire. Mais trs ambigu. A) La totalit implique la raction du gnral adverse. Donc l'unit subjective et synthtique prise comme objet dpasser, donc aline et dtruite (djouer l'adversaire c'est dtruire son effort). Donc dj aspect ambigu de l'objet : forme vanescente. Objet comprenant intrieurement une double dsagrgation : destruction de l'unit napolonienne par Wellington. Destruction de l'unit wellingtonienne par Napolon. 36
  32. 32. ependant ce niveau il y a victoire, donc un des adversires impose son unit historique l'autre. Mais l'unit dernire contient titre destructif l'unit interne du vaincu. La bataille ne s'est jamais passe comme le voulait le vainqueur. L'unit de la vc,toire est une fausse unit qui se rsout en mille dfaites p,J1iculires (au niveau par ex. des rgimnts). C'est que J matire, ' ici, considre elle-mme la forme comme matire. Erl outre ce niveau c'est l'action physique, donc le gnral, la division l'infini, l;inintelligible. La face de hasard de, tou vnri1ent historique. Donc unit destructive : l'erreur de Grouchy esdrrelevante dans les plans de Napolon et de Wellington. Hasard d'ailleurs immdiatement repris par une invention : on en profi. tera pour... (le gnie c'est d'utiliser le hasard). Mais ambigut du hasard utilis : il est humain et il reste hasard. A ce hiveau donc la force, la matire. Mais qui dcide qu'une bataille est perdue (Pierrefeu), qu'une bataille perdue dcide d'une guerre ? C'est l chef de gouvernement, dans une certaine mesure l'opinion publi que selon le mythe de la guerre en usage. Donc action du hasard (t contingence du gnie : autre hasard) reprise par les structures permanentes d'une socit et d'une poque. Nous retrouvons la signification. Donc la signification que reoit la bataille dpend en partie d'elle-mme, en partie de l'interprtation de ses rsultats. Mais cette signification tait prsente au dbut comme structure future de la bataille : selon les rgles de l'art militaire, telles conditions elle tait gagne ou perdue. 25) Il y a deux prvisions : celle du gnral et celle de la libert. On peut prvoir la libert : X saura comment trouver une manire gnreuse et discrte de leur faire accepter ce don. C'est un autre nom pour confiance. Le politique prvoit le gnral. 26) Le hasard est dans la pluralit mme des consciences, comme aussi l'extriorit, mais l'unit des consciences en collecti vit est contre le hasard. ' 27) L'action de l'Histoire est par proposition. Et par force. lieS. 28) Mais il y a chez tous la sphre de gnralit (Rorschach). Il y a des interprtations gnrales assures. , : 29) Dans la mesure o un fait d'opinion runit par force dans une unit des consciences objets les unes pour les autres, l'unit est claire-voie et le hasard est introduit dans la signification. La non signification de la signification. ' k ',: ' .' : 30) Je suis objet de l'Histoire et expos aux violences en tant qUe je suis objet, transcendance,transcende [pour] l'Autre. Mais suje
  33. 33. de l'Histoire en tant que je reprends ou non mon compte les propositions. Et comme finalement ceux qui me font violence ont consenti l'ordre, la violence elle-mme est fait signifiant. 31) Evolution de l'Histoire : d'abord dans l'Histoire mme, lments non historiques :esclaves, serfs, ouvriers. L'Histoire se fait en dehors d'eux. Ils sont matire historique. L'histoire des hommes n'est pas alors l'histoire de tous les hommes. En outre sparations de pays : des histoires (histoire de France, d'Espagne, etc.) donc universalisation possible. Ainsi : 10 lments d'ternit dans l'His toire ; 20 lments d'universalit abstraite. Deux ngations de la dure individuelle. 32) Dans l'Histoire aussi l'existence prcde l'essence. Car la reprsentation de l'Histoire entre comme facteur actif dans la dtermination de l'Histoire. L'Histoire est ce qu'on la fait. Mais dans une conscience il y a adquation entre tre et conscience d'tre. La sparation dans l'Histoire fait qu'elle n'est jamais totalement ce qu'on la pense tre. 33) La dcouverte de l'Histoire elle-mme facteur historique : passage de l'ternit (Antiquit, Moyen Age, l'Histoire est l'acci dent) au pass (XVIIe : l'Histoire est involution), du pass au prsent (Querelle des Anciens et des Modernes - XVIIIe), du prsent au futur ncessaire (le prsent comme inessentiel par rapport au futur), enfin aux trois ek-stases. 34) La temporalit conue comme dchance. Image inessen tieIIe et brise de l'ternel qui est en dehors du temps. Vie de l'homme purement phnomnale. Apparence, preuve. Sans doute il existe un avenir mais c'est l'avenir naturel. la proprit de chacun. L'Histoire est un mythe. Ou alors elle sert montrer la prennit de certaines institutions travers leurs vicissitudes. Le temps est essentiellement celui de la rptition. XVIIe : conqute du pass. L'historicit pour Pascal : apparition d'un vnement essen tiel : la chute. D'un autre : la rdemption. Le troisime : le jugement est intemporel. Futur reste naturel. Futur de rpti tion. Involution jusqu'au prsent. Le prsent est l'immdiat. Conscience immdiate du prsent et du futur. Moindre ralit du prsent, moindre valeur. Le pass pas tout fait autonome : image de l'ternit. XVIIIe sicle : le prsent. S'accompagne de ngation de l'ternel extra-mondain. Mais le prsent reoit en lui l'ternel. Eternit de l'instant. Le temps est ce qui divise. Futur et pass conus comme inessentieis. Renversement de l'ide de pass : devient ce qui mne au prsent (Voltaire). Instant - plaisir - 38
  34. 34. analyse - individualisme - associationnisme. XIXe sicle : le futur. Instant disparat. Ide d'une dure lie. Le prsenfet le pass c'est le mal. Progression comme sens de l'historicit. Histoire et progrs. Comte-Marx. M.ais projection de l'absolu dans l'avenir. Dcouverte de l'unit de l'Histoire (pense d'un universel concret au bout. Fin de l'Histoire ou fin de la prhistoire). L'avenir comme appel et justification du prsent. Ngation de l'individualisme. Ide d'Espce humaine. Puis crise de la science et crise de l'Histoire (xxe sicle). L'Histoire. comme conscience d'elle-mme conquiert ses trois dimensions. Pass, prsent, avenir. La personne en socit. Mais coexistence : l'Eternel avec l'homme comme inessentiel (christianisme) - l'Absolu futur avec le prsent comme inessentiel (marxisme) - le prsent instantan avec inessentialit des deux autres (mdiocrit - hdonisme littraire) - la temporalit historique concrte : l'homme faisant l'Histoire. Or l'Histoire n'a cess de se faire pendant qu'on avait de fausses reprsentations d'elle ; c'tait une histoire immdiate qui ne se dterminait pas par la conscience qu'elle avait d'elle. Elle tait plus proche de la rptition et de l'ternel, de la sparation et de l'universel. Le temps vcu n'avait pas le mme contenu. Il y a changement progressif de l'essence de l'Histoire. Ainsi le rapport de l'Histoire au mythe historique est lui-mme Histoire. Pour la morale, elle ne se distingue pas d'abord du rapport (religieux) l'ternel. Puis de la tradition et des coutumes. Ensuite elle devint autonome et ce fut le moyen d'organiser le prsent. Puis elle cde le pas la prparation de l'avenir. (Lnine : moral est ce qui peut aider la rvolution.) Aujourd'hui elle a repris son autonomie : c'est l'ensem ble d'actes par lesquels l'homme dcide pour soi et pour autrui dans et par l'Histoire de l'essence de l'homme. Elle confre un sens la tradition en la reprenant dans le sens de l'avenir. Mais elle ne sacrifie pas le prsent (bonheur) l'avenir qui est par nature hypothtique parce qu'il est faire. Il n'y aurait pas de morale si l'homme n'tait en question dans son tre, si l'existnce ne prcdait l'essence. 35) Puisque l'Histoire ne peut sauver les souffrances des enfants d'Oradour, mme si elle a une direction, elle n'a pas de sens. Toujours l'illusion d'une humanit. Mais non seulement les Ana baptistes sur leur bcher ne sont pas sauvs par la dictature du proltariat mais, ressuscits, ils la condamneraient parce qu'im pie. Ainsi l'Histoire est perte sans rcupration. Il ne faut pas vouloir une collectivit morale pour sauver l'Histoire mais pour raliser la morale. 36) L'esprit que dtermine ce moment du temps ncessairement se dessche - et, tout entier tendu, il veut ce desschement. Le 39
  35. 35. mythe et la possibilit du mythe se dfont : subsiste seul un vide immense, aim et misrable. L'absence de mythe est peut-tre ce sol, immuable sous mes pieds, mais peut-tre aussitt ce sol se drobant. L'absence de Dieu n'est plus la fermeture : c'est l'ouverture d l'infini. L'absence de Dieu est plus grande, elle est plus divine que Dieu (je ne suis donc plus Moi, mais absence deMoi :j'attendais cet escamotage et maintenant, sans mesure, je suis gai)... La dcisive absence de foi est la foi inbranlable. Le fait qu'un univers sans mythe est une ruine d'univers - rduit au nant des choses - en nous privant gale la privation la rvlation de l'univers... c'est le dnuement qui parfait la transparence... La nuit aussi est un soleil et l'absence de mythe est aussi un mythe (Georges Bataille, Le Surralisme en 1947, p. 65). 37) Ce qui est subjectivit oriente, vu du dedans du groupe est hasard pour l'autre groupe. C'est pour des raisons prcises et intelligibles que les savants d'U.R.S.S. n'ont pas encore trouv la bombe atomique. C'est hasard pour la politique stalinienne. 38) Aspects de l'vnement : 1 Unit en tant que psychique, il renferme en lui une divisibilit l'infini en tant qu'il est nature. Tendance naturelle s'carteler, s'effondrer, comme le skieur dont, tout coup, grande vitesse les deux skis divergent. Donc premire extriorit de l'vnement mme en tant qu'il est vcu subjectivement : tend plir et se perdre. 2Pluridimensionnalit. L'vnement chemine en mille consciences la fois. Chacune d'elle est plus ou moins loigne de la gnralit. Ainsi se rfracte-t-il de mille manires diffrentes. Mais il ne s'agit pas de reflets : Ja manire de vivre l'vnement fait partie de l'vnement lui-mme. L'indignation du public l'occasion d'un dcret fait partie d l'vnement dcret. La faon dont il est appliqu (c'est--dire la conduite des gens vis--vis de lui) galement. C'est--dire que la signification du dcret fait partie de lui, est pluridimensionnelle et mme thoriquement infinie. En fait la structure fibreuse de l'univers lui confre une finitude.Mais prcisment parce que cette signification agissante est pluridimensionnelle, l'vnement est dsquilibre, c'est une prolifration dcentre. Par ailleurs chaque conscience, mme si elle joue l'inertie, du seul fait qu'elle saisit l'vnement selon ses propres principes, lui donne l'unit synthti que et le dveloppement synthtique de l'Esprit. Mais le nant qui spare une conscience d'une autre introduit la passivit. Actives en tant qu'elles synthtisent l'vnement, les consciences sont passi. ves en tant que spares par rien. La sparation soufferte, voil la passivit. En ce sens l'vnement est mille fois spar de lui-mme et joue l'extriorit, puisque les interprtations vcues font partie 40
  36. 36. ,0I1stitutive de lui et que chacune est extrieure l'autre. Mais comme cette extriorit est son tour interprte (jejuge l'attitude de mon voisin dans l'affaire Dreyfus et je ragis en outre cette attitude) et devient, de ce fait, partie intgrante de l'unit, en chaque conscience, l'extriorit noire, les fissures innombrables de rvnement sont baladeuses, il est impossible de leur attacher une place quelconque. Simplement il y a un dehors dans le dedans, dehors perptuellement ressaisi. C'est ce rapport dehors-dedans qui fait que l'vnement chappe tous et chacun : son inertie, sa lourdeur propre ne vient pas d'une inertie physique mais d'une perptuelle reprise. Je ne peux pas l'arrter parce qu'il y a d'autres consciences. En mme temps l'apprciation vcue de chacun devient objet pour l'autre, ainsi l'vnement a-t-il une objectivit interne. En mme temps, dans la mesure o il se produit selon Certaines zones de clivage institutionnelles (la grve des chemins de fer de 1947 vcue surtout dans un certain secteur de la vie sociale) et cause de la structure fibreuse de l'univers historique, il peut tre tout entier objet pour une certainecatgorie de conscien ces. Alors son unit est statistique. Les cheminots se sont mis en grve. A noter que les cheminots sont des fonctions ce moment-l. Les composantes de l'vnement sont abstraites et satistiques. 3 Contingence : mme s'il est prpar, ncessaire, intelligible et comprhensible, l'vnement se prsente toujours avec une profonde contingence parce qu'il inclut le hasard. a) En tant qu'il y a sparation des consciences il faut qu'une concidence s'tablisse. En gnral les consciences sont unies par un spectacle (un soldat nerveux tire sur la foule - ou on le croit, etc.). Mais prcisment le spectacle, comprhensible pour une conscience particulire qui le produit (ce n'est pas du tout un hasard si le oldat tait nerveux ce jour-l), devient hasard por la foule, par suite de l'altrit. C'est toujours par quelque chose qui aurait pu ne pas tre que l'vnement qui devait tre prend naissance. 13) L'tre dans-le-monde de l'homme comme contingence : le terrain, le point de vue, les accidents physiques (soleil dans les yeux, etc,). y) Le total dsquilibre entre les consciences vivant en inertie et ks consciences libres. Les consciences libres inventent et les conscien es inertes sont affectes. Donc tout se passe comme si l'vnemt:;nt devait les surprendre. Ainsi a-t-il toujours une part d'inatteniu. Inattendu-attendu, extriorit-intriorit, contingent-ncessaire, invent-subi, matriel-spirituel, perptuellement unifi-miett par cette unification mme, objet-sujet, perdu et retrouv, l'vne ment est brusque concentration contingente analogue l'appari tion d'une pense dans un esprit, puis cette forme instable en se dveloppant plit par mille mouvements qui l'cartlent, chaque conscience s'intgrant avec le temps d'autres systmes instables. Il y a un syncrtisme, une loi d'inertie de l'vnement - il se 41
  37. 37. dveloppe par son propre poids, il va au plus bas par sa lourdeur pronn - et, en mme temps, une loi d'action. L'vnement est p: . ctH. C'est une activit enchante par la passivit, qui se fait passive et s'affecte elle-mme en tant qu'activit ; c'est une passi vit joue et signifiante. Tout se passe comme si l'vnement (intermdiaire entre le fait physique et l'Erlebnis libre) tait une pense de l'Esprit-un, surgissant librement par invention mais s'affectant elle-mme de passivit dans la surrection libre elle mme, du coup se morcelant l'infini et cherchant se rattraper dans l'unit vivante d'un esprit, mais par le mouvement mme qu'elle fait pour se rcuprer s'alinant et se morcelant davantage, finalement perdue, brise, ne pouvant plus se reconnatre et pourtant hantant comme un fantme d'unit mille petites recon naissances particulires. En un mot l'hypothse du Parmnide : si l'un est non-un. 39) L'Histoire dernier effort de rcupration, aprs la rflexion et le surgissement d'autrui. Essai pour constituer une conscience historique une et collective comme mdiation entre les consCiences individuelles. Chaque conscience se traite comme l'inessentiel par rapport une consCience essentielle en devenir qui est la totalit. C'est le rve dissoci, dissmin de la totalit fantme travers la dispersion. Pseudo-histoire parce que pseudo-unit. 40) L'universel est, d'une certaine manire, une fuite (Bataille). L'envers de tout projet vers... C'est la fuite hors de... (Van Lennep). 41) La poursuite de l'Etre c'est l'enfer. L'chec peut conduire la conversion. Il peut aussi tre ni de mauvaise foi. S'il est aim et reconnu la fois, sans conversion ou en dehors de la conversion, c'est la Posie. L'homme authentique ne peut pas par la conversion supprimer la poursuite de l'Etre car il n'y aurait plus rien. Mais il peut aussi aimer se perdre, alors il est pote. Maldiction issue de posie, c'est--dire de l'amour de l'chec. Amour de l'impossible. L'homme authentique ne peut pas faire qu'il ne soit par quelque ct potique. Description du monde potique. 42) Fait historique vcu. Dialectique historique : en un sens trop idaliste. Ce n'est pas hasard simplement ou btise si les marxistes en reviennent souvent l'explication causale lorsqu'ils envisagent un phnomne concret. C'est que la dialectique, issue de Hegel, supprime l'inertie et la multiplicit. En fait une dialectique sans unit n'est pas concevable. En outre toute dialectique une fois reprsente 42
  38. 38. (rflexion) agit par reprsentation de la dialectique, donc non dialectiquement. Sans doute dans l'Esprit-un on peut concevoir que la conscience, rflexion de la dialectique, se retourne dialecti quement sur l'vnement dialectique et renforce la dialectique. Mais l encore c'est qu'il y a unit et pntration de la dialectique par la conscience. Mais de par la nantisation sparatrice la dialectique apparat comme objet la conscienCe qui la considre et de ce fait elle est probable, et aussi la conscience agit par imitation de la dialectique, donc en se passivisant. Elle devient ce moment cause antidialectique. D'ailleurs l'vnement historique est par dfinition moyenne. Par quelle harmonie prtablie les vnements statistiques s'engendreraient-ils les uns les autres SOlis forme dialectique ? En tant que moyenne l'vnement historique n'est que le rsultat et il n'agit que par proposition. Il faut qu'il soit repris. Si nous reprenons la description du fait historique, nous voyons qu'il est d'une part tout entier activit : chaque conscience est agent d'Histoire, elle s'historise. Mais d'autre part tout entier passivit : chaque conscience se voit volerIes consquences de son acte par les autres consciences et agit dans l'ignorance, chaque acte est proposition, donc tal, passif, ouvert. Chaque fait historique enferme donc en lui-mme l'inertie de l'extriorit de la nature en mme temps qu'il est perptuellement historicisation active. En tant qu'il est inertie il enferme le dterminisme, le rapport causal (mais surmont). Or la liaison causale est perptuellement extrio rit donc l'vnement est spar de lui-mme par un nant substantifi (pas du tout nant nantis mais nant donn de la spration) et en outre le processus causal est celui de l'quilibre et de la dgradation d'nergie, de l'parpillement donc du retour l'quivalence et de la destruction. Ainsi un des sens du processus historique, c'est la mort. Il est fini ds qu'il commence. Non la mort hroque et intime du Sein-zum-Tode mais la mort par retombe, par pesanteur. C'est la pesanteur naturelle du fait historique, en perptuelle voie d'extriorisation, d'parpillement et de retombe. Mais d'autre part, et cause de l'extriorit des consciences, il est perptuel enrichissement et dpassement parce que l'Erlebnis de chaque conscience est situation dpasser pour l'autre. Ainsi selon une des directions o il est cartel le fait historique justifie toujours la sagesse pessimiste : Tout finit toujours trs mal. La raison n'en est pas la folie des hommes mais l'aspect qu'on pourrait nommer physico-chimique de l'Histoire. Et d'un autre ct, le fait historique est toujours espoir, renouvellement d'espoir, garantie d'espoir, en tant qu'il est invention partir de... De ce point de vue il offre l'apparence de la dialectique : si la dialectique est, en effet, logique cratrice, la conscience de l'Autre en reprenant comme ncessit logique la situation vcue par la premire conscience et en la dpassant [est] sur les rails mmes de cette ncessit logique. 43
  39. 39. Comme .toute reprise est dpassement, avant mme l'invention consciente et dirige, on peut dire que l'apparence de la dialectique vient d'une situation pluraliste o chaque conscienceest axe dans sa nouveaut originelle par les autres consciences. Ou, si l'on veut, il y a apparence de dialectique dans le seul fait que ce qui est vcu pour run est situation dpasser pour l'autre. La dialectique se fige d'ailleurs en incomprhension pour le troisime venu qui peut choisir de partir de l'une ou de l'autre conscience ou du progrs. Autrement dit la dialectique prolifre dans mille directions diff rentes et c'est la statistique (donc contingence et abstraction, l'introduction du hasard) qui dcide de l'orientation dialectique qui fait l'Histoire, en dcrtant que les consciences qui tombent hors de la moyenne sont attardes, gares ou monstrueuses. Ce jugement lui-mme n'est pas sans appel puisqu'iL sera rvis (Grco - Sade - Robespierre - Holderlin) par la postrit. Cependant pour chaque tierce conscience le rapport conscience A conscience B est vcu avec malveillance en extriorit : on ne voit plus la reprise libre mais seulement la succession : B vient aprs A. Cette pure unit dans la succession est justement la relation kantienne de causalit. Ainsi l'ambigut de toute dialectique c'est qu'elle est sous-tendue par la causalit. L'histoire d'un mouvement idologique peut toujours tre tente en psychologie de sparation en mme temps qu'en lucidation unitaire de sa logique propre. D'autre part le fait historique est une singularit. Mais il enveloppe le gnral de deux faons : d'abord d'une certaine manire que nous avons dite (rgiment de Waterloo) ensuite parce que le fait historique est ncessairement aussi travail. Qu'il s'agisse ' des courses de Hitler, de Napolon travers le monde ou de l'invention de la machine vapeur, un certain travail humain est indispensa ble. Et ce travail humain est le rapport de la gnralit gnrali sante qu'est le corps avec la gnralit sans mmoire de la matire. A ce niveau le vritable agent historique doit s'incarner dans le gnral parce qu'on n'agit en gnral sur le gnral qu'en se faisant soi-mme gnral. Le travailleur historique est pourvu d'une conscience gnrale. Il est le mdiateur entre la singularit de l'ide et l'universalit de la matire. Qu'est-ce donc qu'une conscience gnrale ? C'est une conscience qui s'absorbe dans le corps en tant que le corps est besoin, qui fait exister dans leur gnralit les relations les plus simples de l'tre-dans-le-monde. : faim, fatigue, justice, injustice, etc. C'est la conscience du soldat, du petit-bourgeois, du proltaire fatigu (le travail en abrutissant gnralise, ce que fait aussi le respect ou la faim). Ce sont eux qui dpensent une inoue nergie humaine accomplir le travail historique, c'est--dire insrer l'Histoire dans la matire, sous forme de schmes gnraux. Seulement pour l'imprimer en ext riorit et en gnralit dans la matire, il faut qu'ils le reoivent 44
  40. 40. djtn:gnralit. Autrement dit l'ide historique ne.peutagir qu si elle est susceptible de gnralisations et de simplifications croissantes. Le fait historique est en pyramide. Il a en quelque sorte une . me et un corps. Une base de. gnralit, donc un dcalage jn1;rne. : le. marxisme pyramide, au,.plus haut dialectiquehisori que,et matrialisme, au plus bas suppression des injustices etde la m.isre : proltaires de tous les pays unissez-vous. Inertie du gnral par rapport au singulier : mobilit du fait historique par en haut (dialectique), stabilit par en bas : diversit de l